Un article du Dossier
Les Libanais de Côte d’Ivoire tiennent 40 % de l’économie
Le groupe Yeshi compte 15 sociétés indépendantes et 2 800 employés. Avec un chiffre d’affaires de plus de 420 millions de dollars, il s’appuie notamment sur d’anciennes sociétés françaises comme Bernabé ou Les Galeries Peyrissac pour entamer une diversification régionale.
Créé en 1979 à Abidjan, Yeshi a connu une expansion spectaculaire au cours des 20 dernières années. Lancé avec un simple garage de réparation de vélos et de motos, Abdul Hussein Beydoun a construit le groupe Yeshi, qui affiche aujourd’hui 412,1 millions de dollars (300 millions d’euros) de chiffre d’affaires. En tout, Yeshi compte 15 sociétés indépendantes. Présent en Côte Ivoire, il est aussi largement implanté en Afrique avec plusieurs filiales de distribution, notamment au Maroc et des sites de production industriels (aluminium) au Gabon, au Congo et en Centrafrique.
Son fondateur peut même se prévaloir d’un bureau d’études de design industriel et d’une centrale d’achat à Shanghai (Chine). « C’est là que cela se passe. Pour une société de négoce, ce serait suicidaire de ne pas y aller… »
Principale activité du groupe en Côte d’Ivoire ? La vente et la distribution des véhicules deux-roues (vélos, mobylettes, scooters…) sous la bannière de Mondial Cycles Nouvelle (MCN). Cette société, fondée en 1985, importe de grandes marques étrangères de deux-roues comme Giant ou Peugeot, mais elle produit également sa propre bicyclette sous son nom. « C’est une sorte de hasard : lorsque ma famille vivait encore à Bint Jbeil, mon père m’avait donné un vélo. Je le louais pour quelques centimes à mes camarades, histoire de me faire de l’argent de poche. Quand j’ai commencé à travailler en Côte d’Ivoire, où j’ai débarqué en 1977, fuyant la guerre du Liban, j’ai tout de suite compris l’importance du vélo dans l’économie de la région. Pour nombre d’Ivoiriens, c’est le seul moyen de locomotion. Je n’ai pas hésité. Je me suis lancé. » En 1998, Yeshi fonde sa principale filiale de distribution, Rimco. Celle-ci va assez vite se spécialiser dans la distribution de marques chinoises comme Yuejin (moteur) ou encore Haier (véhicules).
Mais le coup de maître intervient en 2003. Yeshi est alors un client du groupe français Bernabé, une structure spécialisée dans la quincaillerie, l’outillage et le commerce de matériel technique à destination des particuliers ou des professionnels du BTP. Or, ce réseau français de distribution cherche à vendre ses actifs africains. Abdul Hussein Beydoun hésite peu et rachète Bernabé Côte d’Ivoire. « Bernabé appartenait alors au groupe français Descours & Cabaud, une société familiale française, connue notamment pour son négoce de produits sidérurgiques, qui l’avait fondée en 1951. À l’époque, Bernabé souhaitait céder ses filiales africaines, pour se désengager d’un pays jugé instable J’ai récupéré la Côte d’Ivoire, puis progressivement les entités du Sénégal, du Cameroun, du Gabon... » En 2011, Bernabé Côte d’Ivoire a réalisé un chiffre d’affaires de 58,6 millions de dollars (28 milliards de francs CFA), en progression de 9 % par rapport à l’année précédente. « On est en pleine relance en Côte d’Ivoire. Notre chiffre d’affaires devrait vraisemblablement connaître de nouveaux pics », assure Abdul Hussein Beydoun. D’ailleurs, en 2011, Yeshi rouvre une succursale Bernabé du Congo, fermée en 1991 par l’ancien actionnaire. Auparavant, en 2008, Yeshi avait finalisé les négociations pour l’acquisition des Galeries Peyrissac pour l’Afrique de l’Ouest, une sorte de BHV Maison, alors détenu par le groupe de distribution Optorg. « En même temps, nous avons aussi repris Technibat, une structure spécialisée dans la vente de matériel de construction. » Son réseau de vente d’outillages et de matériels pour le BTP est en place. Il peut désormais se développer dans toute l’Afrique.