Un tel ralentissement – que certains définissent déjà comme une récession ou un krach rampant – a des conséquences sur l’ensemble de l’économie mondiale : la consommation américaine représentant une part importante du PIB mondial (21 % en parité de pouvoir d’achat), sa baisse brutale entraînerait une crise économique majeure aux États-Unis comme dans les pays développés. Une chute de la consommation américaine aurait également des conséquences pour les pays émergents. Nul ne sait, en effet, dans quelle mesure les pays en développement peuvent se révéler assez autonomes pour résister à la chute de l'économie américaine. Pour l’heure, ce sont certes ces économies qui tirent encore la croissance mondiale. Des économies émergentes dont la soif de matières premières et d’énergies font exploser les cours et provoquent… le retour de l’inflation. Car, si la Chine ou l’Amérique latine s’en sortent plutôt bien (l’une des raisons en étant qu’ils sont producteurs d’énergies), d’autres, à l’image de l’Inde, subissent les contrecoups de la crise mondiale (+11 % d’inflation en moyenne annualisée en 2008).
Pour Albert Letayf, directeur du bureau de Beyrouth de l’Union bancaire privée (UBP), l’économie mondiale est entrée dans une phase de basculement du pouvoir économique des États-Unis vers les pays émergents. « Nous faisons face ici à un bouleversement économique historique. La “stagflation”, cette combinaison de croissance faible accompagnée d’inflation, commence à apparaître aux États-Unis et pourrait bien plonger l’Occident dans une longue crise économique. Les pays émergents, eux, ne se sont jamais aussi bien portés. Ce sont leurs fonds souverains qui ont sauvé le système financier mondial. Ils supportent par ailleurs des projets majeurs dans leur propre pays. Les pays émergents semblent avoir une dynamique propre et se libèrent graduellement de leur dépendance à la consommation américaine : leur besoin en investissement d’infrastructures et l’émergence d’une classe moyenne très nombreuse, dont les nouveaux besoins en matière de consommation, propulse la croissance de ces pays. Cette croissance exerce des pressions inflationnistes importantes sur le prix des matières premières notamment. » Face au basculement du pouvoir économique de l’Ouest vers l’Est, les pays émergents manquent encore de certains atouts essentiels. La Chine, par exemple, tarde toujours à se doter d’un secteur bancaire solide et compétent. Ces pays n’ont pas non plus eu « le temps de mettre en place les structures économiques, administratives, juridiques et sociales suffisamment solides pour pouvoir conduire l’économie mondiale », selon Albert Letayf.
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