Un événement de l’ampleur de
Paris III est censé bouleverser un
pays tout entier pendant des
années et des années. Qu’on en juge :
les plus grands pays du monde se sont
réunis au chevet du Liban pour annoncer
leur volonté de lui injecter plus de sept
milliards de dollars, soit l’équivalent d’un
tiers de la taille de son économie. Bien
des États endettés ou en voie de développement
en rêveraient. Pourtant, le sentiment
qui domine n’est pas l’enthousiasme.
Paradoxalement, la plupart des
Libanais pensent que la conférence ne va
rien changer au cours des choses.
L’actualité politique n’a d’ailleurs pas
tardé à éclipser l’événement en luimême.
Dans les journaux du 26 janvier,
les dérapages confessionnels et le
couvre-feu décrété à Beyrouth le soir
même prenaient parfois le pas sur la
réunion de Paris.
Certes, les milieux économiques savent
l’impact positif que les aides budgétaires
directes vont avoir sur la consolidation
(pour au moins un à deux ans) du système
financier, aussi déséquilibré soit-il. Le gouverneur
de la Banque centrale a de ce point
de vue obtenu ce qu’il voulait de Paris III.
Mais rares sont les Libanais qui mesuraient
la réalité de la menace de crise, tant la
confiance dans le système est bien ancrée.
Pour beaucoup, le sauvetage reste donc du
domaine de l’abstrait.
D’une certaine façon, tout le monde a intégré
la nature purement politique de l’effet
d’affichage de ce chiffre magique : sept
milliards de dollars. D’ailleurs, la thématique
Paris III est vidée de toute substance
économique et sociale dans l’arène politique.
La bataille des campagnes publicitaires
sur le sujet en témoigne : Paris III est
un concept. On est pour ou contre, sans
vraiment aller au-delà.
Que faire de l’argent promis ? Le gouvernement
a-t-il la capacité de mettre
en oeuvre les projets pour lequel le
financement est assuré ? Quelles sont
les réformes prioritaires ? Comment
répartir les coûts inhérents à toute opération
de restructuration ? Le débat est,
au mieux, esquissé.
Pourtant, à défaut de s’atteler sérieusement
à ces questions fondamentales, le
Liban risque une nouvelle fois de rater
une occasion inespérée.
La thématique Paris III
est vidée de toute
substance économique
et sociale
dans l’arène politique
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