Des religieuses lesbiennes… Des crimes au couvent… Un jésuite hérétique… Une princesse empoisonnée… Un procès d’inquisition… “Le vice et la grâce” réunit tous les ingrédients d’un très bon polar. Pourtant l’histoire est véridique. Elle se déroule dans le couvent Sant’Ambrogio, près de Rome, au sein duquel la jeune et jolie mère vicaire reçoit des “messages” de l’au-delà, impose aux novices de coucher avec elle et tente d’empoisonner une princesse teutonne, retirée dans le couvent.
Mais “Le vice et la grâce” n’est pas un ouvrage anticlérical ou scabreux. Non, il s’agit d’un très sérieux ouvrage d’histoire, écrit par un universitaire spécialiste d’histoire de l’Église à l’université de Münster (Allemagne). Les secrets du couvent Sant’Ambrogio ? Hubert Wolf les a trouvés dans les minutes du procès de la mère vicaire, au cœur des archives de l’inquisition (aujourd’hui dénommée la Congrégation pour la doctrine et la foi) ouverte par Jean-Paul II.
Ce livre d’une brûlante actualité nous plonge dans les rouages de l’Église et réhabilite le rôle de l’inquisition tout en nous montrant ses limites. En observant Sant’Ambrogio, Wolf nous permet de comprendre la grande histoire du catholicisme et l’opposition entre deux grands courants qui ont et qui agitent toujours l’église : les modernes emmenés par des dominicains et des bénédictins ; les conservateurs menés par les jésuites. Wolf nous permet de mieux saisir la figure du pape Pie IX, à qui l’on doit le dogme de l’Immaculée Conception, du syllabus (condamnation de toutes les “erreurs” constitutives de la modernité), deux événements majeurs de l’histoire du catholicisme entre lesquels se situe, précisément, le scandale des religieuses de Sant’Ambrogio.

“Le vice et la grâce”, de Hubert Wolf, Seuil, 32 dollars.