Les agences de notation internationales, dont les trois plus grandes sont américaines, ont souvent été critiquées pour leur rôle dans les crises économiques à travers le monde, notamment celle des dettes européennes en 2012. Mais leurs rapports sont toujours religieusement suivis. Lorsqu’elles jugent qu'une dette devient insoutenable, les répercussions sont en général immédiates : les marchés s’affolent et l’État émetteur est contraint de prendre des mesures drastiques pour rassurer les investisseurs.
Dans le cas du Liban, la dégradation de la note souveraine par Moody’s en janvier, puis par Fitch fin août, n’a pas provoqué de séisme, car la dette est majoritairement détenue par des institutions locales (les banques et la Banque du Liban). Cette particularité préserve le Liban de la volatilité des marchés, mais renforce aussi le risque d’une crise systémique.
La solvabilité de tout le secteur bancaire dépend de celle de l’État, dont il est le principal créancier. Pour rassurer leurs actionnaires et leurs clients, les banques devront donc renforcer leur capitalisation et réduire leur portefeuille de crédits, étranglant un peu plus une économie déjà en détresse.
En parallèle, les fonds d’investissements étrangers qui détiennent des eurobonds libanais voudront sans doute s’en délester. Pour éviter une forte dépréciation des titres, la Banque centrale pourrait être contrainte de les acheter en puisant dans ses réserves en devises, déjà drainées par les besoins de financement de l’État, qui ne peut plus se tourner vers les marchés. Or la baisse des réserves érode un peu plus la confiance dans la livre libanaise.
Le gouvernement pourra-t-il sortir le pays de ce cercle vicieux ? S&P est la seule agence à lui avoir accordé un sursis de quelques mois, mais sans trop y croire.