La flambée de violence du 7 au 13 mai n’a occasionné qu’un ralentissement passager de la dynamique du marché immobilier. Explication de Raja Makarem, PDG de Ramco Real Estate Advisers, et de Christian Baz, PDG de Baz Real Estate.

Le marché a-t-il été affecté par les événements depuis le 7 mai ?
Raja Makarem : Naturellement, certains acheteurs et investisseurs ont préféré attendre pour savoir quel est l’avenir politique et sécuritaire du Liban. En revanche, il existe également des personnes qui aiment prendre des risques calculés. Cela rappelle la période d’après l’assassinat de Rafic Hariri en 2005, quand un groupe d’investisseurs libanais avait acheté pour plusieurs dizaines de millions de dollars une large parcelle au centre-ville. Nous nous sommes trouvés dans la même configuration, le marché ne s’est pas arrêté que ce soit dans la partie ouest ou est de Beyrouth. Par exemple, des investisseurs ont fait une offre de 11 millions de dollars pour une parcelle de plus de 1 400 m2 à Ras Beyrouth. L’appétit des acheteurs n’a jamais cessé.
Christian Baz : La demande habituelle pour les appartements s’est brusquement arrêtée pendant plusieurs jours comme le montre la fréquentation de mon site Internet. De 4 000 visites quotidiennes, le chiffre a été divisé par quatre du 9 au 11 mai.

Quel type de demandes avez-vous reçues depuis le 7 mai ?
R. M. : Nous avons reçu des demandes pour des parcelles tant à Ras Beyrouth qu’à Achrafié. Nous avons également eu le lendemain de la prise par l’opposition de Beyrouth-Ouest une offre très sérieuse de la part d’un grand commerçant local pour l’achat d’une boutique rue Hamra.
C. B. : Certaines personnes ont accéléré leur recherche pour des locations à Faraya et Faqra. Alors que la saison commence à partir du 25 mai, un client résidant à Ras Beyrouth a choisi de vivre désormais à Faqra Club.

Les “événements” ont-ils stoppé des affaires qui étaient sur le point d’être finalisées ?
R. M. : Nos demandes antérieures se sont maintenues. Il s’agit autant de petites parcelles de 200 m2 que de vastes projets de plus de 100 millions de dollars. Nos clients se sont habitués à cette situation. Les peurs existaient avant les derniers événements, c’est-à-dire que les demandes étaient déjà inscrites dans un climat d’incertitude.
C. B. : La fermeture de l’aéroport pendant une semaine a retardé la signature de plusieurs ventes, puisque les acheteurs étaient à l’étranger.

Savez-vous si des chantiers se sont arrêtés ?
R. M. : Certains chantiers à Beyrouth ont connu une pénurie de main-d’œuvre, ils n’ont pas totalement été arrêtés. La majorité des promoteurs étaient tenus par leurs obligations puisqu’ils ont déjà vendu partiellement leur projet.

Avez-vous noté un repli communautaire ou des délocalisations ?
R. M. : Plusieurs quartiers ont été particulièrement touchés au cours des derniers événements et ont fait la une des médias. Naturellement, certaines personnes vont se sentir plus à l’aise dans telle ou telle région de Beyrouth. Il pourrait y avoir des migrations sécuritaires.
C. B. : J’ai reçu plusieurs demandes de la part de sociétés qui cherchaient à délocaliser leur bureau de Ras Beyrouth vers Achrafié ou Sin el-Fil.

Comment ont évolué les prix ?
R. M. : Les acheteurs espéraient un geste ou une compensation de la part du vendeur. Mais il n’y a pas eu de panique, les prix n’ont pas diminué.
C. B. : Des Libanais expatriés m’ont contacté pour savoir comment ont évolué les prix, ils espéraient sans doute une baisse ce qui n’a pas été constaté.