Rentré de voyage, ses valises toujours fermées, sur le sol à côté de lui, l’homme s’est posté à la fenêtre. Indécis, il regarde filer le taxi qui vient tout juste de le déposer chez lui et dans lequel Marie, elle, est restée. Marie ? Les lecteurs de Jean-Philippe Toussaint la connaissent bien. Elle est l’héroïne d’un cycle romanesque, démarré avec “Faire l’amour” (2002) suivi de “Fuir” (2005) et, quatre ans plus tard, de “La Vérité sur Marie”. Plus exactement, c’est l’amour que lui porte le narrateur qui est l’objet central de cette longue saga : un amour harassant, du genre « qui ne finit pas de finir », toujours vacillant mais éternellement recommençant. Pourtant, cette saison, quatre des “amours de Marie” se lisent seul sans besoin de compulser les romans précédents. « Les quatre romans se complètent, s’enrichissent mutuellement. Chaque livre fait partie d’un ensemble, mais on peut très bien les lire séparément, et dans l’ordre qu’on souhaite », dit d’ailleurs l’auteur dans un entretien au magazine Le Nouvel Observateur.
Pour celui qui aime l’écriture faussement simple de Jean-Philippe Toussaint, “Nue” est un joli cadeau : la familiarité des thèmes, des décors, voire des motifs, apporte à la lecture ce « plaisir de connivence », si rare d’éprouver. Mais ce ressassement littéraire n’empêche nullement la découverte : pour Jean-Philippe Toussaint, l’amour comme l’écriture se nourrit du ressac ; d’un va-et-vient permanent entre le nouveau et le déjà-vu.
“Nue” de Jean-Philippe Toussaint, édition de Minuit,
176 p., 20 dollars.