Naturalia existe depuis 1996. « Mais jusqu’en 2000, notre activité était confidentielle », avance Rania Kazan, qui dirige l’entreprise d’abord logée au sein de l’entreprise familiale : les Établissements Kazan, un distributeur d’alcool dirigé par son père Ibrahim. « Nous n’aurions jamais pu assumer seuls les coûts d’une entreprise normale. Quand le commercial partait en tournée pour distribuer les produits que nous référencions, il assurait également les livraisons pour le bio. » Il faudra attendre 2003 pour que Naturalia engrange ses premiers bénéfices.
Naturalia grandit en même temps que les scandales phytosanitaires. La crise de la vache folle (2000), puis la grippe aviaire (2004) sensibilisent un public pour qui le bio jusque-là s’apparentait à des coutumes hippies-écolos. En 2003, c’est un nouveau virage. Par décision familiale, à la suite de difficultés sur le marché de l’alcool, les Établissements Kazan décident de se spécialiser dans le bio. Naturalia devient sa seule activité.
La marque libanaise distribue aujourd’hui plus de 200 produits, depuis des thés, en passant par des farines ou des riz complets, des graines ou des herbes séchées. On les trouve aussi bien dans les supermarchés que dans les magasins spécialisés, voire dans son showroom de Hazmié. « En supermarché, la gamme généraliste domine. Dans les magasins bio, les produits sont plus pointus. Dans mon showroom, je propose des produits très spécifiques, dont la demande n’est pas encore développée. » Son chiffre d’affaires a franchi la barre des 300 000 dollars en 2010 et l’entreprise emploie désormais douze salariés. « Depuis deux ans, notre chiffre d’affaires est stable, preuve que nous avons atteint un palier. Pour nous développer, il va falloir étoffer notre gamme. »
À quelques exceptions près, Naturalia ne se fournit pas sur le marché libanais. Les prix, explique Rania Kazan, y sont souvent supérieurs à ceux du marché européen pour une qualité moindre. Et Rania Kazan de pointer du doigt, outre la pollution des sols de certaines régions libanaises, un problème d’échelle. « Un paysan libanais peut difficilement se payer des centrifugeuses qui nettoient les céréales, enlèvent les brindilles, les cailloux, voire extraient les premières pellicules de certaines céréales. Mon entreprise n’a pas non plus le matériel approprié. C’est notamment pour cette raison que j’importe de France : pour l’assurance de qualité. » Cela ne signifie pas que les produits vendus sont tous français. Son principal fournisseur est un grossiste, Markal, certifié Bio, qui fait son marché dans le monde entier. Ainsi les graines de lin, le sésame vendu sous sa marque proviennent-ils du Soudan et d’Éthiopie. Les farines vendues sous la marque Naturalia sont toutefois transformées au Liban pour plus de fraîcheur.
On pourrait croire que les prix de vente sont en rapport avec le nombre d’intermédiaires. Mais depuis peu, dit-elle, en riant « ce ne sont pas les tarifs de l’agriculture bio qui se rapprochent de l’agriculture conventionnelle. Bien au contraire : ce sont ceux de l’agriculture conventionnelle qui flambent, jusqu’à presque valoir les prix pratiqués en bio ». Les cours internationaux en effet connaissent des pics vertigineux, conséquence entre autres de différentes catastrophes naturelles, comme les feux qui ont touché l’été dernier la Russie. Les prix de l’agriculture bio sont restés, eux, stables. « En définitif, il pourrait devenir plus intéressant financièrement d’acheter bio ! »
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