Boshies, la marque de créateur libanais qui s’est fait connaître grâce à ses Tarboush revisités et ses t-shirts floqués du mot hob (amour en arabe), vient de lancer sa boutique en ligne. Lancée en 2017, Boshies, qui propose une ligne de vêtements et d’accessoires mêlant rétro arabe et modernité, assure être rentable depuis son lancement. Sa transition numérique lui permet aujourd’hui d’amorcer une étape indispensable dans son développement à l’international. En pleine levée de fonds, Boshies vise 300 000 «fresh dollars» pour finaliser sa mutation et envisage d’embaucher trois employés d’ici le premier trimestre 2021.
«Le ratio Liban/international est aujourd'hui de 80/20 de notre chiffre d’affaires et nous souhaitons inverser la tendance d'ici quatre ans et atteindre à 40/60. Vendre en ligne revient à mettre fin à un embargo : nous avons désormais accès aux quatre coins de la planète», se félicite Élias El Haddad, fondateur de la marque. Boshies travaille avec la startup libanaise Wakilni pour la livraison au Liban et avec la société de transports internationale Aramex pour l’étranger.
Se lancer en ligne en pleine crise bancaire n’aura pas été une mince affaire. L’entreprise a d’abord rencontré des difficultés au niveau de l’ouverture d’un compte bancaire, puis du paiement en ligne : «Les entreprises locales prenant des commissions particulièrement élevées sur le fresh money, nous avons dû nous tourner vers des solutions moins chères basées dans d’autres pays arabes», explique Élias El Haddad.
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Par ailleurs, si la dévaluation de la livre a permis au «made in Lebanon» de gagner en compétitivité, l’environnement commercial libanais n’est pas pour autant devenu plus favorable pour les entreprises qui visent l'export. «La mauvaise connexion internet a constitué un véritable obstacle, en plus des tarifs mal négociés pour la livraison à l’étranger, qui restent très élevés pour des produits aux prix abordables comme les nôtres», liste le créateur, entre autres difficultés.
La crise, une opportunité pour les marques locales
La marque a en outre été touchée par la grave crise que traverse le commerce : «Fermeture des points de vente partenaires, rareté des matières premières, restrictions bancaires, inflation qui ronge nos marges… L’année ne nous a pas épargnés», reconnaît le créateur.
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Mais Boshies a réussi à tirer son épingle du jeu grâce à un modèle de développement flexible, qui s’appuie sur la sous-traitance et le freelancing. La marque repose en effet sur un réseau d’une vingtaine de créateurs et de fabricants locaux. La décision de produire en grande partie localement lui a aussi permis de tirer avantage de la dépréciation de la monnaie nationale et de gagner en compétitivité sur le marché local. «Nous importons seulement le tissu de l’étranger. La confection et le design sont en revanche réalisés sur place», explique-t-il. Ainsi, si la marque a dû tout de même ajuster ses prix en livres, – elle applique aujourd’hui un taux de change de 3500 livres libanaises pour un dollar – ses tarifs restent toujours été en dessous du cours du billet vert (qui dépasse les 8000 LL pour un dollar au marché noir), contrairement aux marques étrangères. «C’est l’occasion pour les marques libanaises de gagner des parts de marché», affirme Élias El Haddad.
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Des perspectives qui poussent le créateur à vouloir rester au Liban, malgré la crise. «Il existe toute une génération d'entrepreneurs et de créatifs libanais qui veulent faire avancer les choses et je reste optimiste quant aux perspectives de changements et de renouvellements qui attendent notre pays».