L’immobilier a toujours été le dada favori des Libanais. Il faut dire que la majorité des fortunes du pays y sont liées. Pas un lopin de terre de nos 10 452 kilomètres carrés que son propriétaire ne considère pas comme un jackpot potentiel. L’absence d’urbanisme en est la raison principale : tout ou presque est constructible. Avec le quasi-doublement des prix l’année dernière à Beyrouth, il est presque impossible d’acquérir un logement neuf à moins d’un demi-million de dollars. Quant à l’ancien, il s’aligne sur cette nouvelle grille. De quoi perdre la tête quand on est acheteur. Quel salaire libanais peut-il bien financer ces acquisitions ? Les agents immobiliers expliquent que le marché est surtout destiné à une clientèle non résidente. C’est-à-dire une clientèle dont le revenu est déconnecté du niveau de vie local. Les immeubles s’additionnent donc et leurs volets restent fermés l’essentiel de l’année. Des montants considérables sont en jeu et la rationalité loin d’être au rendez-vous. Suivant l’humeur du vendeur, un appartement ou une parcelle de taille comparable sont tarifés avec des différences de 30 à 50 %. Certains en arrivent parfois à proposer le mètre carré plus cher en banlieue que dans des quartiers résidentiels de la capitale. Car il n’y a bien entendu pas d’argus immobilier. Aucune cote objective quartier par quartier. Tout est à l’avenant. Y compris la dimension réelle des biens : la coutume consiste à tout facturer, y compris l’épaisseur des murs. Tandis que sur les registres cadastraux, les surfaces mentionnées sont soit sous-estimées, soit surestimées, suivant l’intérêt qu’y trouvent les propriétaires. Il serait temps de professionnaliser le secteur. Les services de l’État pourraient par exemple sans trop d’effort publier des statistiques éclairantes pour les vendeurs et les acheteurs. Car à miser sur des illusions on risque parfois de se faire très mal.