Le Liban a aujourd’hui un besoin urgent de grands travaux d’infrastructure : autoroutes, électricité, barrages hydrauliques, télécoms, etc. Les banques libanaises regorgent quant à elles de liquidités qu’elles cherchent à placer. Il est donc logique que se pose la question du financement de ces projets d’infrastructure par les banques libanaises.
« Trois solutions sont possibles pour financer ce genre de projets, explique Maurice Sehanoui, PDG de la Banque BLC : soit demander des prêts subventionnés (type Banque mondiale) ; soit obtenir un financement du secteur public ; soit demander la contribution des banques. »
« Aujourd’hui, l’État libanais n’a pas les moyens de financer les grands travaux, il croule déjà sous une dette de 50 milliards de dollars », note Adnan Kassar, de la Fransabank. En revanche, « la croissance de la taille des banques et le faible niveau du ratio emplois/ressources font que les banques ont la capacité de financer des projets sur le long terme », explique Walid Raphaël, directeur général adjoint de la BLF.
Si la loi libanaise limite drastiquement l’investissement direct des banques dans les projets d’infrastructure, rien ne les empêche de financer les investisseurs. Une loi-cadre sur les partenariats public privé (PPP) est d’ailleurs actuellement étudiée par les différents organismes concernés. « Nous sommes prêts à financer le secteur privé, explique Freddie Baz, directeur de la stratégie de la Bank Audi. Et nous étudierons les projets comme n’importe quel projet de crédit, en faisant une étude de faisabilité et en regardant les garanties. » « L’important est que nous ayons de la visibilité sur les revenus et l’assurance que l’État n’interviendra pas dans la gestion », affirme Georges Abou Jaoudé, de la Lebanese Canadian Bank.
« Ces projets sont rentables, affirme Kassar. À condition d’être gérés par le secteur privé et pas par le secteur public. On peut par exemple installer des péages sur les autoroutes pour rentabiliser l’investissement. » Raphaël poursuit : « Les banques ont déjà financé de grands travaux par le passé, comme ceux de la Marina de Dbayé et les BOT des réseaux cellulaires. Il n’y a pas de raison que nous ne le refassions pas. » Saad Azhari, de la Banque BLOM soulève cependant un problème important : celui du “mismatch” entre les dépôts qui sont à court terme, alors que le financement de ces projets est sur du long terme. « Si les banques acceptent de les financer, elles font face à un risque important de pénurie de liquidités », explique-t-il. Pour lui, tout comme pour François-Pascal de Maricourt, PDG de la HSBC, ce n’est pas aux banques libanaises de financer ces projets. « Il existe des organismes régionaux et internationaux spécialisés dans ce genre de financement, précise Azhari. Le rôle des banques libanaises est de financer le fond de roulement de ces projets, ou pour les banques d’investissement, de gérer la collecte de fonds à travers les marchés financiers. »
Maurice Sehnaoui, de la BLC, tempère cependant : « Tant que la confiance existe, le problème ne se pose pas. De toute façon le “mismatch” commence à baisser, la durée moyenne des dépôts s’allonge, nous commençons à avoir des dépôts à 1-2-3 ans, ce qui était inimaginable par le passé. »
Le gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, affirme quant à lui que « selon les dernières estimations, les banques disposent d’un excédent de liquidités de 13 milliards de dollars, dont 4 milliards immédiatement mobilisables dans des opérations à long terme sans gêner les ratios de solvabilité ». Cela devrait suffire à lancer quelques projets, dès qu’ils seront mis sur la table.
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