Les banques commerciales libanaises font preuve cette année d’une forte capacité de résilience face aux tensions régionales et à la crise économique et financière. Malgré la contraction de certains indicateurs et la mise en place de stratégies conservatrices, le secteur reste dans le vert et affiche des projets d’expansion dans la région et à l’international.
Conflit armé en Syrie, instabilité en Libye, incertitudes en Tunisie, bouleversements en Égypte, insécurité en Irak, le dossier palestinien dans l’impasse et la crise israélo-iranienne à son paroxysme : la situation du Moyen-Orient n’est pas pour rassurer. Tout cela ne manque pas d’affecter le Liban, lui-même en lutte avec ses tensions internes. Cette instabilité politique, économique et sociale impacte évidemment l’économie du pays, dont la croissance est estimée à 2 % cette année par le Fonds monétaire international (FMI), contre 8 % en 2010. Le Liban est vulnérable et sensible aux bouleversements régionaux à travers les marchés de capitaux et le marché du travail. La balance commerciale, autre indicateur de bonne santé, est également mal en point, affectée notamment par la contraction de l’économie et les prix en hausse des matières premières. « Nous notons que la tension perceptible au niveau local influe sur le PIB, mais nous sommes confiants dans le fait que le déficit budgétaire pour 2012 puisse être maîtrisé comme pour les années précédentes », espère toutefois Adnane Kassar, président-directeur général de la Fransabank. Une note d’optimisme partagée par Freddie Baz, conseiller stratégique de Bank Audi. « La relative récession économique du pays est du côté de la demande, pas de l’offre, ce qui peut rendre la reprise rapide. »
Résilience du secteur
Dans ce contexte de morosité économique, le secteur bancaire montre une fois de plus sa capacité de résilience. La taille des actifs, l’importance des fonds propres et la réactivité des dirigeants confirment la solidité des banques libanaises, estiment la plupart de ses acteurs. « Le secteur est l’un des moins vulnérables de l’économie, grâce à son efficacité et sa bonne gestion » , estime Freddie Baz. Il admet néanmoins qu’en dépit des revenus en hausse, les banques sont bien en dessous de l’utilisation maximale de leurs capacités. Michel Khadige, directeur général adjoint du Crédit libanais, met quant à lui l’accent sur la bonne solvabilité du secteur. « Les placements sont équilibrés et sont restés sains grâce aux garde-fous de la Banque centrale, le ratio capital/actifs est satisfaisant », explique-t-il. Maurice Sehnaoui, président-directeur général de la BLC, mentionne les taux d’intérêt attractifs, signe que la crise bancaire internationale n’a pas d’effets trop visibles sur le pays. Les investissements du secteur bancaire dans le secteur privé sont également encourageants. « Ils dépassent depuis 2010 ceux du secteur public, ce qui est, pour les banques, un signe évident d’une moindre dépendance aux concours accordés à l’État, d’un plus grand dynamisme et d’un potentiel de croissance sur le plan économique », analyse Adnane Kassar.
Ce dynamisme du secteur est récompensé au niveau régional. Vingt banques libanaises font ainsi partie du top 150 des banques arabes, selon le rapport 2012 publié par le magazine économique al-Iktissad wal Aamal. Les banques sont classées en fonction de leurs fonds propres à fin 2011. La Bank Audi arrive à la 26e place, suivie par la BLOM Bank (32e), la Byblos Bank (40e), la Fransabank (49e), la Bank of Beirut (60e), la BankMed (61e), la Banque libano-française (67e), le Crédit libanais (80e), la BBAC (100e) et la IBL Bank (112e).
Ces analyses positives se traduisent dans les résultats financiers des établissements. Même s’ils n’affichent pas la hausse des années précédentes, tous restent néanmoins dans le vert. Le bilan consolidé des 54 banques commerciales s’est élevé à 147,1 milliards de dollars fin août 2012, en hausse de 4,6 % depuis fin 2011. Le groupe Alpha (12 premières banques du pays) affiche même une hausse annuelle de 7,7 %. Les fonds propres ont atteint 11,9 milliards de dollars, en hausse de 14,3 % en rythme annuel. Les crédits octroyés au secteur privé ont progressé de 9,7 % sur un an à 36,5 milliards de dollars ; les prêts octroyés au secteur public ont augmenté de 8,1 % à 29,9 milliards de dollars et les dépôts du secteur privé ont affiché une hausse de 7,5 % en rythme annuel à 123,2 milliards de dollars. Cette hausse des dépôts peut être en partie créditée à la fuite de capitaux des pays limitrophes en crise. « Le secteur bancaire libanais profite relativement du malheur actuel de ses voisins, notamment pour les dépôts et l’investissement dans la construction », analyse Maurice Sehnaoui. La Banque centrale est toutefois vigilante au risque de transferts de capitaux de pays en crise comme l’Égypte ou la Syrie, pays sous le coup de sanctions internationales.
Le taux de dollarisation des dépôts, à 64,8 % fin août 2012, est légèrement inférieur à celui de l’an dernier (à 66,5 %). La croissance de 2,5 milliards de dollars des dépôts en livres libanaises illustre la politique favorable de la Banque centrale en termes de taux. « La livre libanaise est forte », confirme Michel Khadige.
Un autre signe rassurant est la mise en conformité avec les directives de Bâle III, qui imposent un ratio de solvabilité minimum.
« C’est plutôt une formalité qu’autre chose, nous les appliquons déjà », note Karim Habib, d’IBL Bank. La grande majorité des banques libanaises affichent en effet des ratios supérieurs aux limites de 12 % requises d’ici décembre 2015.
Frein dans les investissements
Néanmoins, tout n’est évidemment pas rose.
« Les agrégats macroéconomiques déterminent les agrégats bancaires », rappelle Freddie Baz. Les banques, en dépit de ce qu’elles peuvent souhaiter ou prétendre, ne sont pas imperméables à la crise ambiante. « Les secteurs économiques les plus touchés sont les clients traditionnels des banques comme le secteur de l’import-export par exemple, ce qui entraîne une baisse des demandes de lettres de crédit et de garantie et de crédits aux entreprises », admet François Bassil, PDG de la Byblos Bank. Ce qui nuit à la profitabilité. « C’est une année difficile, avec un net ralentissement des investissements. Le comportement d’attente, “Wait and see”, des investisseurs se traduit par une baisse des crédits d’investissement », ajoute Walid Raphaël, de la Banque libano-française. On constate le même phénomène de recul dans la banque de détail. « Les consommateurs reportent leurs décisions de consommation et d’investissement, ce qui impacte directement les crédits à la consommation et immobiliers », note Freddie Baz. Tous les professionnels s’accordent pour constater que l’activité de crédit souffre de la situation d’incertitude. Et c’est aussi le cas des flux de capitaux entrant dans le pays. « Les investissements directs étrangers (IDE) se sont ralentis », remarque Michel Khadige. Ces derniers ont accusé une chute de près de 50 % en 2011, selon le FMI. Certains établissements cèdent une partie de leurs bons du Trésor à des investisseurs pour s’assurer des profits, ou pour au moins ne pas afficher de pertes. « Les bénéfices chutent avec la forte baisse des investissements dans le pays », déplore François Bassil. Les mouvements de capitaux à l’entrée, indicateur fondamental pour les banquiers libanais, marquent le pas. Le record de plus de 15 milliards de dollars enregistrés en 2010 est déjà un souvenir. « Le ralentissement de la croissance des dépôts n’est pas inquiétant, c’est une stabilisation », explique Freddie Baz. « L’économie libanaise a aujourd’hui besoin d’environ 10 milliards de dollars de capitaux à l’entrée chaque année », estime-t-il, avant d’admettre qu’aujourd’hui le niveau, tout en étant légèrement en baisse, reste supérieur au minimum requis. Ce ralentissement augmente le déficit de la balance courante, habituellement couvert par la balance des capitaux entrants. Mais il n’y a pas de crainte à avoir à moyen terme, tous les amortisseurs fonctionnent pour absorber les pressions à court terme.
Si les meubles sont largement sauvés jusqu’ici, les banquiers ne cachent pas leur inquiétude pour les mois à venir. Pour Karim Habib, « nous allons assister en 2013 à la baisse des réserves obligatoires disponibles des banques et à une stagnation de l’économie. Cela va ralentir la croissance des prêts et des garanties Kafalat ». Même son de cloche à la BLC. « La croissance du secteur va être plus faible que les années précédentes, avec les provisions prises par les banques pour la Syrie et le ralentissement de l’économie », remarque Maurice Sehnaoui. Pour lui, la contraction de la croissance des dépôts est le signe normal de l’ambiance d’inquiétude et la contraction de la croissance des crédits est due à la fois au ralentissement de l’économie et donc une baisse de la demande et à la réticence des banques de prendre trop de risques.
Prudence et diversification
Comment alors tenter de passer entre les gouttes ? Tous s’accordent pour mettre en œuvre une politique de gestion conservatrice.
« Les prêts représentent environ 35 % des actifs consolidés des banques, le secteur n’est pas trop exposé sur l’économie », note Karim Habib. Pour lui, les établissements ont une responsabilité morale envers les déposants. « Nous prêtons les dépôts, donc nous nous devons d’avoir une stratégie conservatrice », précise-t-il. « Il faut que les banques soient patientes et conservent une forte liquidité et restent conservatrices dans leurs placements, sans toutefois arrêter le crédit », martèle François Bassil. Ce numéro d'équilibriste, la plupart des établissements le mettent déjà en œuvre et constituent des provisions pour leurs créances douteuses. Consolidation et diversification sont également les directives du Crédit libanais. « Et il faut éviter trop de déséquilibre ou “mismatching” », conseille Michel Khadige.
Une autre stratégie consiste à s’exporter. « L’ouverture à l’étranger permet un renforcement de sa position, l’amélioration continue de ses performances et la diversification de ses revenus », note Karim Habib. La leçon est bien apprise par ses confrères : la plupart des banques universelles libanaises s’implantent à l’étranger, que ce soit dans la région ou sur d’autres continents. Elles sont nombreuses, notamment en Europe et en Afrique, et s’attaquent aux marchés à fort potentiel de développement. Ainsi, Bank Audi s’apprête à conquérir la Turquie et l’Irak est la prochaine destination pour plusieurs de ses confrères. « Le secteur bancaire a un grand avenir au niveau régional », affirme Maurice Sehnaoui, en tournant son regard vers Bagdad et Erbil.
Pour le Liban, les banques ont toutes le même souhait : une politique économique stable qui attire l’investissement. « Il faut une meilleure gouvernance économique par des choix politiques stratégiques », diagnostique Freddie Baz. « Le décalage entre les attentes des secteurs productifs et la gestion des pouvoirs en place ne fait que se creuser, déplore Adnane Kassar. À cela s’ajoutent d’autres problèmes étatiques tels l’électricité, les transports routiers ou encore une meilleure collecte des revenus de l’État. Ce n’est qu’en s’attelant à la résolution de tous ces problèmes prioritaires que le Liban sera en mesure de redémarrer pleinement », conclut-il. « Il faut redorer l’image du Liban pour soutenir les investissements et relancer l’économie, insiste Karim Habib. Les banques ont beaucoup de liquidités non investies, mais elles ont besoin d’opportunités de placements. »
Résilience du secteur
Dans ce contexte de morosité économique, le secteur bancaire montre une fois de plus sa capacité de résilience. La taille des actifs, l’importance des fonds propres et la réactivité des dirigeants confirment la solidité des banques libanaises, estiment la plupart de ses acteurs. « Le secteur est l’un des moins vulnérables de l’économie, grâce à son efficacité et sa bonne gestion » , estime Freddie Baz. Il admet néanmoins qu’en dépit des revenus en hausse, les banques sont bien en dessous de l’utilisation maximale de leurs capacités. Michel Khadige, directeur général adjoint du Crédit libanais, met quant à lui l’accent sur la bonne solvabilité du secteur. « Les placements sont équilibrés et sont restés sains grâce aux garde-fous de la Banque centrale, le ratio capital/actifs est satisfaisant », explique-t-il. Maurice Sehnaoui, président-directeur général de la BLC, mentionne les taux d’intérêt attractifs, signe que la crise bancaire internationale n’a pas d’effets trop visibles sur le pays. Les investissements du secteur bancaire dans le secteur privé sont également encourageants. « Ils dépassent depuis 2010 ceux du secteur public, ce qui est, pour les banques, un signe évident d’une moindre dépendance aux concours accordés à l’État, d’un plus grand dynamisme et d’un potentiel de croissance sur le plan économique », analyse Adnane Kassar.
Ce dynamisme du secteur est récompensé au niveau régional. Vingt banques libanaises font ainsi partie du top 150 des banques arabes, selon le rapport 2012 publié par le magazine économique al-Iktissad wal Aamal. Les banques sont classées en fonction de leurs fonds propres à fin 2011. La Bank Audi arrive à la 26e place, suivie par la BLOM Bank (32e), la Byblos Bank (40e), la Fransabank (49e), la Bank of Beirut (60e), la BankMed (61e), la Banque libano-française (67e), le Crédit libanais (80e), la BBAC (100e) et la IBL Bank (112e).
Ces analyses positives se traduisent dans les résultats financiers des établissements. Même s’ils n’affichent pas la hausse des années précédentes, tous restent néanmoins dans le vert. Le bilan consolidé des 54 banques commerciales s’est élevé à 147,1 milliards de dollars fin août 2012, en hausse de 4,6 % depuis fin 2011. Le groupe Alpha (12 premières banques du pays) affiche même une hausse annuelle de 7,7 %. Les fonds propres ont atteint 11,9 milliards de dollars, en hausse de 14,3 % en rythme annuel. Les crédits octroyés au secteur privé ont progressé de 9,7 % sur un an à 36,5 milliards de dollars ; les prêts octroyés au secteur public ont augmenté de 8,1 % à 29,9 milliards de dollars et les dépôts du secteur privé ont affiché une hausse de 7,5 % en rythme annuel à 123,2 milliards de dollars. Cette hausse des dépôts peut être en partie créditée à la fuite de capitaux des pays limitrophes en crise. « Le secteur bancaire libanais profite relativement du malheur actuel de ses voisins, notamment pour les dépôts et l’investissement dans la construction », analyse Maurice Sehnaoui. La Banque centrale est toutefois vigilante au risque de transferts de capitaux de pays en crise comme l’Égypte ou la Syrie, pays sous le coup de sanctions internationales.
Le taux de dollarisation des dépôts, à 64,8 % fin août 2012, est légèrement inférieur à celui de l’an dernier (à 66,5 %). La croissance de 2,5 milliards de dollars des dépôts en livres libanaises illustre la politique favorable de la Banque centrale en termes de taux. « La livre libanaise est forte », confirme Michel Khadige.
Un autre signe rassurant est la mise en conformité avec les directives de Bâle III, qui imposent un ratio de solvabilité minimum.
« C’est plutôt une formalité qu’autre chose, nous les appliquons déjà », note Karim Habib, d’IBL Bank. La grande majorité des banques libanaises affichent en effet des ratios supérieurs aux limites de 12 % requises d’ici décembre 2015.
Frein dans les investissements
Néanmoins, tout n’est évidemment pas rose.
« Les agrégats macroéconomiques déterminent les agrégats bancaires », rappelle Freddie Baz. Les banques, en dépit de ce qu’elles peuvent souhaiter ou prétendre, ne sont pas imperméables à la crise ambiante. « Les secteurs économiques les plus touchés sont les clients traditionnels des banques comme le secteur de l’import-export par exemple, ce qui entraîne une baisse des demandes de lettres de crédit et de garantie et de crédits aux entreprises », admet François Bassil, PDG de la Byblos Bank. Ce qui nuit à la profitabilité. « C’est une année difficile, avec un net ralentissement des investissements. Le comportement d’attente, “Wait and see”, des investisseurs se traduit par une baisse des crédits d’investissement », ajoute Walid Raphaël, de la Banque libano-française. On constate le même phénomène de recul dans la banque de détail. « Les consommateurs reportent leurs décisions de consommation et d’investissement, ce qui impacte directement les crédits à la consommation et immobiliers », note Freddie Baz. Tous les professionnels s’accordent pour constater que l’activité de crédit souffre de la situation d’incertitude. Et c’est aussi le cas des flux de capitaux entrant dans le pays. « Les investissements directs étrangers (IDE) se sont ralentis », remarque Michel Khadige. Ces derniers ont accusé une chute de près de 50 % en 2011, selon le FMI. Certains établissements cèdent une partie de leurs bons du Trésor à des investisseurs pour s’assurer des profits, ou pour au moins ne pas afficher de pertes. « Les bénéfices chutent avec la forte baisse des investissements dans le pays », déplore François Bassil. Les mouvements de capitaux à l’entrée, indicateur fondamental pour les banquiers libanais, marquent le pas. Le record de plus de 15 milliards de dollars enregistrés en 2010 est déjà un souvenir. « Le ralentissement de la croissance des dépôts n’est pas inquiétant, c’est une stabilisation », explique Freddie Baz. « L’économie libanaise a aujourd’hui besoin d’environ 10 milliards de dollars de capitaux à l’entrée chaque année », estime-t-il, avant d’admettre qu’aujourd’hui le niveau, tout en étant légèrement en baisse, reste supérieur au minimum requis. Ce ralentissement augmente le déficit de la balance courante, habituellement couvert par la balance des capitaux entrants. Mais il n’y a pas de crainte à avoir à moyen terme, tous les amortisseurs fonctionnent pour absorber les pressions à court terme.
Si les meubles sont largement sauvés jusqu’ici, les banquiers ne cachent pas leur inquiétude pour les mois à venir. Pour Karim Habib, « nous allons assister en 2013 à la baisse des réserves obligatoires disponibles des banques et à une stagnation de l’économie. Cela va ralentir la croissance des prêts et des garanties Kafalat ». Même son de cloche à la BLC. « La croissance du secteur va être plus faible que les années précédentes, avec les provisions prises par les banques pour la Syrie et le ralentissement de l’économie », remarque Maurice Sehnaoui. Pour lui, la contraction de la croissance des dépôts est le signe normal de l’ambiance d’inquiétude et la contraction de la croissance des crédits est due à la fois au ralentissement de l’économie et donc une baisse de la demande et à la réticence des banques de prendre trop de risques.
Prudence et diversification
Comment alors tenter de passer entre les gouttes ? Tous s’accordent pour mettre en œuvre une politique de gestion conservatrice.
« Les prêts représentent environ 35 % des actifs consolidés des banques, le secteur n’est pas trop exposé sur l’économie », note Karim Habib. Pour lui, les établissements ont une responsabilité morale envers les déposants. « Nous prêtons les dépôts, donc nous nous devons d’avoir une stratégie conservatrice », précise-t-il. « Il faut que les banques soient patientes et conservent une forte liquidité et restent conservatrices dans leurs placements, sans toutefois arrêter le crédit », martèle François Bassil. Ce numéro d'équilibriste, la plupart des établissements le mettent déjà en œuvre et constituent des provisions pour leurs créances douteuses. Consolidation et diversification sont également les directives du Crédit libanais. « Et il faut éviter trop de déséquilibre ou “mismatching” », conseille Michel Khadige.
Une autre stratégie consiste à s’exporter. « L’ouverture à l’étranger permet un renforcement de sa position, l’amélioration continue de ses performances et la diversification de ses revenus », note Karim Habib. La leçon est bien apprise par ses confrères : la plupart des banques universelles libanaises s’implantent à l’étranger, que ce soit dans la région ou sur d’autres continents. Elles sont nombreuses, notamment en Europe et en Afrique, et s’attaquent aux marchés à fort potentiel de développement. Ainsi, Bank Audi s’apprête à conquérir la Turquie et l’Irak est la prochaine destination pour plusieurs de ses confrères. « Le secteur bancaire a un grand avenir au niveau régional », affirme Maurice Sehnaoui, en tournant son regard vers Bagdad et Erbil.
Pour le Liban, les banques ont toutes le même souhait : une politique économique stable qui attire l’investissement. « Il faut une meilleure gouvernance économique par des choix politiques stratégiques », diagnostique Freddie Baz. « Le décalage entre les attentes des secteurs productifs et la gestion des pouvoirs en place ne fait que se creuser, déplore Adnane Kassar. À cela s’ajoutent d’autres problèmes étatiques tels l’électricité, les transports routiers ou encore une meilleure collecte des revenus de l’État. Ce n’est qu’en s’attelant à la résolution de tous ces problèmes prioritaires que le Liban sera en mesure de redémarrer pleinement », conclut-il. « Il faut redorer l’image du Liban pour soutenir les investissements et relancer l’économie, insiste Karim Habib. Les banques ont beaucoup de liquidités non investies, mais elles ont besoin d’opportunités de placements. »