Un article du Dossier
Lancement de la modernisation de la distribution d’électricité
La filiale de Butec est l’une des trois sociétés à qui l’État a confié la gestion déléguée du réseau de distribution dans le nord du Liban avec pour mission de le moderniser.
Butec est avec ACC (Arabian Construction Company) et Debbas l’un des trois groupes privés chargés en avril 2012 par l’État d’assurer la réhabilitation et la gestion du réseau de distribution d’électricité au Liban en vertu d’un appel d’offres remporté en janvier 2012 par leurs filiales respectives Bus, KVA et NEUC.
« Nous avons trois objectifs : investir dans le réseau, lutter contre le vol et améliorer le service à la clientèle », résume Ziad Younès, le président de Bus (Butec Utility Services), la filiale de Butec à qui a été confiée la zone allant du nord de Beyrouth aux frontières syriennes. Le territoire couvert est d’environ 3 000 km2, mais étant donné la densité de la population dans cette partie du pays, la zone regroupe environ 450 000 usagers, sur un total national de 1,3 million de foyers connectés.
La société a entamé ses activités en septembre 2012, avec plusieurs mois de retard, le temps que soit réglé le sort des employés contractuels auxquels Électricité du Liban avait recours jusque-là pour collecter les factures. À l’issue d’un long bras de fer social, une bonne partie de ces contractuels sont désormais salariés des trois opérateurs privés. « Sur un total de 700 employés, 120 sont nouveaux, 330 sont d’anciens contractuels que nous avons salariés et 250 des contractuels qui ont souhaité conserver leur contrat de sous-traitance », précise Fadi Aboujaoudé, directeur général de Bus.
La presse était invitée fin janvier à visiter le réseau pédagogique installé à Selaata pour former les employés de Bus. « Il s’agit de la copie conforme du réseau réel, explique Patrice Cherigie, l’un des experts envoyés au Liban par ERDF, filiale d’Électricité de France, dans le cadre d’un accord de partenariat avec Bus. Plus de 300 employés ont été formés à ce jour avec une insistance particulière sur la sécurité. »
Au total, l’objectif de ces trois contrats de gestion déléguée est de réduire les pertes techniques et le vol sous la barre des 18 % contre 40 % aujourd’hui et de réaliser ainsi des économies de 100 à 200 millions de dollars par an selon le directeur d’Électricité du Liban, Kamal Hayek. Aujourd’hui, les pertes sont de 300 millions de dollars sur le réseau de distribution.
La réorganisation de la distribution participe d’un effort global de mise à niveau des infrastructures du secteur de l’électricité qui comprend aussi l’augmentation de la production et la réhabilitation du réseau de transport du courant à haute tension.
L’activité de distribution correspond aux derniers kilomètres du réseau, c’est-à-dire la partie reliant les postes-sources (baptisés aussi sous-stations) transformant le courant haute tension en moyenne, puis basse tension, jusqu’à l’utilisateur final.
Un plan des investissements
L’une des missions des trois sociétés chargées de le gérer est d’effectuer un recensement précis de cette partie du réseau avant d’entamer les investissements pour sa réhabilitation.
Sur la base de ce recensement, sera établi un master plan d’investissements soumis en juin à l’approbation d’EDL qui reste propriétaire du réseau. Bien que le territoire ait été divisé en trois zones, EDL, qui est assistée pour cela du consultant Needs, reste aussi responsable de la cohérence d’ensemble. « Nous devons investir environ 160 millions de dollars : la moitié pour installer des compteurs intelligents et l’autre moitié pour réhabiliter le réseau », affirme Fadi Aboujaoudé.
Dans sa partie moyenne tension, le réseau de distribution alloué à la filiale de Butec compte 6 000 km de lignes moyenne tension et 210 départs de moyenne tension alimentés à partir de 29 postes-sources. « Ces derniers ne relèvent pas de notre périmètre, car ils restent du ressort d’Électricité du Liban », précise le directeur.
« Le principal problème du réseau de distribution libanais vient de la surcharge dont il est victime. Il doit supporter 180 % de sa charge nominale, ce qui induit de très fortes pertes techniques – supérieures à 15 % – essentiellement dues au phénomène de surchauffe », explique Frédéric Courault, consultant d’ERDF.
La surcharge est due aux retards d’investissements accumulés depuis des années alors qu’en parallèle la consommation a doublé en dix ans. Pour désaturer le réseau, il faut l’équiper de nouveaux postes-sources, baptisés aussi sous-stations – une décision qui relève d’EDL, et installer des kilomètres de câbles aériens et souterrains.
Au niveau du réseau basse tension, la zone couverte par Bus compte environ 6 000 postes de transformation et environ 12 000 kilomètres de câbles. Ces données sont à affiner en fonction de l’enquête de terrain. Cette partie du réseau souffre de sa vétusté et de mauvaises normes de sécurité. « Les postes aériens posent des problèmes de sécurité, car ce sont des structures ouvertes au lieu d’être protégées par des portes grillagées. »
Améliorer le service, réduire le vol
Parallèlement à l’installation des nouveaux équipements destinés à réhabiliter le réseau, les trois sociétés doivent améliorer la qualité du service à la clientèle et organiser des campagnes pour faire cesser les vols.
« Nous avons relié au réseau quelque 12 000 nouveaux abonnés », affirme Fadi Aboujaoudé. Un nouveau centre d’appel, chargé de gérer les demandes des usagers, a été créé. « Une dizaine d’employés y sont affectés et ils seront bientôt 25 lorsque le call center fonctionnera sept jours sur sept, 24 heures sur 24. »
Bus a déjà collecté 50 millions de dollars de factures pour le compte d’EDL, mais il est encore trop tôt pour mesurer une éventuelle amélioration du taux de collecte. La réduction des vols dépend en grande partie de l’installation de compteurs intelligents qui permettront de couper le courant à distance en cas de non-paiement. Ces appareils seront installés par la société égyptienne el-Sewedy Electrometer, partenaire de Bus.
« Les compteurs intelligents transmettent les informations de chaque usager à un concentrateur de données situé au niveau du transformateur de basse tension. À charge ensuite pour EDL de collecter et de traiter ces informations par un système de transmission mobile », explique Fadi Aboujaoudé. Le traitement des données sera du ressort d’un centre de contrôle pour lequel un appel d’offres est en cours de préparation au niveau d’EDL avec l’assistance du consultant Needs.
En attendant, chacun des trois opérateurs privés a déjà entamé la chasse aux mauvais payeurs. Car leur résultat financier en est fortement tributaire : la pondération de la réduction des vols est supérieure à celle de la réduction des pertes techniques dans le calcul de leur rémunération qui est fondée sur la performance. Ces dernières dépendent simplement de l’installation d’équipements nouveaux, alors que la réduction des vols passe par une intervention humaine compliquée par la situation sociale et sécuritaire libanaise.
« Nous avons passé en revue toutes les données disponibles et repéré 100 000 cas suspects sur lesquels nous allons concentrer nos premières investigations. Il s’agit par exemple d’usagers dont la consommation est nulle, ou dont la consommation ne varie jamais… », déclare Fadi Aboujaoudé.
Les inspections ont commencé, mais ne se déroulent pas à la vitesse souhaitée par la filiale de Butec. La présence d’experts certifiés en mesure de dresser des procès-verbaux est par exemple une nécessité. Mais ces derniers relèvent directement d’Électricité du Liban et n’ont pas les mêmes horaires que les employés de Bus.
« Nous avons trois objectifs : investir dans le réseau, lutter contre le vol et améliorer le service à la clientèle », résume Ziad Younès, le président de Bus (Butec Utility Services), la filiale de Butec à qui a été confiée la zone allant du nord de Beyrouth aux frontières syriennes. Le territoire couvert est d’environ 3 000 km2, mais étant donné la densité de la population dans cette partie du pays, la zone regroupe environ 450 000 usagers, sur un total national de 1,3 million de foyers connectés.
La société a entamé ses activités en septembre 2012, avec plusieurs mois de retard, le temps que soit réglé le sort des employés contractuels auxquels Électricité du Liban avait recours jusque-là pour collecter les factures. À l’issue d’un long bras de fer social, une bonne partie de ces contractuels sont désormais salariés des trois opérateurs privés. « Sur un total de 700 employés, 120 sont nouveaux, 330 sont d’anciens contractuels que nous avons salariés et 250 des contractuels qui ont souhaité conserver leur contrat de sous-traitance », précise Fadi Aboujaoudé, directeur général de Bus.
La presse était invitée fin janvier à visiter le réseau pédagogique installé à Selaata pour former les employés de Bus. « Il s’agit de la copie conforme du réseau réel, explique Patrice Cherigie, l’un des experts envoyés au Liban par ERDF, filiale d’Électricité de France, dans le cadre d’un accord de partenariat avec Bus. Plus de 300 employés ont été formés à ce jour avec une insistance particulière sur la sécurité. »
Au total, l’objectif de ces trois contrats de gestion déléguée est de réduire les pertes techniques et le vol sous la barre des 18 % contre 40 % aujourd’hui et de réaliser ainsi des économies de 100 à 200 millions de dollars par an selon le directeur d’Électricité du Liban, Kamal Hayek. Aujourd’hui, les pertes sont de 300 millions de dollars sur le réseau de distribution.
La réorganisation de la distribution participe d’un effort global de mise à niveau des infrastructures du secteur de l’électricité qui comprend aussi l’augmentation de la production et la réhabilitation du réseau de transport du courant à haute tension.
L’activité de distribution correspond aux derniers kilomètres du réseau, c’est-à-dire la partie reliant les postes-sources (baptisés aussi sous-stations) transformant le courant haute tension en moyenne, puis basse tension, jusqu’à l’utilisateur final.
Un plan des investissements
L’une des missions des trois sociétés chargées de le gérer est d’effectuer un recensement précis de cette partie du réseau avant d’entamer les investissements pour sa réhabilitation.
Sur la base de ce recensement, sera établi un master plan d’investissements soumis en juin à l’approbation d’EDL qui reste propriétaire du réseau. Bien que le territoire ait été divisé en trois zones, EDL, qui est assistée pour cela du consultant Needs, reste aussi responsable de la cohérence d’ensemble. « Nous devons investir environ 160 millions de dollars : la moitié pour installer des compteurs intelligents et l’autre moitié pour réhabiliter le réseau », affirme Fadi Aboujaoudé.
Dans sa partie moyenne tension, le réseau de distribution alloué à la filiale de Butec compte 6 000 km de lignes moyenne tension et 210 départs de moyenne tension alimentés à partir de 29 postes-sources. « Ces derniers ne relèvent pas de notre périmètre, car ils restent du ressort d’Électricité du Liban », précise le directeur.
« Le principal problème du réseau de distribution libanais vient de la surcharge dont il est victime. Il doit supporter 180 % de sa charge nominale, ce qui induit de très fortes pertes techniques – supérieures à 15 % – essentiellement dues au phénomène de surchauffe », explique Frédéric Courault, consultant d’ERDF.
La surcharge est due aux retards d’investissements accumulés depuis des années alors qu’en parallèle la consommation a doublé en dix ans. Pour désaturer le réseau, il faut l’équiper de nouveaux postes-sources, baptisés aussi sous-stations – une décision qui relève d’EDL, et installer des kilomètres de câbles aériens et souterrains.
Au niveau du réseau basse tension, la zone couverte par Bus compte environ 6 000 postes de transformation et environ 12 000 kilomètres de câbles. Ces données sont à affiner en fonction de l’enquête de terrain. Cette partie du réseau souffre de sa vétusté et de mauvaises normes de sécurité. « Les postes aériens posent des problèmes de sécurité, car ce sont des structures ouvertes au lieu d’être protégées par des portes grillagées. »
Améliorer le service, réduire le vol
Parallèlement à l’installation des nouveaux équipements destinés à réhabiliter le réseau, les trois sociétés doivent améliorer la qualité du service à la clientèle et organiser des campagnes pour faire cesser les vols.
« Nous avons relié au réseau quelque 12 000 nouveaux abonnés », affirme Fadi Aboujaoudé. Un nouveau centre d’appel, chargé de gérer les demandes des usagers, a été créé. « Une dizaine d’employés y sont affectés et ils seront bientôt 25 lorsque le call center fonctionnera sept jours sur sept, 24 heures sur 24. »
Bus a déjà collecté 50 millions de dollars de factures pour le compte d’EDL, mais il est encore trop tôt pour mesurer une éventuelle amélioration du taux de collecte. La réduction des vols dépend en grande partie de l’installation de compteurs intelligents qui permettront de couper le courant à distance en cas de non-paiement. Ces appareils seront installés par la société égyptienne el-Sewedy Electrometer, partenaire de Bus.
« Les compteurs intelligents transmettent les informations de chaque usager à un concentrateur de données situé au niveau du transformateur de basse tension. À charge ensuite pour EDL de collecter et de traiter ces informations par un système de transmission mobile », explique Fadi Aboujaoudé. Le traitement des données sera du ressort d’un centre de contrôle pour lequel un appel d’offres est en cours de préparation au niveau d’EDL avec l’assistance du consultant Needs.
En attendant, chacun des trois opérateurs privés a déjà entamé la chasse aux mauvais payeurs. Car leur résultat financier en est fortement tributaire : la pondération de la réduction des vols est supérieure à celle de la réduction des pertes techniques dans le calcul de leur rémunération qui est fondée sur la performance. Ces dernières dépendent simplement de l’installation d’équipements nouveaux, alors que la réduction des vols passe par une intervention humaine compliquée par la situation sociale et sécuritaire libanaise.
« Nous avons passé en revue toutes les données disponibles et repéré 100 000 cas suspects sur lesquels nous allons concentrer nos premières investigations. Il s’agit par exemple d’usagers dont la consommation est nulle, ou dont la consommation ne varie jamais… », déclare Fadi Aboujaoudé.
Les inspections ont commencé, mais ne se déroulent pas à la vitesse souhaitée par la filiale de Butec. La présence d’experts certifiés en mesure de dresser des procès-verbaux est par exemple une nécessité. Mais ces derniers relèvent directement d’Électricité du Liban et n’ont pas les mêmes horaires que les employés de Bus.