À la suite d’une interview jugée diffamante à l’égard de la famille royale saoudienne, l’opérateur de satellites a rompu son contrat avec la chaîne al-Mayadeen et demandé aux autorités libanaises d’interdire sa retransmission à partir du Liban.
L’opérateur de communications par satellite Arabsat a rompu son contrat avec la chaîne d’information panarabe basée au Liban, al-Mayadeen. Créé à l’initiative des pays de la Ligue arabe mais contrôlé par l’Arabie saoudite, Arabsat reproche à la concurrente d’al-Jazeera et d’al-Arabia d’avoir attaqué la famille royale saoudienne. « Ce n’est pas la chaîne qui a tenu les propos incriminés, mais un invité reçu dans les conditions du direct, ce qui n’engage pas la responsabilité d’al-Mayadeen », se défend son fondateur et directeur, Ghassan Ben Jeddo. « Nous ne considérons pas avoir manqué à nos obligations contractuelles. La rupture unilatérale du contrat, sans avertissement préalable, nous paraît totalement injustifiée. Nous nous réservons le droit d’attaquer en justice pour réclamer des dommages et intérêts », déclare-t-il au Commerce du Levant. Arabsat, pour sa part, n’a pas répondu à notre demande d’interview.
Alors qu’il en a techniquement les moyens, l’opérateur n’a pas immédiatement arrêté la diffusion d’al-Mayadeen sur ses satellites : il a d’abord demandé à l’État libanais d’agir. « Cela confirme sa volonté de politiser le dossier et d’embarrasser le Liban », estime Ghassan Ben Jeddo. « Arabsat veut nous renvoyer la responsabilité d’arrêter la diffusion d’al-Mayadeen », commente de son côté le ministre de l’Information, Ramzi Jreige.
Dans un courrier officiel envoyé le 5, puis un autre le 8 octobre au ministre des Télécoms, dont Le Commerce du Levant a obtenu une copie, Arabsat demande au Liban « de stopper immédiatement la diffusion d’al-Mayadeen à partir de la station de Jouret el-Ballout (…) faute de quoi nous arrêterons la diffusion du bouquet libanais et retransmettrons ses chaînes à partir de nos stations en dehors du Liban ».
Selon une source informée, la majorité des chaînes satellitaires au Liban n’utilise plus les services d’Arabsat, préférant notamment l’égyptien Nilesat, ce qui avait déjà poussé Arabsat à envisager la délocalisation de son émetteur en dehors du Liban. Mais au moins quatre chaînes y avaient toujours recours : al-Mayadeen, Future TV, al-Manar et Télé-Liban. Selon le PDG de cette dernière, Talal Makdessi, Arabsat a informé TL de sa décision de cesser la transmission à partir du Liban. « Dès décembre, nous émettrons à partir de la Jordanie, sans aucun coût supplémentaire pour la chaîne », explique-t-il.
Pour l’État libanais, en revanche, cette délocalisation représente un manque à gagner, que le ministère des Télécoms sollicité par Le Commerce du Levant n’a pas chiffré. Il est imputable d’une part aux droits de retransmission que les chaînes versent au ministère, et au loyer de la station de Jouret el-Ballout acquitté par Arabsat. Le montant en jeu ne semble toutefois pas assez important pour pousser le gouvernement à agir. Le ministre Boutros Harb s’est contenté de transférer le dossier au ministre de l’Information.
« J’ai chargé une commission de se pencher sur le contenu d’al-Mayadeen, notamment l’interview à l’origine de la polémique, affirme Ramzi Jreige. Al-Mayadeen n’étant pas une chaîne libanaise, elle n’a pas de licence de diffusion dans le cadre de la loi de l’audiovisuel de 1994, mais une licence de retransmission relevant de la loi 531 de 1996 sur la retransmission satellitaire. Or selon l’article 3 de ce texte, la chaîne n’a pas le droit de diffuser des programmes de nature à nuire à la sécurité du pays ou « aux relations entre le Liban et les pays amis ».
« S’il apparaît qu’al-Mayadeen a violé ses engagements à l’égard de l’État libanais, je peux proposer au Conseil des ministres des sanctions pouvant aller d’une suspension d’un mois à un retrait de la licence de retransmission. Mais il est aussi de mon devoir de veiller au respect de la liberté d’expression, un principe garanti par la Constitution », ajoute le ministre.
C’est d’ailleurs cet argument qui a poussé al-Mayadeen à installer son siège au Liban en 2012. Cette chaîne qui revendique une ligne éditoriale proche du Hezbollah y emploie aujourd’hui 45 journalistes.
« Au départ, nous avions envisagé l’Égypte où les coûts étaient deux fois moins élevés, mais le Liban s’est imposé en termes de liberté de la presse », raconte Ghassan Ben Jeddo, en se disant confiant dans la capacité de jugement du ministère de l’Information. « Nous nous conformerons aux décisions de l’État libanais quelles qu’elles soient, précise-t-il. L’avantage d’être une petite chaîne est de pouvoir déménager rapidement si nécessaire. »
Alors qu’il en a techniquement les moyens, l’opérateur n’a pas immédiatement arrêté la diffusion d’al-Mayadeen sur ses satellites : il a d’abord demandé à l’État libanais d’agir. « Cela confirme sa volonté de politiser le dossier et d’embarrasser le Liban », estime Ghassan Ben Jeddo. « Arabsat veut nous renvoyer la responsabilité d’arrêter la diffusion d’al-Mayadeen », commente de son côté le ministre de l’Information, Ramzi Jreige.
Dans un courrier officiel envoyé le 5, puis un autre le 8 octobre au ministre des Télécoms, dont Le Commerce du Levant a obtenu une copie, Arabsat demande au Liban « de stopper immédiatement la diffusion d’al-Mayadeen à partir de la station de Jouret el-Ballout (…) faute de quoi nous arrêterons la diffusion du bouquet libanais et retransmettrons ses chaînes à partir de nos stations en dehors du Liban ».
Selon une source informée, la majorité des chaînes satellitaires au Liban n’utilise plus les services d’Arabsat, préférant notamment l’égyptien Nilesat, ce qui avait déjà poussé Arabsat à envisager la délocalisation de son émetteur en dehors du Liban. Mais au moins quatre chaînes y avaient toujours recours : al-Mayadeen, Future TV, al-Manar et Télé-Liban. Selon le PDG de cette dernière, Talal Makdessi, Arabsat a informé TL de sa décision de cesser la transmission à partir du Liban. « Dès décembre, nous émettrons à partir de la Jordanie, sans aucun coût supplémentaire pour la chaîne », explique-t-il.
Pour l’État libanais, en revanche, cette délocalisation représente un manque à gagner, que le ministère des Télécoms sollicité par Le Commerce du Levant n’a pas chiffré. Il est imputable d’une part aux droits de retransmission que les chaînes versent au ministère, et au loyer de la station de Jouret el-Ballout acquitté par Arabsat. Le montant en jeu ne semble toutefois pas assez important pour pousser le gouvernement à agir. Le ministre Boutros Harb s’est contenté de transférer le dossier au ministre de l’Information.
« J’ai chargé une commission de se pencher sur le contenu d’al-Mayadeen, notamment l’interview à l’origine de la polémique, affirme Ramzi Jreige. Al-Mayadeen n’étant pas une chaîne libanaise, elle n’a pas de licence de diffusion dans le cadre de la loi de l’audiovisuel de 1994, mais une licence de retransmission relevant de la loi 531 de 1996 sur la retransmission satellitaire. Or selon l’article 3 de ce texte, la chaîne n’a pas le droit de diffuser des programmes de nature à nuire à la sécurité du pays ou « aux relations entre le Liban et les pays amis ».
« S’il apparaît qu’al-Mayadeen a violé ses engagements à l’égard de l’État libanais, je peux proposer au Conseil des ministres des sanctions pouvant aller d’une suspension d’un mois à un retrait de la licence de retransmission. Mais il est aussi de mon devoir de veiller au respect de la liberté d’expression, un principe garanti par la Constitution », ajoute le ministre.
C’est d’ailleurs cet argument qui a poussé al-Mayadeen à installer son siège au Liban en 2012. Cette chaîne qui revendique une ligne éditoriale proche du Hezbollah y emploie aujourd’hui 45 journalistes.
« Au départ, nous avions envisagé l’Égypte où les coûts étaient deux fois moins élevés, mais le Liban s’est imposé en termes de liberté de la presse », raconte Ghassan Ben Jeddo, en se disant confiant dans la capacité de jugement du ministère de l’Information. « Nous nous conformerons aux décisions de l’État libanais quelles qu’elles soient, précise-t-il. L’avantage d’être une petite chaîne est de pouvoir déménager rapidement si nécessaire. »