Pourquoi vous intéressez-vous au Moyen-Orient ? Mon premier voyage au Liban date de 1961. Le Moyen-Orient m’a toujours intéressé à titre personnel. Je parle l’arabe. Quand on m’a proposé de prendre la tête d’une des régions du monde au sein du MIT, le Moyen-Orient s’est imposé. Son renouveau économique repose sur l’entreprenariat privé. La majorité des gouvernements de la région ont compris que pour la jeune génération, les emplois dans le secteur public ne suffiraient pas. Il faut les inciter à créer par eux-mêmes. Car une entreprise pérenne, ce sont plusieurs emplois à la clé. Les pays de la région ne consacrent que 0,2 % en moyenne de leur PIB à la recherche. Ne croyez-vous pas que cela limite l’innovation ? Il y a des secteurs où la recherche est nécessaire mais d’autres où l’on peut développer des produits déjà existants et les adapter. Regardez “Mulch & More”. La fondatrice est une jeune Libanaise d’une vingtaine d’année, Esraa Haidar. Elle cherchait comment aider son grand-père, un cultivateur dont les champs manquaient d’eau. Elle s’apprête à démarrer la production de paillis et de mulch à partir des déchets organiques récupérés. Et puis il y a aussi de vraies innovations : c’est le cas de Dental Vision, fondé par un Libanais-Canadien, Marwan Bitar, en passe de breveter un produit qui améliore la qualité des prothèses dentaires, en particulier leur couleur. La région fourmille d’exemples. Quelles en sont les manques ? En priorité, les débouchés. Aux États-Unis, le gouvernement fait appel aux services de PMI-PME. Il sait que c’est dans ces petites structures que se rencontre l’innovation et qu’elles sont les plus réactives. Ici, c’est plus rare. D’autant que les gouvernements retardent souvent le paiement de leur facture… Pour une PME, cela n’est pas supportable. La création d’entreprise a-t-elle des spécificités dans la région ? Une caractéristique qui va à l’encontre de tout ce que l’on entend : dans cette compétition, qui existe depuis 2007, un tiers des projets présentés le sont par des femmes, alors qu’aux Pays-Bas, seulement un sur 120… C’est aussi un élément à encourager. Les femmes sont l’avenir de l’entreprise. Elles sont aussi l’avenir de la région.