Cela fait cinq ans maintenant que Jean Boghossian travaille le feu. Il brûle, caramélise et incendie tout ce qui tombe sous la main. Mais ce n’est pas de la destruction que cet ancien grand joaillier cherche là. Ce que l’artiste, qui avait déjà exposé à Beyrouth en 2011, tente de découvrir, c’est une forme de “destruction constructive”, une alchimie entre ombres contraires. « J’aime expérimenter. Je voulais savoir comment vivent les couleurs quand elles sont chauffées, à quel moment les bulles apparaissent ou comment le blanc devient noir… » Le résultat est surprenant tant on est loin de cette expérimentation revendiquée. Ce que cette exposition révèle, c’est avant tout le parcours d’un artiste accompli pour qui le feu donne vie à des formes inattendues certes, mais maîtrisées aux détails près. « Je peins depuis l’âge de 6 ans. J’ai longtemps eu ma période “réaliste”, presque “impressionniste”, mais l’art contemporain, plus particulièrement l’abstraction m’ont libéré. À mon sens, ils rendent plus fluide le dialogue avec le public. Ils laissent une part d’imagination plus grande. » Une large partie de cette exposition est consacrée à ces métamorphoses incendiaires. Elle a été imaginée par Bruno Corà, président de la Fondation Burri, un artiste italien (qui fait à l’heure actuelle l’objet d’une rétrospective au musée Guggenheim de New York). Mais cette exposition se veut aussi une « rétrospective qui ne dit pas son nom » et qui donne à voir des œuvres de différentes périodes de l’artiste. Parmi elles, certaines, dont la connivence avec le mouvement support-surface est évidente. « Je ne suis pas comme ces artistes Lucio Fontana ou Daniel Burren, obsédés par un seul message. Je reste multiple. Mais même eux ont beaucoup tâtonné avant de trouver leur expression la plus aboutie. »
Beirut Exhibition Center, du 4 décembre au 10 janvier,
Tél. : 01/962000.