C’est devenu une habitude. La boulangère annonce une facture de 2 500 livres quand le pain en vaut 2 400 et le boutiquier du coin réclame sans vergogne 1 000 livres pour une barre chocolatée qu’il a lui-même tarifée à 800 livres ! Les piécettes de monnaie sont des bêtes curieuses ; indignes des clients qui s’aventureraient à les réclamer. Payer avec des pièces de 100 livres, quelle idée ? Sans parler de celles de 50 ou 25 livres que la Banque centrale a eu la mauvaise idée d’émettre au moment de l’introduction de la TVA au Liban : personne n’en a voulu et elles sont devenues des pièces de musée.
Cette menue monnaie qu’il est du plus grand chic de dédaigner a pourtant de la valeur. Surtout si on l’additionne aux autres “arrondis” qui pullulent dans le circuit monétaire libanais : les paiements à l’État, les factures de téléphone calculées à la minute au lieu de la seconde, les conversions du dollar à 1 500 livres au lieu de son taux officiel, légèrement plus élevé, etc. Personne n’y fait vraiment attention, pourtant ces pratiques assimilables au droit de seigneuriage représentent quelques millions de dollars au niveau national, rien que cela. Qui en profite ? L’État qui compense en partie l’effet de la planche à billet qu’il a fait fonctionner ; mais aussi tous ces commerçants et autres sociétés qui vous arnaquent avec le sourire.