Il aura fallu douze ans pour que le projet de loi de libéralisation des loyers anciens soit publié au Journal officiel le 8 mai 2014.
Présenté dès 2002 au Parlement, étudié, modifié en commission puis renvoyé à nouveau devant l’Assemblée à partir de 2012, le projet de libéralisation des loyers a subi nombre d’atermoiements, de tractations et de révisions. Jusqu’à ce que, à la surprise générale, le Parlement finisse par le voter, le 1er avril dernier, à la quasi unanimité des voix. Deux députés seulement ont voté contre : Walid Sukkarieh et Nawaf Moussaoui, tous deux membres du Hezbollah.
Pourtant, dix parlementaires - le nombre minimum requis par l’article 19 de la constitution libanaise - ont décidé de déposer un recours en invalidation du texte devant le Conseil constitutionnel.
Outre les deux députés du Hezbollah, huit députés ont choisi de se dédire de leur vote initial. Parmi eux, trois députés du parti Kataëb : Nadim Gemayel, Fadi el-Habre et Elie Marouni. S’y ajoutent différents représentants de l’échiquier politique : le président du Parti national libéral, Dory Chamoun, un député du Courant patriotique libre, Ziad Assouad ainsi que Hagop Pakradounian du Tachnag, Qassem Hachem d’Amal et Marwan Fares du Parti national socialiste syrien.
« Le 1er avril, le parti Kataëb a en effet voté la loi. Mais je restais perplexe quant à son application. Je suis persuadé qu’il faut sortir des loyers anciens. Je pense toutefois qu’il faut mettre en place une sortie plus progressive pour les locataires les plus fragiles. D’où ce recours constitutionnel », explique Nadim Gemayel, signataire du recours parlementaire.
Parmi les motivations du recours parlementaire, on retiendra que, pour les députés signataires, le droit des anciens locataires est un « droit acquis », pérennisé par les votes successifs des lois exceptionnelles, qui constitue un « état de fait constitutionnel » impossible désormais à remettre en cause. « C’est désormais un droit inaliénable », lit-on dans les motivations du recours. Pour ses rédacteurs, le droit à l’indemnité du locataire fait de surcroît partie de « l’ordre public économique et social » (page 42).
Quant au droit de propriété, un droit fondamental inscrit dans la constitution (article 15), les députés considèrent dans leur recours que le législateur peut le limiter quand il s’agit d’un intérêt supérieur et qu’« à situation exceptionnelle il faut une légalité exceptionnelle » (page 8) sans expliquer cependant comment une « situation exceptionnelle » peut durer si longtemps (depuis les années 1940 pour certains logements).
Certains arguments ne sont pas uniquement juridiques : le recours affirme sans en apporter la preuve que la loi de libéralisation des anciens loyers va mettre à la rue les « locataires libanais » au profit de « réfugiés étrangers » et créer ainsi une nouvelle « distribution » communautaire dans les quartiers (page 5). Mais le plus intéressant de ce long document reste le constat, en forme de réquisitoire inconscient, contre l’incurie du Parlement dont ils sont pourtant membres et du gouvernement auxquels certains ont pris ou prennent toujours part.
Ils dénoncent ainsi l’absence de véritable plan pour le logement social de la part de l’Etat, rappellent le vide juridique depuis l’arrivée à son terme de la dernière loi exceptionnelle (mars 2012) et s’érigent contre l’anticonsitutionnalité de la rétroactivité des lois, un principe pourtant que la justice libanaise se trouve souvent dans l’obligation d’appliquer faute de lois votées à temps par le Parlement. Enfin, ils n’hésitent pas à mettre en doute la légalité du vote du Parlement, dont les circonstances de la prorogation, décidée par les députés eux-mêmes, en mai 2013, leur semble soudain suspectes…
Ces 50 pages doivent être examinées par le Conseil constitutionnel qui doit an outre se prononcer sur un premier recours, transmis par le président Michel Sleiman le 20 mai dernier.
Aucune information n’a, pour l’heure, filtré du Conseil constitutionnel : les Sages ont un mois pour se prononcer à compter de la nomination du rapporteur, intervenue le 22 mai 2014.
Présenté dès 2002 au Parlement, étudié, modifié en commission puis renvoyé à nouveau devant l’Assemblée à partir de 2012, le projet de libéralisation des loyers a subi nombre d’atermoiements, de tractations et de révisions. Jusqu’à ce que, à la surprise générale, le Parlement finisse par le voter, le 1er avril dernier, à la quasi unanimité des voix. Deux députés seulement ont voté contre : Walid Sukkarieh et Nawaf Moussaoui, tous deux membres du Hezbollah.
Pourtant, dix parlementaires - le nombre minimum requis par l’article 19 de la constitution libanaise - ont décidé de déposer un recours en invalidation du texte devant le Conseil constitutionnel.
Outre les deux députés du Hezbollah, huit députés ont choisi de se dédire de leur vote initial. Parmi eux, trois députés du parti Kataëb : Nadim Gemayel, Fadi el-Habre et Elie Marouni. S’y ajoutent différents représentants de l’échiquier politique : le président du Parti national libéral, Dory Chamoun, un député du Courant patriotique libre, Ziad Assouad ainsi que Hagop Pakradounian du Tachnag, Qassem Hachem d’Amal et Marwan Fares du Parti national socialiste syrien.
« Le 1er avril, le parti Kataëb a en effet voté la loi. Mais je restais perplexe quant à son application. Je suis persuadé qu’il faut sortir des loyers anciens. Je pense toutefois qu’il faut mettre en place une sortie plus progressive pour les locataires les plus fragiles. D’où ce recours constitutionnel », explique Nadim Gemayel, signataire du recours parlementaire.
Parmi les motivations du recours parlementaire, on retiendra que, pour les députés signataires, le droit des anciens locataires est un « droit acquis », pérennisé par les votes successifs des lois exceptionnelles, qui constitue un « état de fait constitutionnel » impossible désormais à remettre en cause. « C’est désormais un droit inaliénable », lit-on dans les motivations du recours. Pour ses rédacteurs, le droit à l’indemnité du locataire fait de surcroît partie de « l’ordre public économique et social » (page 42).
Quant au droit de propriété, un droit fondamental inscrit dans la constitution (article 15), les députés considèrent dans leur recours que le législateur peut le limiter quand il s’agit d’un intérêt supérieur et qu’« à situation exceptionnelle il faut une légalité exceptionnelle » (page 8) sans expliquer cependant comment une « situation exceptionnelle » peut durer si longtemps (depuis les années 1940 pour certains logements).
Certains arguments ne sont pas uniquement juridiques : le recours affirme sans en apporter la preuve que la loi de libéralisation des anciens loyers va mettre à la rue les « locataires libanais » au profit de « réfugiés étrangers » et créer ainsi une nouvelle « distribution » communautaire dans les quartiers (page 5). Mais le plus intéressant de ce long document reste le constat, en forme de réquisitoire inconscient, contre l’incurie du Parlement dont ils sont pourtant membres et du gouvernement auxquels certains ont pris ou prennent toujours part.
Ils dénoncent ainsi l’absence de véritable plan pour le logement social de la part de l’Etat, rappellent le vide juridique depuis l’arrivée à son terme de la dernière loi exceptionnelle (mars 2012) et s’érigent contre l’anticonsitutionnalité de la rétroactivité des lois, un principe pourtant que la justice libanaise se trouve souvent dans l’obligation d’appliquer faute de lois votées à temps par le Parlement. Enfin, ils n’hésitent pas à mettre en doute la légalité du vote du Parlement, dont les circonstances de la prorogation, décidée par les députés eux-mêmes, en mai 2013, leur semble soudain suspectes…
Ces 50 pages doivent être examinées par le Conseil constitutionnel qui doit an outre se prononcer sur un premier recours, transmis par le président Michel Sleiman le 20 mai dernier.
Aucune information n’a, pour l’heure, filtré du Conseil constitutionnel : les Sages ont un mois pour se prononcer à compter de la nomination du rapporteur, intervenue le 22 mai 2014.