En 2017, l’économiste Toufic Gaspard avait dénoncé les ingénieries financières de la BDL dans une étude qui lui avait valu, à l’époque, de nombreuses critiques. Trois ans plus tard, il revient à la charge en soulignant la responsabilité de la Banque du Liban et des banques dans l’effondrement du système bancaire. Entretien.
Dans votre dernière étude, publiée par la Maison du Futur et l’Institut Konrad Adenauer, vous dites qu’il faut distinguer entre la crise de change et la crise bancaire. Pourquoi ?
L’effondrement simultané de la livre libanaise et du système financier est sans précédent, mais ces deux crises sont distinctes et ont des causes différentes. Preuve en est : dans les années 1980, la livre s’est effondrée, mais le secteur bancaire est resté solide.
Les gouvernements successifs sont responsables de la dépréciation de la livre, car l’État s’est endetté pour financer ses dépenses courantes – hypertrophiées par les recrutements clientélistes et les projets personnels et politiques – plutôt que des dépenses d’investissements. Celles-ci n’ont représenté que 8 % des dépenses publiques de 1993 à 2019.
La crise du secteur bancaire, en revanche, découle des politiques menées par la Banque du Liban et les banques commerciales, qui sont aujourd’hui légalement et comptablement en faillite. Cette faillite est d’ailleurs peut-être l’une des plus impor