Un article du Dossier
Les investisseurs libanais en Irak dans l’expectative
Après des années d’embargo et de guerre, l’économie irakienne était en train d’amorcer un redressement fragile, mais la nouvelle dégradation sécuritaire combinée à l’absence de réformes structurelles du gouvernement Maliki risque de mettre en péril la reprise de la croissance.
En mars dernier, le FMI avait évalué la croissance du PIB irakien en 2014 à 6 %, en estimant que la production de pétrole pourrait atteindre 3,2 millions de barils par jour. En février, la production avait encore montré des signes très encourageants, dépassant 3,6 millions de barils, un record inégalé depuis plus de trente ans. Mais depuis l’offensive lancée par l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) et d’anciens fidèles de Saddam Hussein dans le nord du pays, la croissance pour l’année 2014 s’annonce plus qu’incertaine. L’économie irakienne reste en effet largement tributaire de la production d’hydrocarbures, qui représente près des deux tiers de son PIB, environ 95 % des ressources budgétaires et près de 100 % de ses recettes en devises. C’est d’ailleurs dans ce secteur que les investissements étrangers sont les plus importants. L’Irak possède la quatrième réserve mondiale de pétrole, avec 143 milliards de barils. Ce n’est donc pas un hasard si depuis début juin, les centres d’extraction et de commerce du pétrole figurent parmi les zones les plus disputées, en témoigne la récente attaque des combattants de l’EIIL de la raffinerie de Baiji, la plus importante du pays – entre Mossoul et Tikrit – qui approvisionne notamment Bagdad et plusieurs provinces du Kurdistan en carburant. Les conséquences ne se sont pas encore fait sentir sur les exportations pétrolières irakiennes, Mossoul et la région de Ninive, sous le contrôle de l’EIIL ne représentant qu’environ 10 % de la production irakienne. Dans ces zones, les exportations sont déjà à l’arrêt depuis mars, suite à l’attaque par les jihadistes du principal oléoduc qui relie l’Irak à la Turquie. L’inquiétude des marchés internationaux générée par l’avancée des jihadistes a d’ailleurs fait flamber les cours du brut – ceux-ci atteignant leur plus haut niveau depuis neuf mois – avant finalement de se calmer. Les principaux gisements de pétrole se situent en effet dans le sud du pays, autour de la région de Bassora, majoritairement chiite et jusqu’à présent protégée des attaques de l’EIIL. La région de Kirkouk contient, elle, les deuxièmes gisements les plus importants du pays, environ 30 % de ses réserves énergétiques, soit 45 milliards de barils d’or noir et de 3 000 à 6 000 milliards de mètres cubes de gaz. Brièvement contrôlée par les combattants de l’EIIL, Kirkouk et ses environs ont été repris à la mi-juin par les pershmergas kurdes. Le conflit qui oppose depuis plusieurs années le gouvernement central de Bagdad et le Kurdistan sur l’exploitation des champs pétrolifères de cette région pourrait ainsi trouver un épilogue plus rapidement que prévu, et amputer le budget fédéral irakien des recettes d’exportations pétrolières issues de ces gisements.
De nombreux défis attendent l’économie irakienne
Hormis les hydrocarbures, la croissance irakienne a été tirée en 2013 par la consommation, notamment grâce à la revalorisation des salaires et la subvention de produits de première nécessité. L’Irak a aussi pu compter sur une aide massive des grandes institutions financières internationales, comme le FMI ou la Banque mondiale, et de la communauté internationale, pour soutenir son économie. Les ratios d’endettement publics de l’Irak sont restés acceptables grâce à l’annulation du stock de la dette de 2004 et au rééchelonnement des prêts consentis plus récemment. La dette publique devrait s’établir autour de 15 % du PIB en 2014 contre encore 40,2 % du PIB en 2011. L’inflation devrait aussi rester maîtrisée, à 2,2 % en 2014, contre 3,1 % l’année dernière, selon le FMI. Mais encore une fois, ces estimations restent conditionnées à la situation sécuritaire dans le pays. Si le chaos venait à se prolonger, les investisseurs étrangers pourraient être plus réticents à investir en Irak, notamment dans le secteur pétrolier. Le facteur sécuritaire viendrait s’ajouter à la corruption endémique qui touche déjà le pays : dans le dernier classement de l’ONG Transparency International, l’Irak faisait partie des dix pays les plus corrompus du monde. L’accès aux services de base comme l’eau ou l’électricité pourrait aussi se dégrader en 2014. L’État ne satisfait actuellement que 50 % des besoins en électricité des Irakiens. Le secteur électrique souffre d’une sous-capacité de production, et d’un réseau de transmission et de distribution obsolète. Les carences en électricité pénalisent l’industrie pétrochimique dans le sud du pays et coûteraient au total 40 milliards de dollars à l’économie irakienne. L’accès à l’eau et le traitement des eaux usées constitue un autre défi de taille pour le gouvernement irakien. Selon l’ONU, seulement 20 % de la population aurait accès à un système d’égouts efficace. L’agriculture, autrefois point fort de l’économie irakienne, traverse également depuis dix ans une période de grandes difficultés. En 2014, plus d’un Irakien sur cinq vit encore sous le seuil de la pauvreté et le taux de chômage stagnerait autour des 15 % depuis 2008, selon les chiffres publiés par la CIA. L’État irakien a bien lancé en septembre 2013 un plan d’investissements sur les quatre prochaines années, en mettant sur la table 357 millions de dollars, afin de soutenir plusieurs secteurs créateurs d’emploi : la construction, l’agriculture, l’énergie, l’éducation, les transports et les télécommunications, mais ces fonds risquent d’être largement insuffisants compte tenu de la reprise des conflits armés ces dernières semaines.
De nombreux défis attendent l’économie irakienne
Hormis les hydrocarbures, la croissance irakienne a été tirée en 2013 par la consommation, notamment grâce à la revalorisation des salaires et la subvention de produits de première nécessité. L’Irak a aussi pu compter sur une aide massive des grandes institutions financières internationales, comme le FMI ou la Banque mondiale, et de la communauté internationale, pour soutenir son économie. Les ratios d’endettement publics de l’Irak sont restés acceptables grâce à l’annulation du stock de la dette de 2004 et au rééchelonnement des prêts consentis plus récemment. La dette publique devrait s’établir autour de 15 % du PIB en 2014 contre encore 40,2 % du PIB en 2011. L’inflation devrait aussi rester maîtrisée, à 2,2 % en 2014, contre 3,1 % l’année dernière, selon le FMI. Mais encore une fois, ces estimations restent conditionnées à la situation sécuritaire dans le pays. Si le chaos venait à se prolonger, les investisseurs étrangers pourraient être plus réticents à investir en Irak, notamment dans le secteur pétrolier. Le facteur sécuritaire viendrait s’ajouter à la corruption endémique qui touche déjà le pays : dans le dernier classement de l’ONG Transparency International, l’Irak faisait partie des dix pays les plus corrompus du monde. L’accès aux services de base comme l’eau ou l’électricité pourrait aussi se dégrader en 2014. L’État ne satisfait actuellement que 50 % des besoins en électricité des Irakiens. Le secteur électrique souffre d’une sous-capacité de production, et d’un réseau de transmission et de distribution obsolète. Les carences en électricité pénalisent l’industrie pétrochimique dans le sud du pays et coûteraient au total 40 milliards de dollars à l’économie irakienne. L’accès à l’eau et le traitement des eaux usées constitue un autre défi de taille pour le gouvernement irakien. Selon l’ONU, seulement 20 % de la population aurait accès à un système d’égouts efficace. L’agriculture, autrefois point fort de l’économie irakienne, traverse également depuis dix ans une période de grandes difficultés. En 2014, plus d’un Irakien sur cinq vit encore sous le seuil de la pauvreté et le taux de chômage stagnerait autour des 15 % depuis 2008, selon les chiffres publiés par la CIA. L’État irakien a bien lancé en septembre 2013 un plan d’investissements sur les quatre prochaines années, en mettant sur la table 357 millions de dollars, afin de soutenir plusieurs secteurs créateurs d’emploi : la construction, l’agriculture, l’énergie, l’éducation, les transports et les télécommunications, mais ces fonds risquent d’être largement insuffisants compte tenu de la reprise des conflits armés ces dernières semaines.