Un article du Dossier
Le luxe mise sur un regain de confiance
Face à la baisse du marché mondial, l’industrie du luxe s’interroge sur l’évolution des modèles de consommation. Le Liban suivra-t-il les tendances ?
Pour la première fois depuis huit ans, le marché mondial des produits de luxe devrait terminer l’année en baisse de 1 % à taux de change constant, selon l’étude annuelle du cabinet Bain and Company. Les produits personnels – maroquinerie, mode, horlogerie, joaillerie et parfums et cosmétiques de marque – devraient représenter un chiffre d’affaires de 249 milliards d’euros en 2016, contre 253 milliards pour l’année 2015. L’étude menée en partenariat avec la Fondation Altagamma, qui réunit les grands noms du luxe italien, impute ces résultats aux variations de taux de change, au ralentissement des économies émergentes et aux attaques terroristes – qui ont frappé des villes synonymes de boutiques de luxe comme Paris et Nice, et qui ont eu un impact sur la confiance des consommateurs et les flux touristiques.
Même si le cabinet table sur une reprise dès l’année prochaine, avec une croissance annuelle prévue de 3 à 4 % à partir de 2017, cette mauvaise performance a poussé l’industrie à s’interroger sur son avenir. Au moment de l’annonce des principaux résultats de l’étude, en octobre dernier, le président de la Fondation Altagamma, Andrea Illy, a évoqué des « changements historiques », et prôné « un changement et une adaptation du modèle » des groupes du luxe.
Parmi les changements identifiés, l’évolution du profil des clients, dont la moitié sont désormais issus de la génération Y, qui correspond aux personnes nées approximativement entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990. Cette génération, qui a grandi à l’ère du numérique, a des valeurs et un mode de consommation différents. « Elle est moins attachée à la marque, et plus sensible aux effets de mode, explique la responsable du programme de management du luxe à l’Ecole supérieure des affaires (ESA), Cheryl Matar. Le Liban n’échappe pas à la tendance mondiale des “fashionista”, comme en témoigne l’émergence des blogueuses de mode », ajoute-t-elle.
Conséquence de cette évolution, les ventes des magasins monomarques ont baissé de 23 % à l’échelle mondiale. Au pays du Cèdre, le principal acteur du secteur, le groupe Aïshti a dès le départ opté pour un concept multimarques avant de développer son réseau de boutiques en noms propres. Mais il continue de proposer, au sein de ses centres commerciaux, des espaces consacrés aux différentes marques, qui reprennent les codes définis par la maison mère. « Les relations entre les maisons-mères et les agents libanais sont très fortes, souligne Cheryl Matar. Dans la majorité des cas, les grandes lignes stratégiques sont imposées par les maisons-mères. En revanche, il y a une émergence de nouvelles boutiques multimarques qui ont développé une identité propre et une politique d’achat originale qui leur permet même d’exporter leur concept. »
Autre conséquence de l’évolution de la clientèle, l’émergence du commerce en ligne. Selon Bain, le e-commerce a augmenté de 26 % ces trois dernières années, pour devenir le troisième marché le plus important au monde après les États-Unis et le Japon. Si les groupes de luxe mondiaux commencent à s’y mettre, les agents locaux en revanche tardent à suivre la tendance, se laissant distancer par des plates-formes de commerce en ligne, régionales ou internationales, qui livrent au Liban.
Enfin, l’industrie a constaté une certaine lassitude du modèle de “fast-luxury” et de la “massification” du luxe. « À l’origine, les grandes maisons se distinguaient par un savoir-faire artisanal et la qualité de leur produits, souligne Cheryl Matar. Mais les grands groupes, poussés par des exigences de rentabilité, ont accéléré le rythme, jusqu’à produire entre 6 et 8 collections de prêt-à-porter par an, et développé fortement leurs gammes d’accessoires. »
Dans ce contexte, le consommateur privilégie désormais l’expérience et le service plutôt que le produit lui-même. Preuve en est : les dépenses mondiales de voitures de luxe, d’hôtellerie de prestige et d’œuvres d’art ont augmenté l’année dernière beaucoup plus vite que les produits personnels de luxe. « Il faut replacer le client au cœur de l’activité. Malheureusement, au Liban, à quelques exceptions près, le service est techniquement faible. Il y a une certaine proximité avec la clientèle, mais la plupart des vendeurs n’ont jamais été formés aux codes du luxe. Les groupes de distribution n’investissent pas suffisamment dans les ressources humaines, déjà épuisées par l’émigration. » C’est justement pour réduire « l’écart entre les groupes de luxe au Liban et à l’étranger », ajoute-t-elle, que l’ESA a mis en place il y a six ans une formation sur le management du luxe. Ce programme attire chaque année une quinzaine de professionnels, des employés de groupes de distribution mais aussi des entrepreneurs, des designers, et même des banquiers.
Même si le cabinet table sur une reprise dès l’année prochaine, avec une croissance annuelle prévue de 3 à 4 % à partir de 2017, cette mauvaise performance a poussé l’industrie à s’interroger sur son avenir. Au moment de l’annonce des principaux résultats de l’étude, en octobre dernier, le président de la Fondation Altagamma, Andrea Illy, a évoqué des « changements historiques », et prôné « un changement et une adaptation du modèle » des groupes du luxe.
Parmi les changements identifiés, l’évolution du profil des clients, dont la moitié sont désormais issus de la génération Y, qui correspond aux personnes nées approximativement entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990. Cette génération, qui a grandi à l’ère du numérique, a des valeurs et un mode de consommation différents. « Elle est moins attachée à la marque, et plus sensible aux effets de mode, explique la responsable du programme de management du luxe à l’Ecole supérieure des affaires (ESA), Cheryl Matar. Le Liban n’échappe pas à la tendance mondiale des “fashionista”, comme en témoigne l’émergence des blogueuses de mode », ajoute-t-elle.
Conséquence de cette évolution, les ventes des magasins monomarques ont baissé de 23 % à l’échelle mondiale. Au pays du Cèdre, le principal acteur du secteur, le groupe Aïshti a dès le départ opté pour un concept multimarques avant de développer son réseau de boutiques en noms propres. Mais il continue de proposer, au sein de ses centres commerciaux, des espaces consacrés aux différentes marques, qui reprennent les codes définis par la maison mère. « Les relations entre les maisons-mères et les agents libanais sont très fortes, souligne Cheryl Matar. Dans la majorité des cas, les grandes lignes stratégiques sont imposées par les maisons-mères. En revanche, il y a une émergence de nouvelles boutiques multimarques qui ont développé une identité propre et une politique d’achat originale qui leur permet même d’exporter leur concept. »
Autre conséquence de l’évolution de la clientèle, l’émergence du commerce en ligne. Selon Bain, le e-commerce a augmenté de 26 % ces trois dernières années, pour devenir le troisième marché le plus important au monde après les États-Unis et le Japon. Si les groupes de luxe mondiaux commencent à s’y mettre, les agents locaux en revanche tardent à suivre la tendance, se laissant distancer par des plates-formes de commerce en ligne, régionales ou internationales, qui livrent au Liban.
Enfin, l’industrie a constaté une certaine lassitude du modèle de “fast-luxury” et de la “massification” du luxe. « À l’origine, les grandes maisons se distinguaient par un savoir-faire artisanal et la qualité de leur produits, souligne Cheryl Matar. Mais les grands groupes, poussés par des exigences de rentabilité, ont accéléré le rythme, jusqu’à produire entre 6 et 8 collections de prêt-à-porter par an, et développé fortement leurs gammes d’accessoires. »
Dans ce contexte, le consommateur privilégie désormais l’expérience et le service plutôt que le produit lui-même. Preuve en est : les dépenses mondiales de voitures de luxe, d’hôtellerie de prestige et d’œuvres d’art ont augmenté l’année dernière beaucoup plus vite que les produits personnels de luxe. « Il faut replacer le client au cœur de l’activité. Malheureusement, au Liban, à quelques exceptions près, le service est techniquement faible. Il y a une certaine proximité avec la clientèle, mais la plupart des vendeurs n’ont jamais été formés aux codes du luxe. Les groupes de distribution n’investissent pas suffisamment dans les ressources humaines, déjà épuisées par l’émigration. » C’est justement pour réduire « l’écart entre les groupes de luxe au Liban et à l’étranger », ajoute-t-elle, que l’ESA a mis en place il y a six ans une formation sur le management du luxe. Ce programme attire chaque année une quinzaine de professionnels, des employés de groupes de distribution mais aussi des entrepreneurs, des designers, et même des banquiers.