Le tourisme a toujours eu un halo magique au Liban. Un investisseur lambda pris au hasard dans les “pagesjaunes.com.lb” a toutes les chances de caresser dans son for intérieur le rêve inavoué de construire – et de régner en maître sur un hôtel. Il a beau faire des profits confortables dans son usine de carton ondulé ; on lui a beau asséné que remplir des chambres d’hôtel est généralement plus problématique : il ne peut toujours pas se défaire de cette idée fixe. Parce que c’est quand même une carte de visite autrement plus prestigieuse.
Notre dossier sur le tourisme (pp. 42-65) n’y changera rien. Certains rétorqueront d’ailleurs “tant mieux”, car, disent-ils, le Liban a un énorme “potentiel” touristique. “Potentiel” : ce mot qu’on utilise en parlant d’un élève recalé, pour consoler sa mère éplorée. Mais c’est pas si bête en fin de compte que de croire à ce potentiel, surtout en voyant toutes ces chaînes internationales qui s’implantent ici. Sauf que les professionnels que nous avons interrogés ont eu cette idée incongrue que le tourisme, pour bien fonctionner, on doit lui assurer les ingrédients nécessaires. Et la liste est longue : visas, promotion, contrôles, compétences, environnement, stratégie, organisation… et même prostitution – à l’image de ce qui se passe dans des pays officiellement plus puritains ! Il faut avouer ici qu’on n’est quand même pas à un péché près dans nos contrées.
En réalité, on n’est vraiment plus dans une position à choisir dans quel bordel on va finir nos jours. Surtout quand il y a une majorité qui croit toujours que la livre va être lâchée dans la nature (notre sondage CDL-Ipsos Stat p. 24), alors qu’on n’arrête pas de nous expliquer patiemment que cela n’arrivera j-a-m-a-i-s. Deux explications possibles à ce paradoxe : soit qu’on est en train de nous injecter en intraveineuse des contes de fée au petit déjeuner ; soit que la population cultive encore cette fâcheuse manie de se croire plus futée que les responsables. La question reste ouverte.
Bien sûr, personne ne souhaite en arriver là. D’ailleurs on se démène, sur le fil du rasoir, pour sauver les meubles. On ne sait toujours pas, à l’heure qu’il est, si la résiliation des contrats cellulaires rentre dans ce cadre. Mais en observant l’itinéraire de presque tous les contrats publics de ces dernières années, on ne peut s’empêcher de faire la constatation suivante. En gros, si un investisseur souhaite construire ou exploiter un domaine public libanais, soit il perd de l’argent et il sort tout seul, soit il en gagne et on le fait sortir. Il n’est pas nécessaire que cet investisseur soit étranger, mais ça aide.
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