En visite à Beyrouth pour explorer les possibilités d’expansion de Vodafone dans le pays, Grahame Maher, PDG de la filiale Moyen-Orient du géant des télécoms, estime que le retard du Liban dans le secteur le place paradoxalement en « très bonne position de départ » pour la définition de sa stratégie future. Il recommande que l’État conserve la propriété majoritaire des infrastructures et confie au secteur privé le soin de commercialiser des services innovants à des prix compétitifs, un modèle qu’il a été chargé de tester au Qatar. « Nous y avons expérimenté une nouvelle façon de faire que nous envisageons d’étendre ensuite à des pays dont le marché est beaucoup plus complexe, comme en Europe par exemple, mais aussi au Moyen-Orient. Et nous sommes d’ores et déjà en mesure de dire que c’est un succès », précise Maher, dont le nom est d’origine irlandaise et n’a rien à voir avec l’arabe.
Par infrastructures, il entend celles de la téléphonie mobile et fixe et celles d’Internet, car la distinction des trois branches du secteur n’a plus de sens aujourd’hui : « 60 % de nos abonnés au Qatar accèdent à Internet à travers leur mobile », explique-t-il dans un entretien exclusif accordé au Commerce du Levant.
L’expérience à ce jour dans le secteur des télécoms montre que « le surinvestissement des sociétés privées dans les actifs a placé la concurrence au niveau des réseaux au lieu de la placer à celui des services, explique Grahame Maher. Sans compter que pour des groupes de taille mondiale, comme Vodafone, il arrive un moment où l’allocation de capital doit se faire par ordre de priorité, ce qui peut être au détriment de petits pays, ou de pays à risques, alors que notre objectif est d’étendre notre service partout dans le monde ».
Comme pour les routes ou les aéroports, ou toute infrastructure dont l’intérêt est stratégique pour un pays, cela a beaucoup plus de sens que l’État conserve tout ou partie de la propriété des infrastructures télécoms, explique Grahame Maher. Il appelle cette infrastructure la “couche neutre” du secteur, car elle permet aux acteurs privés, situés dans la “couche active”, de se faire la concurrence sur ce qui intéresse vraiment le consommateur, à savoir l’innovation, les prix et la qualité du service.
« Cependant, comme le choix des investissements doit relever du secteur privé, il est préférable que ce dernier ait une part de la propriété des infrastructures, même minoritaire. »
Au Qatar, Vodafone a une joint-venture à 51/49 avec la Qatar Foundation qui appartient au gouvernement. Cette joint-venture, baptisée Vodafone Qatar, a 45 % de la société cotée à la Bourse de Doha, sachant que d’autres entités gouvernementales en détiennent 15 %. « La structure signifie que le gouvernement est le propriétaire majoritaire des actifs, sachant que le contrat de management nous octroie le contrôle total de la gestion, y compris le contrôle du conseil. Le modèle s’apparente à celui qui est pratiqué dans le secteur de l’hôtellerie dans lequel les opérateurs sont rémunérés sur la base de commissions de gestion, la propriété des bâtiments leur revenant rarement. Dans les télécoms, il fonctionne très bien : il protège les actifs-clés du pays tout en lui faisant bénéficier de la dimension globale de Vodafone, de son pouvoir d’achat, de sa marque mondiale et de son savoir-faire. »
« En sept mois, 30 % de la population s’est abonnée à Vodafone Qatar, soit environ 500 000 personnes, et l’entreprise sera rentable au bout d’un an, ce qui en fait le plus grand succès pour une start-up au Moyen-Orient et l’un des plus grands succès de l’histoire de Vodafone. » Vodafone en chiffres
Le groupe Vodafone a obtenu sa première licence mobile en 1982 au Royaume-Uni.
Il comptait 323 millions de clients au 30 septembre 2009 ; et affichait un chiffre d’affaires de 21,761 milliards de livres sterling au premier semestre 2009 se terminant le 30 septembre ; avec un excédent brut d’exploitation (EBITDA) de 7,455 milliards de livres sterling.
Grahame Maher, Vodafone : « L’État devrait conserver la propriété des actifs télécoms »
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