La légalisation de la signature électronique en octobre dernier, dans le cadre de la législation sur les transactions électroniques, devrait accélérer la numérisation des procédures et générer de nouvelles opportunités économiques. Entretien avec Vincent Fabié, fondateur d’Eclosing, spécialiste français de la dématérialisation.
Qu’entend-on par signature électronique ?
Le terme renvoie à trois réalités : d’abord, la signature électronique simple. Autodéclarée, on la retrouve ainsi au pied des e-mails. En droit, elle représente un commencement de preuve par écrit. Vient ensuite la signature avancée. Cette signature respecte les deux critères essentiels de légalité : l’imputabilité (la personne qui signe est dûment identifiée) et l’intégrité (le document n’est pas altéré après sa signature). Ce mode de signature représente la quasi-totalité des signatures électroniques entre acteurs privés au sein de l’Union européenne. Enfin, la signature qualifiée dont l’usage est imposé dans des cas limitativement énumérés par le législateur et dont l’utilisation implique l’achat et l’installation de certificats sur support physique (exemple : clés USB, carte à puce…). Contraignante, elle est limitée à des cas très précis. En France, elle est ainsi exigée pour répondre à des marchés publics, dans le cas de transmission de données médicales ou le dépôt d’écritures par les avocats… Au Liban, son périmètre n’a pas encore été définitivement arrêté, mais ne concernera vraisemblablement qu’un nombre limité de cas.
Quels sont les actes dématérialisables ?
L’ensemble des actes liés aux administrations ou au monde des affaires sont en théorie dématérialisables : contrats, accords de confidentialité, bulletins de souscription, factures, bons de livraison, de paie, attestations... La signature électronique apporte en outre une solution idéale quand il faut gérer différents signataires, qui plus est à distance. Cette signature est également idéale pour traiter des volumes importants. Par exemples : des bulletins de souscription à l’électricité, à des assurances en ligne, à de produits financiers.
Si l’e-signature peut être utilisée avec tous les types de fichiers (textes, tableurs Excel, images…), elle est plus communément employée avec le PDF. Ce format a l’avantage d’être “figé” et aisément lisible. Quelques limites cependant : lorsque l’accomplissement d’une formalité est exigé (par exemple : enregistrement fiscal ou au registre du commerce), il faut que l’autorité auprès de laquelle l’acte est enregistré (exemple : recette des impôts ou greffe) accepte les originaux électroniques.
Qu’est-ce que cela promet ?
Ses principaux avantages sont les économies réalisées sur les frais d’impression et d’affranchissement, l’optimisation de la transformation commerciale en ligne, le gain de temps, et même d’espace : les documents sont stockés dans des coffres forts virtuels.
Comment se matérialise-t-elle dans les contrats ?
Il s’agit d’un certificat inséré dans le document. Concrètement pour le signataire, ceci implique la réception d’un courrier électronique, une sur-authentification (au moyen d’un code SMS par exemple) et un simple clic sur un bouton “signer” au pied du (ou des) document(s) concerné(s). Les opérations d’obtention (ou d’apposition) de certificats de signature, de jetons d’horodatage et de dépôt dans un « coffre numérique » sont sur la plupart des plates-formes automatiquement prises en charge après avoir recueilli le consentement du signataire.
La signature électronique a-t-elle une valeur juridique ?
Au regard du code civil libanais, l’e-signature dispose désormais d’une valeur identique à une signature manuscrite, si la personne qui signe est dûment identifiée et si le document a été conservé dans des conditions permettant d’établir son absence d’altération.
Quel est le marché ?
Au niveau mondial, selon une étude de Markets and Markets, le marché de la signature électronique devrait atteindre 2,7 milliards de dollars en 2021. Au Liban, on ne connaît pas encore son potentiel.
Où sont archivés les documents ?
L’archivage aux fins de garantir l’intégrité des documents n’impose pas a priori de localisation. Cependant, des réglementations sectorielles peuvent exiger un archivage sur le territoire national. Ainsi, dans les pays qui ont une tradition bancaire forte comme le Liban, les autorités de régulation décident souvent que certains documents sensibles soient stockés sur le sol du pays. Ce qui signifie la création de datacenters nationaux. Les entreprises doivent donc apprécier ces choix d’archivage au cas par cas en fonction de leur secteur et du type d’actes à dématérialiser.