Ancienne reporter, ayant couvert la première intifada, Rula Halawani est une artiste palestinienne, née à Jérusalem-Est en 1964. Cette photographe, déjà repérée sur la scène internationale, a choisi la photographie documentaire pour “dire” l’occupation israélienne de son pays. Les images présentées à la galerie Ayyam, dans le cadre de l’exposition qui se tient jusqu’au 21 mai, se veulent pourtant “inaccoutumées” : pas d’image des habituels carnages, encore moins de check-points ou du mur encerclant les villes de Cisjordanie… Non, ici, seul le paysage importe. Un paysage vide de présence humaine (ou presque), qui se veut un hommage au monde qu’a connu et aimé le père de l’artiste. Mais ces paysages s’avèrent en fait impossibles à capturer par l’objectif de la caméra. Pour la simple et bonne raison qu’ils n’existent plus : l’occupation israélienne a transformé ces lieux jusqu’à les rendre méconnaissables. Pire encore : interdits aux Palestiniens, ils sont en train de disparaître, de se désagréger pour devenir “autre chose”, un monde, en tous les cas, dont les Palestiniens sont exclus. Ce qui explique que l’artiste ne parvienne qu’à recréer “des images fantomatiques”, presque “oniriques” de la Palestine. Malgré tout, on se démène pour identifier ces paysages familiers. Est-ce Jennine, cette corniche nocturne étrangement abandonnée où tremblent les palmes d’immenses dattiers dans la nuit ? Serait-ce l’université de Birzeit, ce bâtiment opalescent qui semble vouloir sombrer dans un océan d’ombres ? On croit reconnaître, mais la sensation de connivence s’estompe vite pour céder la place à une impression de menaces latentes. « Ces images tentent de donner à voir comment un paysage change et se modifie, alors que les Palestiniens n’y ont plus accès », explique Rula Halawani dans un entretien au site artradarjournal.com. Une vision mélancolique, poétique d’un monde en voie de disparition, qui dit peut être mieux l’occupation israélienne que n’importe quelle image de guerre et de violence.
Jusqu’au 21 mai 2016, galerie Ayyam, Tél. : 01/374450-51.
Jusqu’au 21 mai 2016, galerie Ayyam, Tél. : 01/374450-51.