Le président Michel Aoun a relancé le projet de location de navires-centrales en distribuant au Conseil des ministres un rapport qui plaide en faveur de “l’achat” de courant en attendant la mise en œuvre des réformes structurelles nécessaires.
« Les auteurs se sont employés à écarter toute autre solution que celle de la location de navires-centrales, une solution controversée envisagée par le gouvernement en 2017 et restée lettre morte depuis plusieurs mois », a déploré une source anonyme proche du dossier citée par L’Orient-Le Jour. Si le terme de “navires-centrales” figure dans le rapport, ce dernier ne fait toutefois aucunement mention d’une opération de “location”, un “choix sémantique”, estime la source précitée.
Le rapport indique que le déficit cumulé du secteur de l’électricité entre 1992 et 2017 a atteint « 32 milliards de dollars » (subventions et intérêts calculés sur une base moyenne de 6,8 %). Le document affirme qu’EDL a une capacité de production de 1 800 MW, importe 115 MW de Syrie et loue deux navires-centrales qui produisent 385 MW de plus – le Orhan Bey et le Fatmagül Sultan – à l’opérateur turc Karadeniz depuis 2012, alors que la demande a grimpé « jusqu’à 3 450 mégawatts (MW) en août dernier ».
La présidence relève également que la production d’électricité coûte au pays 3,35 milliards de dollars par an, dont 39 % de transferts, 26 % de factures des usagers à EDL et 35 % payés aux propriétaires de générateurs. Elle rappelle aussi que le prix de l’électricité est indexé depuis les années 1990 sur un baril de pétrole à 24 dollars, alors que ce dernier se négocie actuellement à 65 dollars. Le kilowattheure est ainsi facturé à 9 cents aux abonnés pour un coût réel moyen de 16,5 cents au kilowattheure (kWh), selon le rapport.
Les trois dernières pages du document s’emploient enfin à justifier l’achat de 850 MW de courant comme solution temporaire pour un coût estimé à 700 millions de dollars par an. Le ministère de l’Énergie tablait de son côté sur un coût annuel de 850 millions de dollars.
Tous ces chiffres, « s’ils sont exacts, ne sont pas documentés dans le rapport communiqué à la presse », souligne à cet égard la source précitée, qui rappelle que le problème tient moins à la nature de la solution préconisée par la présidence qu’à la manière dont le gouvernement souhaite procéder pour louer ces barges. L’appel d’offres lancé en 2017 à la demande du Conseil des ministres avait en effet été jugé non conforme par la Direction des adjudications, qui avait dénoncé un cahier des charges sur mesure favorisant l’opérateur turc Karadeniz. Mais l’avis de la direction des adjudications n’étant pas contraignant, le gouvernement pourrait décider d’attribuer le contrat de gré à gré.