À la fin de la Première Guerre mondiale, les Skaff sont l’une des familles les plus nombreuses de Zahlé. Mais la reconnaissance de leur “zaama” n’est pas encore acquise. Cette reconnaissance, ils vont la gagner grâce à la pugnacité du grand-père, Élias Tohmé Skaff qui les propulse sur le devant de la scène politique et économique libanaise. Il acquiert à la fin des années 1920 d’une immense propriété – sans doute la plus grande du Liban mandataire – rachetée aux héritiers de Youssef Sursock : ses trois enfants, Najib, Albert et Isabelle. « Les héritiers, propriétaires absentéistes, criblés de dettes, menant une vie mondaine dépensière et luxueuse, mirent leur propriété en vente et Élias Skaff l’acquit pour une somme considérable », relate le sociologue Melhem Chaoul dans la revue Leaders et Partisans au Liban (IFPO), sans pouvoir préciser le montant de la transaction. Élias Tohmé Skaff était alors le régisseur (al-wakil) du “domaine d’Ammiq” des Sursock. « Sur ce, il fit une transaction avec le leader maronite Émile Eddé dont l’épouse était une Sursock et réussit à promulguer une loi rééchelonnant les dettes des petits exploitants de Zahlé et de la Békaa, ce qui lui valut une plus grande popularité et consolida sa zaama », poursuit Melhem Chaoul.
Quand Élias Skaff reprend en main le domaine, le vignoble existe déjà. « Une cave était même installée dans le village de Ammiq. On y élaborait de l’arak, des vins doux ainsi que du vinaigre. Cette cave a cessé son activité dans les années 1940, puis le bâtiment a été détruit par les Israéliens pendant la guerre », explique Naji Skaff, l’un des copropriétaires actuels et cousin d’Élie Skaff, ancien ministre de l’Industrie. Pendant la guerre, les deux tiers du vignoble sont perdus. C’est en effet autour des marais de Ammiq que les Israéliens établissent une zone tampon entre la région qu’ils occupent plus au sud (vers Jezzine et Rachaya) et celle de Chtaura, dominée par les Syriens. « La propriété a continué de fonctionner plus ou moins grâce à ses employés : nous vendions toujours nos raisins aux domaines vinicoles, plus particulièrement à Musar. Mais ne pouvions plus y accéder. » Mais des factions proches des Syriens, qui occupent la région, avaient de toutes les façons mis la main sur la majorité de la propriété et en détournent les profits. Au sortir de la guerre, les Skaff accusent des pertes de 3 à 4 millions de dollars sur la propriété. Ils ne renoncent pas pour autant et, en 1997, ils se remettent à planter des vignes. « Nous avons replanté des cépages nobles : syrah ou cabernet-sauvignon. »
La remise en état de la propriété et des équipements agricoles est progressive. En 2007, les Skaff sont confrontés à un imprévu : leur unique client, Château Musar, à qui les Skaff revendaient l’intégralité de leurs vendanges depuis les années 1930, rompt son contrat commercial et s’adresse à un autre propriétaire de la Békaa, qui lui offre un contrat de fermage sur 20 hectares. « Nous nous sommes retrouvés avec 300 tonnes de raisin sur le dos. » Les Skaff ont trouvé vite d’autres partenaires, en premier lieu le Domaine des Tourelles (Chtaura) et le Domaine Wardy (Zahlé). Mais cette rupture les pousse à envisager la diversification. « Dans notre secteur, les plus-values sont dans le produit fini, le vin, bien plus rentable », estime Naji Skaff. Depuis, ils se sont donc lancés dans l’élaboration “en amateur” de 10 000 bouteilles annuelles de vin rouge. « On teste le marché : nous vendons auprès de notre réseau pour l’heure, sans chercher encore à commercialiser de manière professionnelle. La construction d’une cave n’est pas à l’ordre du jour : nous louons une cave au Mont-Liban. » Mais clairement, les Skaff caressent désormais ce rêve.
Quand Élias Skaff reprend en main le domaine, le vignoble existe déjà. « Une cave était même installée dans le village de Ammiq. On y élaborait de l’arak, des vins doux ainsi que du vinaigre. Cette cave a cessé son activité dans les années 1940, puis le bâtiment a été détruit par les Israéliens pendant la guerre », explique Naji Skaff, l’un des copropriétaires actuels et cousin d’Élie Skaff, ancien ministre de l’Industrie. Pendant la guerre, les deux tiers du vignoble sont perdus. C’est en effet autour des marais de Ammiq que les Israéliens établissent une zone tampon entre la région qu’ils occupent plus au sud (vers Jezzine et Rachaya) et celle de Chtaura, dominée par les Syriens. « La propriété a continué de fonctionner plus ou moins grâce à ses employés : nous vendions toujours nos raisins aux domaines vinicoles, plus particulièrement à Musar. Mais ne pouvions plus y accéder. » Mais des factions proches des Syriens, qui occupent la région, avaient de toutes les façons mis la main sur la majorité de la propriété et en détournent les profits. Au sortir de la guerre, les Skaff accusent des pertes de 3 à 4 millions de dollars sur la propriété. Ils ne renoncent pas pour autant et, en 1997, ils se remettent à planter des vignes. « Nous avons replanté des cépages nobles : syrah ou cabernet-sauvignon. »
La remise en état de la propriété et des équipements agricoles est progressive. En 2007, les Skaff sont confrontés à un imprévu : leur unique client, Château Musar, à qui les Skaff revendaient l’intégralité de leurs vendanges depuis les années 1930, rompt son contrat commercial et s’adresse à un autre propriétaire de la Békaa, qui lui offre un contrat de fermage sur 20 hectares. « Nous nous sommes retrouvés avec 300 tonnes de raisin sur le dos. » Les Skaff ont trouvé vite d’autres partenaires, en premier lieu le Domaine des Tourelles (Chtaura) et le Domaine Wardy (Zahlé). Mais cette rupture les pousse à envisager la diversification. « Dans notre secteur, les plus-values sont dans le produit fini, le vin, bien plus rentable », estime Naji Skaff. Depuis, ils se sont donc lancés dans l’élaboration “en amateur” de 10 000 bouteilles annuelles de vin rouge. « On teste le marché : nous vendons auprès de notre réseau pour l’heure, sans chercher encore à commercialiser de manière professionnelle. La construction d’une cave n’est pas à l’ordre du jour : nous louons une cave au Mont-Liban. » Mais clairement, les Skaff caressent désormais ce rêve.
Ammiq, Deir Taniche Surface : 2 500 ha dont 110 ha de vignes (84 ha en production) Autres cultures : arbres fruitiers, oliviers Propriétaires : Élie, Michel, Chantal, Naji et Zeina Skaff Salariés permanents : 34 Production de raisin en 2012 : 320 tonnes Densité moyenne de plantation : 3 000-3 200 pieds/ha Rendement moyen : 38 hl/ha Âge moyen des vignes : 8-10 ans ; plus vieilles vignes, 55 ans Clients : Domaine des Tourelles, Atibaïa, Clos de Cana, Wardy Prix moyen de vente/kilo : 0,65 dollar Raisin le plus cher vendu : 0,95 dollars |