Vivre comme s’il n’y avait pas de lendemain, c’est ce que fait le Liban depuis des années. Cela vaut autant pour l’État que pour ses citoyens. Pendant que les gouvernements dépensaient sans compter, les citoyens aussi vivaient au-dessus de leurs moyens. Aujourd’hui, ce n’est pas l’État seulement qui est endetté, c’est toute l’économie qui chaque année doit emprunter de l’argent de l’extérieur pour soutenir son train de vie.
Le fait de s’endetter n’est pas grave en soi. Le problème est que les fonds, empruntés essentiellement à la diaspora, n’ont pas été utilisés pour développer la capacité de production du Liban à long terme, et donc sa capacité de remboursement. Les capitaux, payés très chers, ont été gaspillés en consommation et projets immobiliers qui ne permettent en rien d’améliorer la solvabilité fondamentale du pays. Le même raisonnement s’applique à la dette de l’État, qui n’a servi qu’à remplir les poches des politiciens, enrichir leurs copains et acheter les voix des électeurs.
La chance du Liban est d’avoir des créanciers essentiellement libanais, et donc foncièrement optimistes. Mais aussi patriotiques soient-ils, les déposants de la diaspora commencent à douter de la capacité de la mère patrie à veiller sur leur épargne. Faut-il attendre qu’ils perdent espoir et laissent le pays s’effondrer, ou peut-on encore les retenir ?
Il est temps de faire les comptes. La question est de savoir qui va payer la facture. Le pays tout entier devra sans doute se serrer la ceinture. Mais les différentes catégories de la population seront-elles équitablement mises en contribution ? Faut-il faire payer davantage ceux qui en ont les moyens, ou répartir la charge sur le plus grand nombre ? Des choix éminemment politiques devront être faits, et ils seront probablement douloureux. Mais c’est le prix à payer pour des lendemains qui, un jour peut-être, chanteront.