Les estimations sont impressionnantes. Si le flux de réfugiés syriens entrant au Liban ne diminue pas, ces derniers représenteront la moitié de la population libanaise à la fin de l'année prochaine ! Le phénomène atteint une telle ampleur que le stade des sonnettes d'alarme est largement dépassé. On en est à l'état d'urgence. Sauf que, paradoxalement, le Liban officiel a beau réclamer l'aide de la communauté internationale, notamment à la tribune des Nations unies, on ne le sent nullement mobilisé. Il assiste impuissant, comme à son habitude, au gonflement du problème sans l'analyser, sans établir de stratégie pour y faire face et, a fortiori, sans mettre en œuvre la moindre politique. Tout est laissé à l'initiative du privé ou des organisations humanitaires, de la plus petite association caritative aux grands acteurs comme le HCR. Dans son rapport publié en septembre destiné à évaluer l'impact de ce choc sur le Liban, la Banque mondiale conclut que l'aide financière internationale pourrait contribuer à l'atténuer ajoutant qu'une autre façon de le faire consisterait à mettre en œuvre les réformes destinées à améliorer l'efficacité des prestations des services publics. La recommandation pourrait sembler ironique tant cette rengaine a perdu de son impact. L'État libanais, c'est bien simple, n'a aucune velléité de réforme ou de programme d'action quelconque. Et à ce stade, ce qui est le plus frappant ce n'est pas tant l'immobilisme des autorités que la capacité de résistance et d'adaptation de la société libanaise, sa souplesse exceptionnelle. Il suffit pour s'en convaincre d'imaginer l'effet que produirait sur n'importe quel pays l'arrivée sur son territoire d'une population équivalente au tiers de la sienne.