En quelques jours l’horreur s’est à nouveau installée dans un pays qui croyait avoir retrouvé sa douceur de vivre.
Tout laissait croire à un été de rêve : les touristes, arabes et européens, avaient repris le chemin de Beyrouth, les
festivals enregistraient des ventes record de billets, des millions de dollars étaient investis dans l’immobilier, les
nouvelles plages, les nouveaux restaurants à la pointe de la mode ouvraient leurs portes à coup massif de publicité.
Les Libanais aiment l’éphémère, l’immédiat : se laisser vivre au jour le jour, surtout les mois de soleil, oubliant les plans
stratégiques à moyen et long terme. D’ailleurs, au Liban, qui peut vraiment faire des plans à long terme ? Tout le monde
s’est trompé : trop de paramètres à prendre en compte, alors va pour le laisser-faire, laisser-dire, laisser-venir : il est
tellement difficile d’unifier les discours, de construire l’avenir, dans un pays dit démocratique, où trois communautés
sunnite, chiite et chrétienne – qui ont chacune la minorité de blocage – doivent s’entendre pour gérer le pays.
Tout laissait croire à un été de rêve ? Peut-être pas tout. Puisque la crise politique était à son paroxysme, le dialogue
national ressemblait plutôt à un dialogue de sourds, les réformes économiques patinaient et, depuis des mois, le
Hezbollah reconnaissait être en possession de plus d’une dizaine de milliers de missiles à longue portée. Il avait envoyé
ses drones survoler le nord d’Israël, alors que l’Iran et la Syrie, mis au ban de
la communauté internationale, signaient des pactes d’entraide.
Le 12 juillet tout a basculé. Et depuis, c’est l’escalade, le cauchemar. Les
Israéliens ont instauré un blocus maritime et aérien sur le pays et leurs avions
pilonnent violemment et quotidiennement les positions du Hezbollah et l’infrastructure
libanaise : les ponts, les aéroports, le port de Beyrouth, des stations
électriques, des centraux téléphoniques, des usines vitales sont mis hors
d’usage, des millions de dollars partent en fumée. Le Sud est rapidement
détruit et isolé, la banlieue sud de Beyrouth est en ruines, et pour quitter (ou
retrouver) le Liban, seules quelques routes vers Damas restent dangereusement
praticables. Au bout d’une semaine, les morts se comptent déjà par centaines,
les blessés par milliers et les réfugiés par centaines de milliers.
Vingt ans de guerre reviennent à la surface, mais les règles du “jeu” ne sont plus les mêmes. Les Libanais doivent réapprendre
à survivre avec encore une fois des paramètres différents. Leur gestion de l’éphémère, leurs réflexes de l’immédiat
leur permettent de s’adapter, dans l’urgence, à cette nouvelle guerre. Une fois les ressortissants étrangers évacués
grâce au secours de leurs ambassades, le peuple se retrouve face à son destin avec un gouvernement suppliant
la communauté internationale de « ne pas laisser tomber le Liban », réclamant des couloirs humanitaires pour affronter
les couloirs de la mort… Sans oublier les séquelles humaines, psychologiques, non quantifiables.
Un cessez-le-feu interviendra un jour. L’heure sera au bilan et à un programme de reconstruction. Qui assurera un retour
décent aux réfugiés ? Qui paiera la reconstruction des zones sinistrées ? Quel sera le prix politique des aides financières
? Viendront-elles du G8, de l’Union européenne, ou des producteurs de pétrole (sunnites ou chiites) ? Le Liban
de demain aura la couleur de ses partenaires “reconstructeurs”.
Les ponts, les aéroports,
le port de Beyrouth,
des stations électriques,
des centraux téléphoniques,
des usines vitales sont mis hors
d’usage, des millions de dollars
partent en fumée
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