Le président Libanais Michel Sleimane, qui a signé mercredi différentes loi, dont celle – contestée - sur les violences conjugales, a choisi de ne pas parapher celle qui concerne la libéralisation des loyers anciens, adoptée par le Parlement le 1er avril dernier.
 
Ce texte de loi prévoit une libéralisation progressive (sur neuf ans) de tous les baux résidentiels antérieurs à 1992, connus sous le nom de « loyers anciens » tout en programmant celle des baux commerciaux. Le projet crée également une Caisse de solidarité, financée par les pouvoirs publics, afin de venir en aide aux locataires, incapables de faire face aux augmentations de loyers prévus.
 
« Les délais constitutionnels, prévus pour la signature de la loi, ne sont pas épuisés : le Président a un mois, c’est-à-dire jusqu’au 10 mai, pour décider de promulguer le texte en l’état ou bien de le renvoyer devant le Parlement pour réexamen », explique Antoine Khair, membre du Conseil constitutionnel.

La présidence n’a, pour l'heure, pas précisé ses motivations. Mais, selon différentes sources, Michel Sleimane ne souhaite pas voir son nom associé à ce projet car,  « la loi votée comporte en l’état un déséquilibre et ne garantit pas la justice sociale », comme l’explique Chadi Karam, conseiller économique du président. « On ne corrige pas une injustice sociale existante en en créant une autre », a-t-il ajouté.
 
Quel sera donc le sort de ce projet de loi ? Selon Antoine Khair, le président de la République a deux options : promulguer la loi dans le délai légal imparti ou bien la renvoyer au Parlement pour une seconde délibération.
 
« L’article 57 de la constitution l’autorise, après en avoir informé le Conseil des ministres, à demander la révision de la loi au Parlement. Cette requête ne peut pas lui être refusée. Il doit cependant en faire la demande dans ce délai imposé d’un mois », assure Antoine Khair. 
 
D’après Chadi Karam, conseiller économique auprès de Michel Sleimane, c’est précisément ce que s’apprête à faire le président de la République : exiger la révision parlementaire du projet de loi, un droit qu’il ne peut toutefois exercer qu’une seule fois.

En théorie, Michel Sleimane pourrait également attendre la fin du délai d'un mois sans signer ni renvoyer le projet de loi devant le Parlement. La loi alors serait considérée comme « executoire de plein droit » et « promulguée» (article 57 de la constitution) de facto.  A charge ensuite pour certains représentants politiques (Président de la République, Président de la chambre des députés, Premier ministre  ou dix députés ensemble) de saisir le conseil constitutionnel pour avis.
 
Si cependant la loi de libéralisation des loyers anciens revient devant les députés, ils auront alors deux options possibles : « insister », c’est-à-dire revoter la loi en l’état, sans en amender le contenu, malgré le vœu présidentiel.

Ils peuvent aussi choisir de renvoyer ce projet en commission afin d’en présenter une nouvelle mouture. Dans ce dernier cas, aucun délai n’est imposé. Dans les deux cas, la loi devra être votée à nouveau (en seconde délibération) à la majorité absolue.  
Si c’est cette seconde option qui prévaut, « la libéralisation des loyers anciens est renvoyée à nouveau aux calendes grecques », affirme un juriste pour qui ce scénario est le plus probable.