L’association Arcenciel mène depuis quelques mois une expérience pilote dans la Békaa pour sensibiliser les habitants de Taanayel au tri à la source, parallèlement à la mise en place d’un centre de tri secondaire des déchets de petite taille.
Depuis dix mois, l’association Arcenciel, à l’origine de l’opération “Bouchons roulants” en 2009, a lancé, en partenariat avec l’Agence française de développement (AFD), un projet pilote dans la Békaa, afin de monter une filière entière de collecte, tri, recyclage et compostage. « Il s’agit d’un projet expérimental pour tester à une petite échelle le tri sélectif, étudier la composition des déchets et leur coût de traitement », explique Olivia Maamari responsable du programme environnement à Arcenciel. Première étape : sensibiliser les habitants situés autour des fermes de Taanayel au tri à la source. Trois poubelles différentes ont été installées à cet effet : bleue pour les déchets recyclables, verte pour les déchets organiques et noire pour les autres déchets. Au total, 250 personnes sont impliquées. « Il y a encore 10 % d’erreurs de tri. On passe voir les familles pour leur réexpliquer le principe, on mène aussi une campagne d’affichage. Les résultats sont encourageants », explique Christ Der Sarkissian, responsable du projet de gestion des déchets ménagers à Arcenciel. L’ONG vient de passer un accord avec la municipalité de Bar Élias pour généraliser le tri à la source à l’échelle municipale dans trois quartiers de la ville. Les déchets collectés arrivent ensuite dans un hangar situé à l’intérieur des fermes de Taanayel, qui sert de centre de tri secondaire, dont les équipements ont été financés par l’Usaid et Arcenciel. Les déchets organiques, qui représentent selon les chiffres de l’ONG 67 % des déchets domestiques, sont mis à part, dans un champ, où ils fermentent de six semaines à quatre mois, pendant lesquels ils sont régulièrement retournés. « Ce compostage domestique est déjà pratiqué par d’autres ONG dans la Békaa. Il suppose un gros effort de sensibilisation au tri à la source avant de pouvoir être généralisé », estime Christ Der Sarkissian. Arcenciel ne tire pas pour le moment de revenus du compost, produit en faible quantité. « Nous tentons d’en améliorer la qualité en ajoutant du lactosérum, de la bouse de vache ou des déchets issus des exploitations agricoles, mais les ajustements prennent du temps. » L’ONG a également obtenu un financement européen pour s’équiper d’un petit méthaniseur d’une capacité de 300 kg/jour, afin de transformer les déchets en biogaz, qui pourra servir de source énergétique au domaine.
Difficile rentabilité à petite échelle
La vente des déchets recyclables constitue la principale source de revenus du projet. Le carton est découpé avec une scieuse pour réduire son volume. Il est ensuite mis en balle et revendu à des entreprises de la région (Sicomo, Solicar, Sipco) à 55 dollars la tonne. Les métaux ferreux (comme les boîtes de conserves) se vendent tels quels à 230 dollars la tonne. Les plastiques ont une plus grande valeur : le PE (polyéthylène) – environ 10 tonnes/mois – est broyé, lavé et vendu à la société Narzicoplast à Beyrouth pour 575 dollars la tonne, tandis que le PET (polyéthylène téréphtalate) – l’équivalent de 6 tonnes/mois – qui est simplement compacté est écoulé à 250 dollars par tonne. Enfin, la tonne de métaux non ferreux (comme le cuivre ou l’aluminium) peut monter jusqu’à 900 dollars. « Le projet n’est pas encore rentable, précise Christ Der Sarkissian. ll faut rémunérer sept employés, financer les coûts opérationnels, comme l’électricité ou la maintenance des machines, sans compter les coûts de transport du camion de collecte. Le seuil de rentabilité suppose d’élargir l’expérience à 100 000 habitants. » Toujours en coopération avec l’AFD, Arcenciel espère lancer cette année deux projets similaires à Damour et dans le Akkar. Au total, le financement de l’AFD est d’un million d’euros.
Difficile rentabilité à petite échelle
La vente des déchets recyclables constitue la principale source de revenus du projet. Le carton est découpé avec une scieuse pour réduire son volume. Il est ensuite mis en balle et revendu à des entreprises de la région (Sicomo, Solicar, Sipco) à 55 dollars la tonne. Les métaux ferreux (comme les boîtes de conserves) se vendent tels quels à 230 dollars la tonne. Les plastiques ont une plus grande valeur : le PE (polyéthylène) – environ 10 tonnes/mois – est broyé, lavé et vendu à la société Narzicoplast à Beyrouth pour 575 dollars la tonne, tandis que le PET (polyéthylène téréphtalate) – l’équivalent de 6 tonnes/mois – qui est simplement compacté est écoulé à 250 dollars par tonne. Enfin, la tonne de métaux non ferreux (comme le cuivre ou l’aluminium) peut monter jusqu’à 900 dollars. « Le projet n’est pas encore rentable, précise Christ Der Sarkissian. ll faut rémunérer sept employés, financer les coûts opérationnels, comme l’électricité ou la maintenance des machines, sans compter les coûts de transport du camion de collecte. Le seuil de rentabilité suppose d’élargir l’expérience à 100 000 habitants. » Toujours en coopération avec l’AFD, Arcenciel espère lancer cette année deux projets similaires à Damour et dans le Akkar. Au total, le financement de l’AFD est d’un million d’euros.
Une stratégie “zéro déchets” ? “Zéro déchets” : c’est ce que prône l’ONG Arcenciel, comme un certain nombre d’organisations de la société civile. Une solution qui prévoit la mise en place d’un système décentralisé ou semi-centralisé permettant la valorisation des déchets par recyclage, compostage et méthanisation des déchets triés à la source. « La part des déchets recyclables et compostables atteint presque 80 % », estime Olivia Maamari, responsable du programme environnement d’Arcenciel. Les déchets divers (c’est-à-dire non compostables, méthanisables ou recyclables) pourraient être utilisés comme RDF (combustible dérivé des déchets) dans les cimenteries à condition de respecter certaines normes environnementales et sanitaires. Les déchets inertes (qui ne sont pas biodégradables, par exemple les pierres, parpaings, céramiques…), ainsi que du compost de moins bonne qualité (de grade C) pourraient servir à la réhabilitation des carrières. « Il existe 30 millions de mètres carrés de carrières et de zones détériorées au Liban », note Raja Noujaim, représentant de la coalition civile contre la politique du gouvernement pour le traitement des déchets. L’incinération ou l’enfouissement en décharge ne se feraient donc qu’en dernier recours, pour une quantité infime de déchets, dits déchets ultimes. La stratégie d’Arcenciel prévoit de collecter les déchets triés à la source sans les compacter pour les transporter vers des centres couvrant 40 000 à 100 000 habitants, où ils seraient triés une seconde fois, avant d’être compactés ou broyés selon le type de déchets. Ces déchets seraient ensuite transportés vers des usines de recyclage, de compostage ou de méthanisation. Dans ce système, c’est essentiellement la vente de matières premières issues de la valorisation qui permettrait de compenser en partie les excédents de coûts liés à la collecte sans compactage et les autres coûts opérationnels. Cela peut-il suffire ? Le consultant et chercheur Fadi Doumani, auteur d’une récente étude sur l’évaluation des coûts de la dégradation des déchets solides à Beyrouth et dans le Mont-Liban, estime que seule une stratégie “zéro déchets” menée à l’échelle nationale et organisant la filière du compostage et du recyclage au niveau du caza pourrait être bénéfique sur le long terme. « Une analyse coût/bénéfices indique qu’une telle stratégie pourrait représenter une valeur actuelle nette (“net present value”) de 135,7 millions de dollars sur vingt ans, ce qui est beaucoup. » Une campagne massive de sensibilisation au niveau national est cependant indispensable à la réalisation d’un tel scénario pour réduire la production de déchets et promouvoir le tri à la source. Or jusqu’ici, seul le ministère d’État pour la Réforme administrative, à travers l’Omsar, a mené des campagnes très ciblées de tri sélectif, notamment en 2010. Arcenciel propose aussi l’application d’un système de taxation des municipalités en fonction de la qualité du tri des déchets générés par chacune d’entre elles. « La qualité actuelle du compost et des matériaux recyclables n’est pas suffisante pour pouvoir rentabiliser une solution “zéro déchets”. Pour que cette option fonctionne, il sera aussi indispensable de trouver des marchés pour les produits semi-finis. Ce qui n’existe pas pour le moment », conclut Fadi Doumani. |