On le répète partout : les ressources de la planète s’épuisent et la survie de l’humanité est en jeu. Pour mettre un terme à ce scénario catastrophe, nous devons recycler, réparer et réutiliser les matériaux plutôt que de les jeter après utilisation.
Être un écocitoyen au Liban, est-ce possible ? La réponse est sans équivoque : oui ! Mieux : on en connaît au Liban ! Mais le chemin est plus ardu qu’ailleurs. Pas question, par exemple, de ranger sa voiture au garage et de prendre son vélo. La conduite et le manque de transports publics ne le permettent pas. Quant au recyclage, la pratique semble loin d’être acquise parmi la population faute d’une stratégie nationale qui permette à tous de se sentir concernés.
Pourtant, valoriser ses déchets contribue à réduire notre impact sur la planète dont les ressources renouvelables ont été épuisées pour 2018, le 31 juillet dernier.
Mettre un pied dans l’économie circulaire
Pour s’en sortir, il faut amorcer sa transition écologique et réduire son empreinte écologique. «Ce monde est plus que jamais le fruit de l’addition de nos actes, même les plus infimes», écrit Cyril Dion dans son ouvrage Petit manuel de résistance contemporaine (Actes Sud, 2018). Il s’agit donc de ne plus considérer l’économie comme un cycle allant de la production à l'utilisation à la poubelle. Ce que l’on nomme l’économie linéaire. Mieux vaut chercher un modèle de développement “circulaire” où les matériaux sont recyclés et réemployés selon l’idée que «rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme».
Miser sur le compost maison
Première étape de cette transition écologique : réduire les déchets en décharge. Au Liban, la poubelle (30 litres) d’une famille de quatre personnes se remplit environ tous les deux jours, notamment de restes de nourriture, d’épluchures, etc. Or, les poubelles libanaises se composent de 52% de matières organiques en moyenne dont certains éléments peuvent servir à fabriquer du compost.
Même à Beyrouth, même dans une tour d’Achrafié, on peut s’adonner à l’art du compost. Lieza, néerlandaise, expatriée au Liban depuis un an, produit ainsi un engrais 100 % naturel sur le balcon de son appartement ! «C’est très facile : il suffit de deux pots de plantes de la même taille : dans le premier, on récupère le jus pour ensuite le mélanger à de l’eau. Dans le second, placé à l’intérieur du premier, surélevé et troué, on jette une assez large partie de nos déchets organiques. Pour fermer le tout, un couvercle troué.» Dans son bac, trois lombrics qui grignotent les épluchures. «Il leur faut deux à trois mois seulement pour tout transformer.» Résultat ? Une réduction d’environ 40 % des déchets ménagers.
Valoriser les matières non organiques
S’ils sont propres, les papiers, les journaux ou les cartons peuvent connaître une seconde vie. Revendus à des papetiers comme Sicomo ou Gemayel Frères, ils servent à fabriquer de nouveaux papiers. Mais attention : tous ne sont pas recyclables. Les emballages souillés (comme vos boîtes de pizzas et emballages de chips) ne sont pas recyclables. Aussi, parmi les plus polluants, les mouchoirs en papier et les essuie-tout qu’on trouve sur toutes les tables libanaises. La solution ? Les remplacer par leur équivalent en tissu.
Réduire le plastique...
Le plastique, voilà bien l’ennemi n°1 de l’écocitoyen. Increvable, on en produit dans le monde dix tonnes chaque seconde. En 2017, la production a même augmenté de 4%. Pourtant, son omniprésence a des conséquences désastreuses pour l’environnement et la santé humaine. Au Liban, il représente 10 % des déchets des poubelles et seuls 11,5 % d’entre eux sont recyclés (source : Arcenciel).
On peut les apporter – lavés et propres – à une des associations (voir encadré) qui les transforme et les revend à des industriels locaux ou étrangers en Turquie ou en Syrie.
Lire aussi : Une loi floue pour une urgence nationale
Mais la vraie solution est ailleurs : à défaut d’une législation qui interdirait les plastiques à usage unique (couverts, paille, assiettes, gobelets, cotons-tiges...) au Liban, comme s’apprêtent à le faire les Européens, il faut tenter de réduire leur usage.
On peut ainsi prévoir ses propres contenants pour le déjeuner ou lorsqu’on fait ses courses, emporter des sacs en tissu pour emballer les produits en vrac et préciser, lorsqu’on commande, qu’on ne souhaite pas de couverts en plastique !
Et les non-recyclables
Quant aux verres, aucune grande usine de recyclage n’existe dans le pays. Des initiatives ont été lancées tels Green Glass Recycling, une ONG fondée par Ziad Abichaker qui fabrique des verres recyclés revendus ensuite. Une autre initiative a lieu chez les distributeurs d’alcools, qui collectent les bouteilles dans les bars et les restaurants, mais le mieux reste encore d’éviter l’emploi de trop de verres.
Amis fumeurs, sachez enfin que vos mégots (non biodégradables) peuvent malgré tout connaître une seconde chance : si vous les lui envoyez, Recycle Lebanon les transforme en bancs ou en arrosoir !
Cessez d’acheter, fabriquez !
Fabriquer sa lessive, c’est l’écogeste n° 1 de tous les adeptes de la bonne conscience verte. En d’autres termes, on reprend les bonnes vieilles recettes de grand-mère : on fait chauffer de l’eau, on ajoute du savon “baladi” à l’huile d’olive en paillettes (ou “barech”), du bicarbonate de soude et des huiles essentielles (lavande ou autres). Le tour est ainsi joué : le linge est propre et sent bon. Qui plus est, c’est ultra-économique.
Quant au ménage, votre meilleur allié s’appelle le vinaigre blanc (ou vinaigre d’alcool). Il détartre, nettoie, désinfecte et désodorise, le tout pour environ 1000 livres libanaises le litre.
Économisez des ressources limitées
On vous le répète sans doute depuis votre enfance : préférez une douche au bain ; fermez le robinet lorsque vous n’utilisez pas l’eau. Désormais, c’est aussi la viande qui se trouve dans le collimateur, puisque pour produire un kilo de viande rouge, 15000 litres d’eau sont nécessaires. Parmi les autres gestes à adopter, l’un d’entre eux consiste à refuser le suremballage. «Lorsque je suis au supermarché, je veille à ce que les emballages de mes produits soient recyclables», explique Matthieu, qui recourt aux services de Live Love Recycle pour ses papiers et plastiques.
Lire aussi : Le Liban dilapide son eau
On espère d’ailleurs qu’un jour se déroulera une “Plastic Attack” à Beyrouth – ces opérations où des activistes font leurs courses en abandonnant les emballages plastique dans les supermarchés – pour mieux responsabiliser la grande distribution sur sa surconsommation de plastique. Pour éviter pareille gaspillage, une des grosses tendances est de revenir aux savons, shampooings ou déodorants solides. Bannir le vernis à ongles, la mousse à raser et le maquillage ? On le concède, cela semble plus difficile !
Un défi invisible
Mais le plus gros défi est ailleurs : internet, le “sixième pays” consommateur d’électricité du monde. Netflix, Google et leurs petits amis équivalent à 10 % de la consommation mondiale d’électricité et à 2% des émissions de CO₂ mondiales.
Pour les e-mails (chaque heure 10 milliards d’entre eux sont envoyés), installez Cleanfox, une application qui vous désabonne des newsletters inutiles.
Vous pouvez aussi passer aux moteurs de recherche “ecofriendly” (Ecosia, Lilo ou Ecogine…), qui reversent une partie de leurs gains à des associations de lutte contre le réchauffement climatique ou s’engagent à planter de nouveaux arbres !
À force de persévérance, Hanane, une Libanaise, a libéré sa vie des déchets. «Il m’a fallu deux ans et une grande discipline pour en arriver là, mais aujourd’hui je n’ai presque plus de poubelles. Mon concierge ne passe jamais par chez moi, car il sait qu’il n’y a jamais de sac !» Si elle a réussi, vous le pouvez aussi !
Compost Baladi vous aide à installer votre premier bac à compost. Live Love Recycle recycle papiers, cartons, plastiques et nylons, ainsi que les canettes et les boîtes de conserve à Beyrouth. Spécialisée dans l’intégration des personnes handicapées, Arcenciel a élargi ses activités au recyclage. L’association accepte ces produits (mais nettoyés) dans ses deux branches beyrouthines à Jisrel-Wati et à Jisr el-Bacha, mais aussi à Taanayel et Damour. Installée dans le Metn, Ganatch donne un salaire à des personnes issues de milieux défavorisés dans ses centres de tri et de recyclage. L’écoute récupère papiers, cartons, plastiques, ainsi que les déchets électroniques (ordinateurs, électroménagers…) pour 10 000 livres libanaises par mois. Khalifeh Recyclo travaille dans le sud du Liban et recycle toutes formes de plastiques. Ecoserv est une ONG qui s'occupe du recyclage des déchets électroniques. Vous pouvez déposer vos anciens appareils dans leur entreprise à Jounieh. |