3 questions à…
Olivier Ray, directeur régional de l’Agence française de développement (AFD) au Moyen-Orient
Quel est le bilan des investissements de l’AFD au Liban en 2019 ?
Environ 65 millions d’euros (72 millions de dollars) ont été engagés, dont 40 millions d’euros de subventions et le reste sous forme de prêts au secteur public. Notre filiale Proparco, en charge de l’aide au secteur privé, a, quant à elle, investi près de 33 millions d’euros (36 millions de dollars). En dehors des engagements déjà pris, aucun nouveau prêt au secteur public n’a été accordé, en raison de la situation macroéconomique du pays et faute des réformes structurelles attendues dans le cadre de la CEDRE. À titre de comparaison, quelque 132 millions d’euros avaient été investis en 2018, dont une majorité de prêts au secteur public. L’activité de crédit pourrait reprendre en 2020, si des mesures en faveur d’un redressement des finances publiques sont adoptées.
L’attribution de prêts à un pays déjà très endetté n’est-elle pas problématique ?
C’est un débat stérile. Tout dépend de la rentabilité des projets et des variables qui les accompagnent. Les bailleurs de fonds apportent leur expertise et les prêts accordés par l’AFD sont “concessionnels”, soit avec des taux d’intérêt préférentiels. Le coût d’opportunité est donc faible pour l’État libanais. L’AFD a, par exemple, financé plusieurs stations d’épuration des eaux usées. Deux d’entre elles, à Batroun et Chekka, ont été inaugurées en 2018. Ces projets sont absolument essentiels.
L’AFD va-t-elle réduire les investissements liés à la crise humanitaire syrienne pour répondre à la crise économique libanaise ?
Notre stratégie de développement pour le Moyen-Orient s’étend sur dix ans. Nous ne faisons pas de pilotage au jour le jour. Nous pouvons cependant adapter les modalités de mise en œuvre de nos objectifs à la conjoncture. En lien avec la crise au Liban, nous envisageons un renforcement de notre soutien pour l’accès aux soins de santé de base. Nous souhaitons également prévenir un basculement massif des élèves du privé vers l’enseignement public. La crise des réfugiés est cependant loin d’être terminée. Nous allons donc déployer des moyens pour répondre aux deux, avec des critères de vulnérabilité. Dans le cadre de notre programme Shabake, nous avons, par exemple, débloqué fin janvier 8 millions d’euros pour sept organisations libanaises actives tant auprès des déplacés que de la population locale.