Il s’appelle Patrick Maalouf, il a tout juste trente ans ; il vient de s’installer à Beyrouth et il a choisi de conquérir les intérieurs de son pays et ceux du Moyen-Orient en commercialisant des stickers muraux, des produits déco dernier cri créés par deux Français, dont l’un est d’origine libanaise. Les stickers muraux Paristic servent à décorer les appartements branchés, les plateaux télé, les vitrines, les hôtels… L’aventure commence dans la Ville Lumière, en avril 2007, lorsque deux amis parisiens de 27 ans, l’un diplômé d’une école de commerce, Emmanuel Désormeaux, de mère libanaise, l’autre des Beaux-Arts joignent leurs talents pour se lancer dans la création de stickers décoratifs muraux.
L’idée est partie de rêves d’adolescents qui passaient leur temps sur les toits à contempler Paris : une source d’inspiration pour les motifs de leurs autocollants géants. Les symboles de la capitale comme la tour Eiffel, le Sacré-Cœur, les colonnes Morris, la lanterne XVII et les toits de la ville sont détournés pour servir de motifs de décoration d’intérieur. Ils font l’objet de la première collection de l’entreprise. Par la suite d’autres thèmes ont été élaborés : dessins d’animaux pour enfant, nature, personnalités célèbres, trompe-l’œil… Les stickers se vendent au BHV, aux Galeries Lafayette, chez Fleux (un concept store dans le Marais), au Printemps Design ; on les trouve aussi dans des points de vente en Espagne, à Barcelone, en Italie et en Irlande. Paristic fait la une de la presse spécialisée : Le Figaro Magazine, Biba, Cosmopolitan, Maison et Travaux… et s’invite sur les plateaux télé : M6 Déco, 100 % Mag ou Paris Première… Le milieu du design et de la déco parisien est petit ; la notoriété de l’entreprise grandit vite. Un collectif d’artistes, d’illustrateurs, de photographes, de graphistes diplômés des écoles les plus réputées contribuent au développement de l’entreprise y apportant leur touche et une vision contemporaine de la vie urbaine. Ainsi, le photographe Hilton McConnico apporte-t-il son label à l’entreprise. Un autre artiste, Ndeur, plébiscité par de nombreuses revues internationales de tendance à travers le monde qui a collaboré avec Fiat, Microsoft, Nissan, etc. s’est lancé dans la confection d’une collection de lés (papier peint repositionnable). Autre vecteur marketing puissant : l’univers des bloggeurs. Ils font la pluie et le beau temps dans le milieu parisien du design et de la tendance. Paristic les a conviés dans son petit showroom (40 m2) montmartrois pour une grande soirée, histoire de se faire connaître et référencer. Car l’entreprise compte beaucoup sur la vente en ligne qui représente environ 60 % de son chiffre d’affaires. L’entreprise a son propre site et vend également sur Amazon et sur eBay.
En 2009, le chiffre d’affaires de Paristic atteint déjà 650 000 euros, sachant qu’un sticker est vendu entre cinq et 200 euros suivant sa taille. L’investissement de départ de quelque 120 000 euros a déjà été rentabilisé. La mise initiale a été employée pour l’achat et la création de modèles originaux, test, prototype, matériel informatique, logiciel graphique, ouverture du showroom parisien. Depuis, le sticker a fait des petits : lé unique, photos montées sur des cadres en plexiglas, coussins avec impression sur tissus... Les idées de déclinaison du concept original sont nombreuses.

L’idée du Liban

Au cours d’un séjour en Tunisie où il explore les possibilités de délocaliser sa production, Désormeaux qui s’est séparé du cofondateur de Paristic rencontre chez un ami commun Patrick Maalouf qui explorait la possibilité d’ouvrir un restaurant dans la capitale tunisienne, après avoir abandonné l’idée de le faire à Beyrouth. Le courant passe, les deux jeunes ont l’envie de s’investir d’une certaine manière dans leur pays d’origine. Désormeaux et Maalouf pensent alors que le Liban et le Moyen-Orient (notamment le Golfe) pourraient être des marchés pour Paristic. En vacances à Dubaï, le book de Paristic sous le bras, Maalouf se présente aux Galeries Lafayette. Le responsable est tout de suite conquis par le produit. Il le met en contact avec la responsable des achats d’Admic à Beyrouth (détenteur de la franchise des Galeries à Dubaï et du BHV au Liban). Et c’est parti pour une première commande. Maalouf explore vite la possibilité de fabriquer au Liban les stickers destinés au Moyen-Orient : le savoir-faire local est nettement plus convaincant que celui du Maghreb et les coûts moins chers de 30 % qu’en France, même s’ils restent plus élevés qu’au Maghreb. Paristic a signé avec deux grands imprimeurs spécialisés. L’un utilise des machines à l’eau, sans matières chimiques, en conformité avec les normes européennes. L’objectif est de pouvoir par la suite exporter en Europe. Tout ne peut cependant encore être fabriqué au Liban ; c’est le cas des tableaux en plexiglas par exemple pour lesquels les machines requises n’existent pas.
L’investissement initial a été de 40 000 dollars pour démarrer l’activité libanaise, à travers une société séparée qui reverse des royalties à Paristic, dans laquelle Maalouf et Désormeaux sont partenaires. Il en faudra davantage pour accompagner l’ambition de cette jeune entreprise conquérante qui, à partir de Beyrouth, vecteur de tendances, vise Dubaï, Abou Dhabi, le Qatar et l’Égypte – Paristic vend déjà à Chypre dans deux grands magasins de déco. En quelques mois de présence au Liban, l’entreprise a déjà ouvert un showroom à Mansourié, où sont exposés 400 des 800 motifs disponibles. Elle a une commande pour un nouvel hôtel à Beyrouth d’une cinquantaine de chambres et a décoré une partie du Salon “La France au Liban” qui s’est tenu au BIEL en mars.
L’idée de Maalouf et de Désormeaux est d’avoir leur propre usine au Liban d’ici à 2011 pour y délocaliser toute la production. Ils voient grand : le Japon, les États-Unis…