On l’a dit la meilleure cuisine au monde. Peut-être, mais les Français ont tardé à l’exporter, y compris
auprès de ces Libanais connaisseurs et si souvent au bord de la Seine
Il est incontestable que les enseignes américaines de la restauration rapide occupent une place dominante dans le paysage urbain. Au Liban et ailleurs dans le monde. Mais la gastronomie française s’exporte aussi – dans un phénomène relativement nouveau – à travers quelques établissements qui proposent des produits traditionnels et raffinés. Le public libanais y a pris goût.
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Petite Marée
Grande cuisine
La Petite Marée fait déjà partie des meilleures adresses de Beyrouth. Implanté depuis mars 2000 rue Sursock, à Achrafieh, cet établissement a été fondé, suite à l’initiative du groupe libanais Idarat, par Éric Trompier, propriétaire du célèbre restaurant parisien La Marée, situé au faubourg Saint-Honoré ; un établissement fréquenté par l’élite de la capitale et qui a une étoile dans le guide Michelin après en avoir eu deux dans le passé. Depuis 2002, Éric Trompier, qui a acquis dans la foulée le bar-restaurant attenant Le Rétro, s’est progressivement détaché du groupe Idarat.
Enseigne gastronomique haut de gamme de 75 places assises, La Petite Marée revendique une cuisine sur base des meilleurs produits de la mer selon le savoir-faire et une expérience reconnue dans la restauration parisienne. Les poissons d’Atlantique sont spécialement importés par avion deux fois par semaine. Ce système de livraison implique bien sûr des coûts élevés. Mais l’établissement cuisine aussi du poisson local. «La Petite Marée recherche les meilleurs produits, nobles et de qualité», explique Sylvain Arthus, le chef exécutif du restaurant qui, à 28 ans, possède déjà une remarquable expérience. Il a travaillé sous la direction de l’un des plus grands chefs français Alain Ducasse, puis au Ritz de la Place Vendôme et durant un an à l’Élysée au service du président Jacques Chirac.
Pour Arthus, la cuisine française bénéficie toujours d’une excellente notoriété, se mesurant à travers la médiatisation des plus grands chefs français qui s’exportent très bien de New York à Tokyo.
À La Petite Marée, les prix pour deux personnes atteignent en moyenne 70 à 80 $. La clientèle, connaisseuse, est principalement constituée d’ambassadeurs, de personnel diplomatique et de personnalités locales. «Cette clientèle sait ce qu’elle veut en venant ici. Elle recherche un certain standing et une cuisine française de qualité. Nous n’avons pas le droit de la décevoir», insiste Arthus qui estime que La Petite Marée mériterait, sans hésiter, une étoile au Michelin.
Paul
Coqueluche de ces dames
Depuis la fin des années 1990, l’enseigne Paul a connu un développement considérable en France. Créée dès 1889 par la famille Mayot dans une petite ville à côté de Lille au nord de la France, Paul compte en 2002 plus de 250 points de vente dans l’Hexagone et plus de 25 branches à l’étranger. Le groupe Idarat, qui a obtenu les droits de franchise, a inauguré en février 2002 le premier Paul au Liban, à la limite du périmètre est de Solidere à l’angle des rues Georges Haddad et Gouraud. L’établissement a une capacité de 120 places assises. «Cet emplacement offre une excellente opportunité d’avoir une terrasse-jardin. Celle-ci crée une ambiance particulière à ce café-salon de thé-restaurant», explique Raïf Letayf, gérant de l’établissement.
Paul propose des viennoiseries, des pâtisseries, des sandwiches et des pains de campagne fabriqués à partir d’une farine spécifique importée de France. Des repas sont aussi préparés selon une cuisine traditionnelle basée sur des “recettes de grands-mères”. D’ailleurs, le décor a été étudié dans cette logique et privilégie les boiseries qui donnent un cachet rustique. Le tout pour se démarquer d’autres établissements de boulangerie rapide «qui fonctionnent à partir de pains précuits». La baguette Paul est fabriquée dans un fournil à la vue de la clientèle qui a la possibilité de suivre les différentes étapes de fabrication. Cette spécificité implique un prix légèrement supérieur à ses concurrents. Le chef boulanger a suivi un stage de 3 mois en France et il suit à la lettre les recettes des produits Paul. De plus, un représentant de Paul-France passe régulièrement pour s’assurer que le concept est bien respecté.
Si Letayf semble satisfait des premières semaines de démarrage, il est conscient que les produits Paul sont en train de se faire connaître et appréciés à partir d’un bon bouche-à-oreille, notamment auprès de la clientèle féminine qui envahit les lieux à toute heure de la journée.
«Nous commençons également à fournir plusieurs restaurants et hôtels de Beyrouth», souligne Letayf. À l’avenir, l’enseigne envisage de s’implanter au centre-ville dans un espace limité à une dizaine de places. Il s’agira d’un point de vente pour la restauration rapide : viennoiseries et sandwiches. Plusieurs points de vente à Beyrouth sont également prévus.
La Pause Gourmande
Franchise franco-saoudienne
Créée à la fin des années 1990, l’enseigne La Pause Gourmande est toute récente et ne compte que 3 établissements dans le monde (Rabat au Maroc, Marbella en Espagne et rue Hamra à Beyrouth depuis le 12 janvier 2002). Avant d’être un café-restaurant, elle est surtout un concept mis en place par la compagnie Hajer France dont le siège social est implanté en Haute-Savoie à Évian-Les-Bains au bord du lac Léman. Hajer France, la master-franchise de La Pause Gourmande (dite LPG) appartient à 67 % à l’homme d’affaires saoudien cheikh Hamad Rashudi. Les autres actionnaires sont des techniciens français dont un décorateur et un architecte. Ce consortium a créé une chaîne et un modèle de café-restaurant “à la française” pour l’étranger. «Le concept LPG se base sur plusieurs éléments : une décoration intérieure raffinée, une façade extérieure identifiable avec une couleur jaune orange, un logo, une ligne de vaisselles en céramique spécialement créées pour LPG avec un design particulier. Tout a été pensé pour évoquer la France ; même les sandwiches portent le nom de villes françaises», souligne Fadi Salameh, directeur général de La Pause Gourmande au Liban.
Alors que l’enseigne officielle est “La Pause Gourmande Paris”, paradoxalement, il n’existe encore aucun restaurant LPG en France. Cependant, des projets sont en cours pour implanter l’enseigne à Paris. Ainsi, LPG est, avant tout, un concept marketing avant d’être une marque gastronomique. Cette particularité n’empêche pas LPG de proposer des produits de qualité avec une grande gamme de sandwiches, de salades, de crêpes et de gaufres. «Toute la cuisine, le menu, les recettes suivent et respectent les normes établies par le siège social LPG à Évian. Un cuisinier formateur français est venu entraîner notre chef libanais», explique Salameh.
En août 2002, LPG va inaugurer une nouvelle enseigne à Achrafieh en contrebas de la place Sassine à proximité de l’université AUST. D’autres projets sont à l’étude. La rue Verdun et le centre-ville seront des adresses possibles. De plus, La Pause Gourmande veut poursuivre son extension en s’implantant au Moyen-Orient comme par exemple en Arabie saoudite, en Jordanie et en Égypte. «Être une enseigne française nous donne une parfaite crédibilité. Il est incontestable que les Arabes apprécient ce type de cuisine», conclut Salameh.
Ainsi, les enseignes françaises ont réussi à se faire une petite place sur le marché très dynamique de la restauration au Liban. Toutefois, leur nombre reste encore limité. De nombreux établissements (restaurants et sandwicheries) comme Au Bureau, La Brioche Dorée, Pomme de Pain, Courte Paille, Campagnile, Buffalo Grill et Flunch, qui connaissent un énorme succès en France, ne sont pas encore annoncés à Beyrouth. Avis aux amateurs.