L’équipe recherche du réseau ArabNet lance une nouvelle série de rapports sur l’économie de l’innovation dans les pays de la région, notamment le Liban. Rencontre avec le fondateur et PDG de ArabNet Omar Christidis.
Comment se porte ArabNet depuis sa création en 2009 ?
Notre modèle économique repose essentiellement sur les revenus publicitaires et de sponsoring. Aujourd’hui, même si la situation économique est difficile et les budgets des annonceurs réduits, la priorité reste les nouvelles technologies et l’innovation. Nous sommes rentables depuis la première année et poursuivons notre croissance en réinvestissant chaque année nos bénéfices dans de nouveaux projets.
Pourquoi avoir commencé cette nouvelle série de rapports ?
Tous les gouvernements de la région misent sur l’innovation pour développer et diversifier leurs économies. Or, on essaie de répondre à la question : quel rôle le gouvernement devrait-il jouer ? Où sont les manques à gagner ? Où faut-il allouer des ressources supplémentaires ? Nous avons établi six grands critères et, à partir de ça, on évalue la situation des pays un par un. C’est une source d’informations précieuses qui permettent notamment de faire des comparaisons régionales inédites. Après l’Arabie saoudite et le Liban, le prochain rapport portera sur les Émirats arabes unis.
Certains acteurs privés commencent à publier des rapports sur le secteur de l’innovation au Moyen-Orient à partir des chiffres d’investissement rendus publics, mais je pense que nos données sont les plus précises, car nous les obtenons directement des investisseurs.
Dans les années à venir nous prévoyons de poursuivre notre expansion régionale vers Oman, Bahreïn, l’Égypte et le Maroc. Nous cherchons aussi à jouer davantage un rôle d’intermédiaire entre les grands acteurs d’un secteur et les start-up de ce même secteur via des partenariats comme nous avons fait avec Touch pour lancer un programme dédié aux télécoms. L’idée est de créer des synergies et cela pourrait s’étendre à d’autres secteurs, la banque par exemple.
Quelles sont les principales conclusions du rapport sur le Liban ?
Le rapport souligne d’abord l’importance du soutien institutionnel – notamment via la circulaire 331 de la Banque centrale – qui a permis à l’écosystème libanais de se développer rapidement et d’attirer plus de 100 investissements sur la période 2011-2016. Plusieurs créateurs de start-up ont déjà pu faire des “exits” comme Cleartag, Diwanee ou Shihiya.com.
Les plus gros défis à relever restent la flexibilité des lois et réglementations liées à l’entrepreneuriat et au secteur financier. Un autre point de difficulté est l’accès à des ressources humaines qualifiées. Les disciplines les plus en difficulté sont l’analyse de données, l’expérience utilisateur (UX), l’intelligence artificielle et le design produit. Mais il ne s’agit pas que de compétences techniques, le rapport souligne que 54 % des entrepreneurs ayant participé à l’étude se plaignent du comportement de leurs employés, qui par exemple ne respectent pas les horaires.
Comment se positionne le Liban dans le secteur de la fintech en particulier ?
Le Liban a l’avantage d’avoir un secteur bancaire très développé, on peut utiliser cette force pour devenir leaders en fintech. D’un point de vue pratique toutefois, cela nécessite une réflexion, notamment en termes de régulation. Jusqu’à présent, la Banque centrale a toujours eu une approche assez conservatrice, ce qui a bien sûr permis au pays de maintenir une forme de stabilité économique en temps de crise, mais il faut trouver un cadre qui permette à l’innovation financière de se développer.