L’administration fiscale a-t-elle le droit de percevoir des impôts auprès des contribuables libanais ? La réponse est non, selon un groupe de personnalités publiques libanaises qui ont présenté un recours en ce sens devant le Conseil d’État, réclamant l’annulation de décisions administratives et l’adoption de mesures préventives pour surveiller et contrôler la disposition des biens publics*. Le raisonnement est simple : en démocratie, l’autorisation de collecter des revenus fiscaux et de procéder à des dépenses publiques est donnée expressément par les représentants élus du peuple. Pour la plupart des politologues et des historiens du droit, ce principe du consentement à l’impôt, tel que consacré par la Magna Carta britannique (1215), la déclaration d’indépendance des États-Unis d’Amérique (1776) ou la Déclaration des droits de l’homme ou du citoyen (1789), constitue même la pierre angulaire – si ce n’est la raison d’être – du système parlementaire. Or depuis 2005, le Liban fonctionne sans loi de finances autorisant la collecte des ressources publiques et leur allocation pour l’année en cours. On peut donc considérer que le contrat social liant l’État et le peuple sur lequel est fondée sa légitimité est rompu depuis cette date. Et que la démocratie libanaise a tout simplement cessé d’exister en droit, si ce n’est en fait. Poser clairement ce diagnostic aurait le mérite de dépasser le simulacre institutionnel qui nous est proposé, pour redonner une légitimité à un État dont la faillite est chaque jour un peu plus flagrante. En attendant la décision du juge, les auteurs du recours invitent chaque citoyen à déposer le montant de ses impôts auprès d'un notaire en attendant que leur collecte soit à nouveau légalisée.
* Recours présenté le 10 septembre 2014 par Hussein Husseini, Élias Saba, Ghassan Moukheiber, Charbel Nahas et Ghada el-Yafi
* Recours présenté le 10 septembre 2014 par Hussein Husseini, Élias Saba, Ghassan Moukheiber, Charbel Nahas et Ghada el-Yafi