Finalement, le coronavirus aura représenté une trêve bienheureuse pour le gouvernement, et les partis politiques, qui se sont même refait une virginité sur le dos du virus : l’un mettant son personnel soignant au service supposé des Libanais, l’autre aspergeant les rues de son fief régional de détergent. Un article du Washington Post résumait bien l’euphorie des élites du pays, que l’Occident récompensait même d’un satisfecit global pour son action contre la pandémie. « Le Liban est dans un énorme pétrin, mais sur le front du coronavirus, il fait quelque chose de bien », titrait ainsi le quotidien américain.

Le problème, c’est que derrière ce bilan positif dans la lutte contre l’épidémie, ces mêmes élites se débattaient sur le seul front qui compte : l’économie et le social. Pendant qu’on parlait de “bail-in”, de recapitalisation des banques et de “haircut” sur les dépôts, les très nombreux Libanais qui ne se sentent pas concernés par ces problématiques étaient en ébullition. «On crève de faim», hurlaient les manifestants, qui sont retournés dans la rue, corona ou pas. Prévisible, cette bouffée de colère pourrait enflammer l’ensemble du Liban. Pour gagner la paix sociale, les Romains promettaient du “pain et des jeux”. Aujourd’hui, les Libanais ne sont pas d’humeur joueuse. Quant au pain, il pourrait bientôt devenir un produit de luxe.


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