Il y a quelques mois, cette jeune trentenaire, installée depuis dix ans à Londres, a été licenciée d’un grand groupe de finance internationale. Elle y travaillait comme spécialiste des fonds spéculatifs. « L’annonce a été brutale », concède-t-elle, pudique. « Même si l’entreprise a encadré notre départ contraint en nous permettant de profiter de nos bureaux pour rechercher un emploi, passer des coups de fil dans le monde entier ou utiliser la bourse de l’emploi interne pour postuler à d’autres postes. » Rima aurait pu rester à Londres, “attendre et voir venir”. Mais elle ne croit pas à une reprise rapide. « Une page se tourne. Les métiers de la banque vont se transformer. » Rima a donc lâché son meublé londonien, dispatché quelques valises chez des amis et acheté un aller pour Beyrouth. « Je suis en négociation avec une entreprise d’Abou Dhabi. Mais l’aggravation de la crise laisse peu d’espoir. » Faute d’un projet professionnel, la jeune femme en profite pour souffler et… réfléchir à son devenir. « Je songeais déjà à rentrer avant d’être remerciée. » Londres, dit-elle, a représenté une expérience professionnelle sans commune mesure avec ses années d’initiation, dans le milieu financier de Beyrouth mais, ajoute-elle, « lorsque je regardais certains collègues dix ans plus âgés que moi : je me demandais si je souhaitais le même destin. Une vie dédiée à son métier, un réseau social très large, mais pas de temps pour construire sa propre famille… » La crise alors pour Rima ? L’occasion de faire le point et, peut-être, de répondre à cet éternel balancement entre des désirs contradictoires : s’installer définitivement à l’étranger ou revenir au pays. « Revenir au Moyen-Orient est une vraie tentation. Mais pour y faire quoi ? La finance telle que je l’ai connue ? Ce n’est guère possible : Beyrouth n’est pas même une place régionale d’envergure. Changer de métier ? J’y songe bien que je n’ai encore aucune idée sur ma nouvelle orientation. » Elle sourit, heureuse de retrouver sa ville et sa famille. « Je crois que je vais attendre un peu. Après tout, j’ai vécu sur un rythme fou pendant des années. Je puis aujourd’hui m’accorder un peu de temps pour moi. »