La crise dure depuis des mois. Elle a pris une nouvelle tournure, s’est approfondie, depuis la constatation de la vacance présidentielle. Elle est politique bien entendu, confessionnelle, régionale, internationale… N’aurait-elle pas aussi une dimension économique et sociale ? Quelles sont donc les forces sociales qui soutiennent tel et tel camp. Où sont les conservatismes ? Les dynamiques de changement ? Des mots comme clientélisme, rente, subvention, chômage… agrémentent le débat public sans liens apparents avec le vocabulaire d’un registre purement politique.
Kamal Hamdan est l’un des seuls économistes à avoir proposé une lecture socio-économique de la guerre de 1975-1990 dans un livre paru pendant la période de la reconstruction. Un travail probablement motivé par la constatation de la permanence de certaines des causes économiques et sociales qui avaient servi de terreau à la violence. Creusement des inégalités, ceintures de misère, dépendance, ascenseur social en panne… tous ces maux continuent de façonner le Liban d’aujourd’hui. « Nous devons faire obédience à un leader, juste pour pouvoir manger », dit un Libanais interrogé par un journaliste français. L’affirmation n’est certes pas généralisable. Mais ne faudrait-il pas regarder de plus près les ressorts purement matériels des allégeances politiciennes les plus radicales ? La déliquescence de l’État n’est pas pour déplaire à tout le monde. Les uns paient moins d’impôts, les autres contrôlent leurs gens à coups de largesses charitables.