Citerne Beirut: le centre culturel s’installe de manière permanente

Citerne Beirut, un nouveau centre culturel dédié aux arts de la scène, a ouvert ses portes en avril en face du Forum de Beyrouth, à l’occasion de la 15e édition du Festival de danse contemporaine Bipod. Un pari risqué pour Maqamat, la petite compagnie de danse à l’origine du projet, qui mise sur l’adaptabilité de ce lieu original pour contrôler ses coûts opérationnels et diversifier ses revenus.

« Nous avons mûri ce projet pendant plusieurs années », explique Omar Rajeh, directeur artistique et fondateur de Maqamat en 2002, qui a imaginé Citerne Beirut avec Mia Habis, codirectrice artistique de la compagnie. « Ce lieu a vocation à porter la voix des artistes libanais et internationaux à Beyrouth et devenir un espace de création artistique unique en son genre dans la capitale », ajoute le chorégraphe. Au programme, des spectacles, notamment de danse contemporaine, mais aussi des cours de danse, de musique ou encore de théâtre pour la jeunesse.

La “citerne”, qui héberge cet espace, est une structure en métal semi-permanente de 1 000 m2, entièrement démontable et modulable. Elle comprend trois salles, pouvant accueillir de 100 à 2 000 spectateurs, ainsi que de plus petites espaces pour l’organisation d’ateliers et un café-bar. Au total, l’achat et l’aménagement de l’espace ont coûté plus d’un million de dollars, réglés par échelons par Maqamat, qui se finance grâce à ses tournées à l’international et reçoit des aides financières de l’ambassade de Norvège, de plusieurs instituts culturels ainsi que de donateurs privés. Plus de 150 000 dollars restent encore à rembourser. « Nos prestataires nous font confiance », affirme Omar Rajeh.

Un choix plus économique

Le choix du lieu est adapté au projet artistique de Maqamat mais aussi stratégique d’un point de vue économique. « En louant un théâtre, nous aurions dû dépenser bien plus en frais de rénovation, avec le risque de perdre cet investissement au bout de quelques années en quittant la salle, estime Omar Rajeh. À l’inverse, nous sommes propriétaires de “citerne”, que nous pouvons démonter et remonter à notre guise pour un coût négligeable. » Ce vaste hangar aménagé avait d’ailleurs déjà accueilli une première fois l’édition 2017 de Bipod, avant d’être désassemblé.

Mais cette année, Maqamat a obtenu du Forum de Beyrouth, le propriétaire du terrain, d’en faire un espace d’accueil permanent. Le nouveau contrat de location, dont la compagnie ne veut pas préciser la durée, représente environ 25 % des frais opérationnels du projet Citerne Beirut.

Le principal poste de dépense du centre culturel sera cependant sa programmation artistique. « Les frais varient selon les troupes, mais sont en général élevés », explique Omar Rajeh. Ils comprennent la rémunération des artistes pour leur performance, les installations techniques et les frais de déplacement, lorsqu’il s’agit de compagnies étrangères.

Un festival en déficit

Avec Bipod, Maqamat ne rentre, par exemple, pas dans ses frais. En 2018, à peine plus d’un tiers du budget du festival avait été couvert par la billetterie. « Le déficit devrait être moins important cette année, car nos ventes de billets ont augmenté de 35 % », note toutefois Omar Rajeh. « À première vue, notre projet de centre culturel peut sembler un peu fou », reconnaît cependant le fondateur de Maqamat.

Pour cette petite structure de cinq employés, l’enjeu était donc de joindre à son projet de centre culturel de nouvelles sources de revenus. Avec Citerne Beirut, Maqamat espère attirer aussi des organisateurs d’événements privés. « La configuration mobile du lieu et sa taille en font un espace intéressant, estime Omar Rajeh. Environ cinq ou six événements par mois, selon leur facturation, nous permettraient d’atteindre l’équilibre sur ce projet. » Cette diversification vise par ailleurs à donner davantage de champ libre à la direction artistique de Citerne Beirut. « Le processus de création artistique ne doit pas être dépendant de la demande du public ni des sponsors. »