Le secteur bancaire libanais a connu une croissance modérée de son activité en 2011 : après un premier semestre fortement affecté par les tensions politiques internes, la deuxième partie de l’année a été témoin d’un redressement de situation, malgré les tensions régionales.
L’activité du secteur non consolidé (c’est-à-dire sans prendre en compte les filiales étrangères) a progressé de 9,0 % en 2011, pour atteindre 140,6 milliards de dollars d’actifs en décembre 2011 ; la progression était légèrement supérieure en 2010 (11,9 %).
Comme par le passé, le secteur a été tiré vers le haut par les dépôts, qui constituent la principale source de financement des banques libanaises : les dépôts bancaires des secteurs privé et public ont augmenté de 8,4 % en 2011 et représentent 83,7 % du total des actifs, soit 117,7 milliards de dollars.
C’est officiellement le secteur privé résident qui fournit le gros des dépôts : 80,2 %, en hausse de 6,5 % par rapport à 2010. Mais la notion de résidence est floue, cet indicateur est donc à manier avec des pincettes. Les dépôts du secteur privé non résident ont été le moteur de la croissance, avec une augmentation de 15 %, pour former 18,1 % du total.
Hausse de la dollarisation des dépôts
En raison de la situation politique tendue au premier semestre 2011, ainsi que l’instabilité régionale qui a prévalu toute l’année, ce sont les dépôts en devises qui enregistrent la plus forte progression : +12,5 %, ce qui mène le taux de dollarisation des dépôts à 65,9 % en décembre 2011. C’est la première fois depuis 2008 que le taux de dollarisation repart à la hausse. Le taux de 63,2 % de décembre 2010 avait été un plus bas historique.
Les dépôts en livres libanaises ont, quant à eux, stagné sur le total de l’année. Les analystes de Bank Audi relèvent qu’ils ont en fait subi une baisse au début de l’année et qu’ils sont repartis à la hausse au deuxième semestre.
Le taux d’intérêt créditeur moyen en livres a continué à baisser, encouragé en cela par les directives de la Banque centrale : il est passé de 5,68 % en décembre 2010 à
5,63 % en décembre 2011 pour les dépôts. Le taux d’intérêt créditeur moyen en dollars a en revanche légèrement augmenté : il est passé de 2,80 % à 2,83 %.
Les crédits au secteur privé augmentent lentement
Le secteur privé résident est celui qui a le plus bénéficié de cet afflux de ressources, coûteuses à gérer pour les banques : les crédits qui lui ont été octroyés s’élèvent à 34,2 milliards de dollars, en augmentation de 12 % par rapport à 2010. Ils constituent 86,9 % du total des prêts accordés au secteur privé, résident et non résident, soit 39,4 milliards de dollars, en hausse de 12,7 % par rapport à 2010. Le secteur de l’immobilier a continué à tirer cette croissance vers le haut. Les prêts à l’habitat ont augmenté de 24,3 % entre décembre 2010 et septembre 2011 pour atteindre 13 % du total des crédits, soit 5,6 milliards de dollars ; et ceux accordés à la construction ont totalisé 7,5 milliards de dollars, en hausse de 18,7 % par rapport à 2010. À noter l’augmentation très importante des prêts accordés aux entreprises travaillant dans le secteur des carrières : +69,5 %, à 38 millions de dollars.
Les crédits en livres ont été favorisés par les mesures d’exemption des réserves obligatoires prises par la BDL pour faire face à l’afflux de liquidités en monnaie nationale. Le ratio de dollarisation des crédits a ainsi touché un bas historique, de 78,4 % en décembre 2011, soit le niveau le plus bas atteint en deux décennies.
Les taux d’intérêt moyens sur les crédits en livres libanaises ont légèrement baissé, dans la mouvance de la baisse de ceux sur les dépôts : ils sont passés de 7,91 % en décembre 2010 à 7,38 % en décembre 2011. Sur les crédits en dollars, ils ont légèrement augmenté (6,74 à 7,02 %) à l’instar des taux sur les dépôts en dollars.
Pour la première fois depuis 2007, l’État a diminué son aide aux petites et moyennes entreprises en 2011. L’organisme de garantie de crédit Kafalat a garanti 1 272 emprunts d’une valeur totale de 165 millions de dollars. Cela représente une baisse annuelle de 9,4 % en volume et 2,6 % en valeur.
Au total, le ratio crédits sur dépôts a continué sa progression, à 34 %, contre 32,6 % en 2010, même s’il reste encore relativement faible.
Le secteur public constitue toujours un client important pour les banques commerciales, qui lui ont accordé 29,2 milliards de dollars en 2011, soit 35,1 % du total des crédits accordés par les banques. Ce chiffre est quasiment stable par rapport à 2010 : -0,3 %. Le montant des réserves à la Banque centrale, qui rentrent dans le calcul du risque souverain, a augmenté de 17,1 % en 2011, à 47,2 milliards de dollars.
L’exposition totale au secteur public a donc légèrement augmenté, à 54,4 %, contre 54,0 % fin décembre 2010.
Une rentabilité au ralenti
Si le bénéfice des banques commerciales libanaises n’est pas encore divulgué, celui, consolidé (avec les filiales étrangères) mais non audité, des banques Alpha (celles dont les dépôts sont supérieurs à deux milliards de dollars) ont connu une croissance modérée cette année, de 1,2 %, à 1,5 milliard de dollars. C’est la plus faible croissance enregistrée en neuf ans. Elle est due à une augmentation du ratio coût sur revenus, qui est passée de 47,2 % à 47,4 % en un an : quelque 97 nouvelles agences ont été ouvertes et 1 901 salariés supplémentaires embauchés (en croissance de 10,6 % et 8,3 % respectivement). Par ailleurs, les provisions pour créances douteuses ont enregistré une hausse de 88,6 %, du fait de la gestion prudentielle des banques libanaises face aux troubles régionaux.
Ce sont les bénéfices en provenance des commissions qui ont tiré les revenus vers le haut : ils ont augmenté de 13,9 %, pour représenter 35,5 % du total des bénéfices. Les bénéfices en provenance des marges d’intérêts ont, quant à eux, augmenté de 5,5 %.