Fusion, partenariats et accords de coopération : l’heure est aux mariages de raison entre les chaînes télévisées qui, pour renforcer leur assise, devront faire feu de tout bois.
Avec les remous que provoquent les nouvelles alliances, c’est sur un nouveau paysage audiovisuel que s’ouvre le rideau de la nouvelle année. Contrairement à l’émergence les 10 dernières années de nouvelles chaînes ambitieuses, il semble qu’il y ait à nouveau une tendance à la centralisation.
Plus de place pour les petits ?
En effet, Télé-Liban est toujours en convalescence, la gestion confiée – en principe – à Saleh Kamel mettra du temps à porter ses fruits, alors que UTV et ICN demeurent inactives. Selon les différents acteurs, il n’est plus facile de nos jours de monter une nouvelle chaîne surtout avec l’accès anarchique aux chaînes câblées.
Lancer une nouvelle chaîne locale devrait nécessiter un minimum de 12 millions $/an de charges. Or, c’est à peine si elle peut générer actuellement 2 millions $ en budgets publicitaires sur le marché local, du moins les deux premières années. Au bout de 5 ans d’activité, elle fera probablement face à un déficit de 30 millions $. Par ailleurs, les possibilités de diffuser sur satellite se limitent pour le moment à la plate-forme digitale qui ne donne accès qu’à 20 % de l’audience des pays arabes, étant donné que la plate-forme analogue est surchargée.
C’est ce qui explique le manque d’enthousiasme de la part des investisseurs à lancer leurs nouvelles opérations. Seul New TV fait preuve de courage et d’optimisme.
Selon les propos de son vice-président Khalil Abou Chawareb, la nouvelle chaîne s’est assignée la mission «d’élever le niveau de la production locale». Des émissions familiales et proches du public comme le feuilleton Noura et les soirées de Zajal devront conquérir les nostalgiques de Télé-Liban des années 70. Avec une différence majeure, celle des gros moyens mis au service de la production. La chaîne signera bientôt un contrat d’exclusivité avec une régie arabe pour la gestion de son budget publicitaire.
D’autres ne sont pas aussi entreprenants. Inactive depuis août 97 et ayant à nouveau obtenu une licence fin 99, ICN n’a toujours pas donné signe de vie. Selon une source interne, ses actionnaires seraient réticents à activer les investissements nécessaires pour le lancement de l’activité et seraient en train d’étudier une récente proposition d’achat. Entre-temps, Henry Sfeir est toujours à la tête de la société et pourrait cohabiter avec les nouveaux acheteurs une fois l’affaire conclue. L’identité de ces derniers demeure jusqu’à l’heure non confirmée. Des sources indépendantes avaient avancé le nom d’Issam Farès comme candidat à la reprise de la chaîne. Et une somme – 5 millions $ – demandée par Henry Sfeir. Ce dernier aurait-il donc crié à la répression politique pendant des années pour récupérer sa chaîne… afin de mieux la vendre ? Les sources d’ICN nient ce scénario et indiquent qu’en 1997 la chaîne aurait pu être viable.
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De son côté, United Télévision (UTV), ayant obtenu sa licence au même moment qu’ICN, s’est limitée, depuis, à diffuser essentiellement des vidéo-clips et quelques programmes réchauffés, en se considérant déjà opérationnelle.
Il semble en effet que les partenaires de cette chaîne, au nombre de 35, butent sur des divergences internes et un manque de ressources financières, alors qu’ils s’étaient engagés sur un capital de 30 milliards LL lors de la création de la société.
Les ménages à deux
Dans la cour des grands, la situation est différente. Les récentes initiatives d’alliances suscitent des commentaires de toutes parts :
«Les accords entre la MTV et le groupe Choueiri sont de prime abord très porteurs pour le secteur, à condition qu’ils soient bien appliqués», déclare Khalil Abou Chawareb (New TV).
Remarque étonnante, à première vue, de la part d’un concurrent, et de surcroît en période de démarrage. Mais New TV espère, en fait, une correction généralisée à la hausse des tarifs de la pub télévisée, à l’occasion de cette alliance.
Pour Ali Jaber (Future) : «Ces accords ne sont qu’une réplique à la création du holding avec MBC et un renforcement du monopole du groupe Choueiri sur le secteur. Les deux chaînes (LBC et MTV) ciblent une même audience et ne pourront tirer aucun avantage compétitif de cette coopération, à part la mainmise sur un pourcentage important des recettes publicitaires d’un marché qui ne fait que rétrécir».
«Il faut à tout prix définir le temps maximum des publicités, et déterminer des critères chiffrés pour les prix des spots», revendique Abou Chawareb, qui voit dans la réglementation de la publicité une priorité absolue. Une autre urgence qui permettrait d’économiser des ressources serait, selon lui, «l’unification des stations d’émission».
Concernant MBC-Future, d’aucuns y trouvent justement une opportunité à saisir pour adapter la loi à de nouvelles exigences. Il ne faut pas oublier que la LBC et la Future-satellite génèrent des exportations libanaises significatives dans le monde arabe.
Réforme imminente
Ainsi, on apprend qu’une proposition de réforme, avancée par le député Nasser Kandil, est en cours de discussion en ce début d’année. L’identité du député (proche de Berry et de la Syrie et colistier de Rafic Hariri à Beyrouth) est au moins aussi significative que le contenu de la réforme.
Pour répondre à un besoin de réforme, un syndicat des médias s’est créé à l’initiative de Gaby Murr (MTV) et Ziad Choueiri (ICN) et aurait déjà envoyé ses recommandations et commentaires sur le projet de réforme au Conseil national de l’audiovisuel. Le projet porte principalement sur la définition des parts maximales permises aux capitaux étrangers dans les médias libanais. Une opportunité en or pour régler les sujets épineux.
Selon un responsable d’ICN, si la réforme passe au premier trimestre 2002, les chaînes inactives devront très rapidement décider si elles sont prêtes à l’aventure. Elles n’auront alors qu’un délai limité pour redémarrer.
Le Premier ministre ne serait pas contre un tel amendement, qui va dans le sens des regroupements mondiaux dans ce domaine. Il semble qu’on oscille, selon les dernières nouvelles, entre 33 et 49 % de participation étrangère.
Une manière comme une autre d’attirer des capitaux, dans un secteur-fleuron de l’économie libanaise.
Clés 2001 Nouveautés : • Zen, chaîne de la Future TV sur satellite arabe destinée aux jeunes. • New TV émet de nouveau au Liban et sur satellite. Disparitions : • Nida’a el-Watan (quotidien politique). • Al-Hiwar (hebdomadaire politique). Fusions-partenariats : • Holding DDB Communication Group avec DDB Liban et Stratégies Liban. • Holding Future TV et MBC. • Affiliation de l’agence de publicité Rizk Advertising à TBWA. • Fusion d’al-Hayat et d’al-Wassat. • Grey Worldwide (Beyrouth) a fusionné avec Gam d’Arcy. • Le groupe Choueiri va prendre en charge la régie publicitaire de la MTV. Divers : • Télé-Liban interrompt – puis reprend ses activités en attendant un opérateur privé. • Accord entre RFI et le ministère de l’Information pour moderniser la radio par l’installation d’un nouvel émetteur FM. |