Le jeu habituel des rumeurs a laissé croire un moment que la reconduction de Riad Salamé au poste de gouverneur de la Banque centrale pour six années de plus n’était pas assurée. En réalité, s’il y a bien une certitude, c’est que les autorités libanaises sont devenues les otages – et les Libanais avec – d’un système monétaire et financier dont elles perçoivent de plus en plus les risques, mais dont elles sont incapables de sortir. Comme, en outre, de l’aveu unanime des laudateurs et des détracteurs du gouverneur en place depuis 1993, ce dernier est passé maître dans l’art de préserver cette fameuse “confiance” en vertu de laquelle des milliards de dollars continuent de maintenir à flots le radeau Liban qui prend l’eau de toutes parts, et ce quel qu’en soit le coût ; il n’y avait pas d’alternative véritable à sa reconduction. Lui trouver un successeur sans changer de politique économique et budgétaire aurait été suicidaire. Changer de politique économique et budgétaire est de toute évidence hors de portée d’une classe politique dont l’unique horizon est son propre maintien au pouvoir, comme en témoigne le débat sans fin sur la révision du découpage électoral et du mode de scrutin. C’est pourtant à ce changement qu’aspirent les Libanais, ainsi qu’à la reconquête de l’économie par le politique, c’est-à-dire au retour de la démocratie comme expression de la souveraineté du peuple*. Déjà, en prévision des législatives, les nombreux mouvements contestataires qui bourgeonnent sur la scène politique ont remis la question économique et sociale au centre de leur programme et/ou de leur argumentaire. C’est un premier pas.
*Cette formulation est empruntée à la chronique de Natacha Polony dans “Le Figaro”.
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