L’appétit des restaurateurs joue un rôle déterminant dans l’évolution des prix des locaux, orientant le marché à la baisse ou à la hausse. L’engouement des cafés, des restaurants et des bars pour une rue peut être spectaculaire. À l’opposé, le départ et la fermeture d’enseignes ont des effets dévastateurs. État des lieux à Mar Mikhaël, Badaro, Gemmayzé et Monnot.
Mar Mikhaël reste la première destination des noctambules à Beyrouth. Avec une centaine de restaurants et de bars, et une notoriété bien solide, sa suprématie n’est pas remise en cause. Toutefois depuis plusieurs mois, plusieurs fermetures ont été observées et les locaux vacants ne sont plus repris aussi rapidement qu’auparavant. Le quartier a incontestablement atteint son pic. Les loyers stagnent. Ouvrir son enseigne le long de la rue al-Nahr est un luxe avec des loyers de 500 à 700 dollars le m2 par an. Avec de tels prix et une forte concurrence entre les établissements, il est de plus en plus difficile de réussir à Mar Mikhaël. Donc la demande évolue. Désormais, les professionnels s’intéressent à des petits locaux plus isolés dans des axes secondaires où les loyers sont deux fois moins chers.
Avec Mar Mikhaël, Badaro fait partie des adresses les plus recherchées. Depuis 2014, l’engouement est continu, mais voilà plusieurs mois que les loyers se sont stabilisés. Les disponibilités sont pourtant limitées. Les rares opportunités sont à l’écart des principales enseignes et concernent des emplacements qui ont toujours échoué, surtout à l’extrémité sud de la rue Badaro. En effet, la répartition des restaurants, des cafés et des bars est très concentrée, et s’étire sur quelques mètres. La dynamique se trouve le long de trois axes : les rues Badaro, Kfouri et de l’hôpital militaire. Les loyers des meilleurs emplacements varient de 400 à 500 dollars le m2 par an. Les locaux situés dans des axes secondaires se négocient de 250 à 350 dollars le m2 annuel.
À Gemmayzé, la hausse des loyers a démarré fin 2017. En quelques semaines, les prix ont augmenté de 10 %. Alors que les loyers étaient de 300 à 350 dollars le m2 par an, les dernières transactions se sont faites autour de 400 dollars le m2 par an. Après une chute des prix de 30 à 50 % de 2012 à 2016, la dynamique repart. Il a suffi de quelques mois pour que l’image de Gemmayzé soit redorée. Tabliyet Massaad avait déjà prouvé en 2014 qu’il était possible de réussir dans une rue en déclin. Puis le succès de certaines enseignes comme Swiss Butter a encouragé les réticents à tenter leur chance. Le retour de Gemmayzé s’explique par des loyers encore acceptables, par le manque de locaux disponibles et par la saturation de Mar Mikhaël.
Enfin, Monnot ne fait peut-être plus partie des destinations préférées des Beyrouthins, mais elle est appréciée par une clientèle fidèle à certaines enseignes. Quelques restaurants y ont ouvert dernièrement, mais la demande demeure timide. Il est encore trop tôt pour affirmer que la rue va s’imposer à nouveau. Monnot reste toutefois un investissement malin de la part de professionnels à la recherche d’un local bien situé à un prix très abordable, parmi les moins chers d’Achrafié. Le long de l’artère principale, les loyers tournent autour de 300 dollars le m2, en hausse de 5 à 10 % depuis 2017. Les disponibilités sont rares néanmoins. Pour les plus téméraires désireux de s’implanter dans des coins isolés, c’est-à-dire dans les perpendiculaires à la rue Monnot, les valeurs varient autour de 200 dollars le m2.