Définition
Le solde primaire est une
variable cruciale pour
mesurer la “soutenabilité” de
la dette publique, car il est l’un
des facteurs* qui commandent
l’évolution à la hausse ou à la
baisse du ratio dette/PIB.
La dette d’un État se mesure en
termes de rapport au PIB (la
richesse produite durant une
année sur le territoire national ou
encore les revenus bruts générés
sur le territoire), car c’est à
partir du PIB que l’État peut
dégager ses recettes par prélèvement.
Une formule mathématique
permet de mesurer le niveau du
solde primaire nécessaire à la
stabilisation de ce ratio d’une
année sur l’autre, c’est-à-dire
d’en bloquer la croissance.
C’est là une condition nécessaire
à la “soutenabilité” pour
les pays à fort endettement ;
elle n’est cependant pas suffisante
car, si le ratio est “trop”
élevé, il ne suffit pas de le stabiliser
: il faut le réduire. Dans
le cas du Liban, par exemple, il
faudrait un excédent de 7 % du
PIB, soit environ 1,6 milliard de
dollars pour que le ratio d’en-
Le solde primaire des opérations
de l’État présente la
différence entre les recettes et
les dépenses publiques indépendamment
des paiements
d’intérêt sur la dette publique.
Ce concept budgétaire a
symétriquement une dimen-
Comprendre la variable
Définition
La formule suivante permet de
mesurer le niveau du solde
primaire nécessaire à la stabilisation
du ratio dette/PIB.
S = solde primaire
i = taux d’intérêt réel (corrigé de
l’inflation)
c = taux de croissance réelle
(corrigé de l’inflation)
D = ratio dette/PIB
= ratio de seigneuriage (création
monétaire par la Banque centrale
au profit de l’État) que l’on supposera
nul pour l’instant.
Dans le cas du Liban, avec un
taux de croissance réelle de 2 %,
un taux d’intérêt réel de 6 %, un
ratio dette/PIB de 178 % (41 milliards
de dollars de dette pour un
PIB de 23 milliards de dollars), le
solde primaire nécessaire à la stabilisation
de l’endettement est de
7 % du PIB.
S = (0,06-0,02 / 1,02) x 1,78
S = 0,07 soit 7 % du PIB
Si la croissance est nulle, le
solde primaire nécessaire
s’élève à 11 %.
Le tableau ci-dessous illustre cette
relation et montre le degré de sensibilité
du solde primaire nécessaire
à la stabilisation en fonction du
taux de croissance et du taux d’intérêt.
Un solde négatif correspond
à un excédent primaire et un solde
positif à un déficit primaire.
Quel excédent primaire pour stabiliser la dette ?
Taux de croissance
-4 % 0 % 4 % 8 %
0 % 7 % 0 % -8 % -16 %
4 % 14 % 7 % 0 % -8 %
8 % 21 % 14 % 8 % 0 %
12 % 28 % 22 % 15 % 8 %
Taux d’intérêt
sion économique : un excédent
primaire correspond à un
prélèvement net sur les revenus
disponibles de l’ensemble
des ménages, en faveur des
détenteurs des titres de la
dette publique, tandis qu’un
déficit net correspond à une
injection de revenus supplémentaires
pour l’ensemble des
ménages, financés par un
endettement supplémentaire
net auprès des prêteurs.
Ainsi, un excédent budgétaire
primaire = une diminution nette
des revenus des ménages sert
nécessairement à couvrir le
coût des opérations purement
financières de l’État, alors
qu’un déficit budgétaire primaire
= une hausse des revenus
des ménages est couverte
par une augmentation de
l’endettement de l’État.
dettement reste à 178 % du
PIB en 2007 (cf. calcul en
encadré).
Le solde primaire est à ce titre
la principale variable sur
laquelle se focalisent les plans
d’ajustement structurels proposés
par le Fonds monétaire
international. Si le FMI a souvent
essuyé des critiques, c’est
que pour dégager un excédent
primaire il est possible d’agir sur plusieurs postes de dépenses
ou de revenus. Or, à résultat budgétaire
égal, l’impact économique
varie considérablement. Une ponction
nette sur les revenus disponibles
se traduit par une baisse de
la demande intérieure et donc de
l’activité. Cette baisse peut se doubler
d’un effet social plus ou moins
grave en fonction de l’impact redistributif
de la fiscalité et des modes
de dépenses.
Plus on resserre les dépenses relatives
aux services de base d’une
part, aux investissements dans de
nouveaux équipements et l’entretien
des équipements existants,
plus l’impact sur la croissance est
négatif. Et plus la fiscalité touche
des composantes essentielles de
la consommation de la majorité
des ménages, plus on favorise une
hausse des indices de pauvreté et
des difficultés sociales.
À l’aspect quantitatif que l’on
associe spontanément à la notion
d’excédent primaire, il faut donc
ajouter un aspect qualitatif. Cette
variable étant une interface entre
deux réalités, l’une budgétaire et
l’autre économique, elle ne peut
pas être un objectif en soi, mais
doit faire l’objet d’arbitrages.
(*) La croissance et le taux d’intérêt réels
influencent aussi l’évolution de ce ratio, la
première, car elle agit sur le niveau du PIB,
au dénominateur, le second, car il agit sur
le niveau de la dette, au numérateur, à travers
son impact sur le service de la dette
dont le niveau détermine aussi les besoins
de financement de l’État. Le tableau ci-contre retrace
l’évolution de l’excédent primaire
au Liban depuis le début
des années 1990 et l’écart par
rapport à l’excédent qui aurait
permis de stabiliser la dette.
On distingue clairement deux
périodes :
- de 1993 à 2001, une expansion
effrénée des déficits ;
- depuis 2002, un resserrement
qui arrive malheureusement avec
beaucoup de retard, alors que la
dette atteint 175 % du PIB, et qui
est très sensible à la conjoncture
(favorable en 2004 et défavorable
en 2005 et 2006).
(% PIB) 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Dette 48 71 80 100 104 117 139 156 175 169 174 169 181 183
Solde primaire pour
stabiliser dette/PIB -7 4 -1 3 3 7 13 17 15 -2 7 -4 10 3
Solde primaire
effectif -4 -12 -9 -10 -13 -4 -2 -8 -5 2 4 5 3 -2
Écart 3 -16 -9 -12 -17 -10 -15 -25 -20 4 -3 9 -7 -5
Évolution de la variable au Liban