Trois questions à Banchi Yimer, fondatrice de l’association Egna Legna Besidet, qui vient en aide aux employées de maison.
Que pouvez-vous nous dire de la situation des employées de maison au Liban ?
Impossible de connaître le nombre d’employées qui ont été jetées à la rue par leur ancien employeur, sans les salaires dus, ni éventuellement leur passeport. Sans compter celles qui travaillaient en free-lance et se retrouvent aussi démunies. Notre association, qui se concentre normalement sur les ressortissantes éthiopiennes, en a identifiées 150 sans hébergements fixes. Certaines dorment actuellement devant l’ambassade d’Éthiopie. Mais d’autres employées de maison de nationalités différentes vivent une situation de détresse identique.
Pourquoi ne rentrent-elles pas en Éthiopie ?
Avec la crise économique et le coronavirus, ces femmes ont non seulement perdu leur emploi, souvent vital pour leur famille, mais aussi leurs économies. Elles ont le sentiment d’avoir gâché leur vie. Pour certaines, la détresse est telle qu’elles sombrent dans la dépression. Car rentrer n’a rien d’évident ne serait-ce que financièrement.
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Le voyage leur coûte presque 1 500 dollars : 680 dollars pour le billet d’avion et 770 dollars pour la quarantaine en hôtel que les autorités d’Addis-Abéba leur imposent à leur descente d’avion. Légalement, c’est l’employeur libanais qui prend en charge le billet d’avion. Mais ils sont de plus en plus nombreux à fuir cette obligation. À cela, s’ajoute le séjour en quarantaine à la charge de ces femmes. Si certains patrons libanais acceptent de le payer, beaucoup refusent. Or, pour des travailleuses qui gagnaient un salaire d’environ 150 dollars mensuels, c’est juste impossible.
Les autorités agissent-elles pour leur venir en aide ?
Les autorités éthiopiennes doivent se saisir du problème en urgence mais, pour l’heure, l’ambassade éthiopienne au Liban est aux abonnés absents. Si notre association milite pour la fin du système du Kafala, véritable esclavage moderne, nous espérons dans l’immédiat que le Liban sanctionnera les employeurs qui jettent à la rue leur employées de maison.
De notre côté, nous avons lancé un appel aux dons et nous avons récolté 50 000 dollars de promesse d’aides qui nous permettront de soutenir les plus démunies. En juin, nous avons pu héberger 28 Éthiopiennes en hôtel grâce à des Libanais qui ont contribué à financer leur séjour.