La marque Conserves Modernes Chtaura fait partie du paysage libanais depuis les années 1960. Fondée en 1936 en Syrie par Abdel Razzak Adham, l’entreprise a délocalisé ses activités au Liban en 1961, après avoir été rachetée par la famille Idriss.
« Au départ, nous ne faisions que des confitures et des cornichons », raconte Rabah Idriss, le PDG de la société, chapeautée par la holding Widriss, qui opère dans l’agroalimentaire, la distribution, l’entreposage, le foncier et l’immobilier. « C’est lorsque nous sommes arrivés au Liban que nous nous sommes lancés sur le créneau des aliments en conserve, notamment le houmous et le foul. À l’époque, nous étions les seuls avec Cortas à en produire », poursuit-il.
Si l’entreprise a étoffé son offre depuis, et propose désormais près de 70 produits différents – conserves, mets préparés, sirops, sauces, tahini, etc. –, le houmous reste encore aujourd’hui son produit phare. L’usine, située à Chtaura, en sort 4 800 000 boîtes tous les ans, dont 80 % sont destinées à l’export, comme pour le reste de sa production. Son plus grand marché est l’Arabie saoudite, mais « nos produits sont présents dans 36 pays, dans le monde arabe et en Europe, ainsi qu’au Canada, au Venezuela, en Australie, en Nouvelle-Zélande… » se félicite Rabah Idriss. Cette stratégie tournée vers l’export a impliqué toutefois des efforts importants en matière de respect des normes et standards internationaux, et des adaptations au niveau de l’emballage. « Chaque pays a des spécificités différentes en termes d’appellations, d’informations nutritionnelles requises et même de typographie », explique-t-il.
Le PDG n’a pas accepté de dévoiler le chiffre d’affaires de l’entreprise, se contentant d’évoquer une croissance annuelle de son chiffre d’affaires supérieure à 10 % ces cinq dernières années. Un succès qu’il explique par l’engouement croissant pour la cuisine méditerranéenne, et libanaise en particulier. L’attrait pour le régime méditerranéen s’inscrit en effet dans une tendance mondiale du manger “sain”. La marque planche d’ailleurs sur une gamme de produits bio, précise Rabah Idriss.
Pour l’industriel, qui déplore comme tous ses confrères le manque de soutien de l’État et de facilités octroyées aux secteurs productifs, c’est la qualité et l’expertise acquise depuis des décennies qui permettent à Conserves Modernes Chtaura de se distinguer à l’étranger. « Nous aimerions que les coûts de production et de transport soient moins élevés. Chaque conteneur qui part de Chtaura vers la capitale nous coûte 500 dollars, alors que ce même conteneur acheminé du port de Beyrouth vers l’Italie nous revient au même prix. Ce n’est pas normal », dit-il. S’ajoute à cela la hausse des coûts du transport terrestre depuis le déclenchement de la guerre en Syrie de l’ordre de 50 %. Mais pour l’industriel, le principal frein reste la situation politico-économique du Liban, et les incertitudes qui l’empêchent de faire des plans sur le moyen ou long terme. Chaque décision d’investir dans de nouvelles machines, ou de faire de nouveaux projets est compliquée par « l’incapacité de savoir ce que le pays nous réserve », résume-t-il.