« Quand tu montes à Maasser el-Chouf, tu prends conscience que Dieu existe. » Cette formule de son beau-père, Yolla Noujaim, propriétaire de la maison d'hôte al-Fundok, l'a fait sienne. Le petit village et ses maisons en tuiles rouges donnent en effet une idée de ce qui se fait de mieux au Liban : un paysage de carte postale à 60 kilomètres de Beyrouth, à quelques pas de la réserve des cèdres, et une vue panoramique sur les montagnes de l’Anti-Liban et la plaine de la Békaa. Comme souvent aussi, sa beauté n'a d'égal que la violence qui l’a traversée. Pendant la guerre, le village a été le théâtre d'affrontements entre druzes et chrétiens.
L’histoire entre Yolla Noujaim et le village d’origine de son mari commence au début des années 2000, après la réconciliation politique dans le Chouf. Yolla est alors à la recherche d’un projet qui puisse redonner du sens et de l’espoir à son pays. Avec quelques amis, elle organise un atelier de jardinage destiné aux enfants, pour les sensibiliser aux questions environnementales tout en les poussant à dépasser les clivages religieux : 300 enfants issus de familles druzes et chrétiennes y participent.
En 2005, elle fonde Jabalna, une ONG qui vise à relancer l’économie du village par l’écotourisme. Elle commence par un marché qui réunit les producteurs locaux de 35 villages environnants, puis crée en 2015 la Journée nationale de la dabké, une grande fête qui attire chaque année 12 000 personnes organisée en partenariat avec le ministère de l’Éducation.
Cet été, Yolla Noujaim a concrétisé un autre projet qui lui tenait à cœur : la maison d’hôte al-Fundok. Cette grande bâtisse abritait dans les années 1960 une école fondée par le beau-père de Yolla, le juge Boutros Noujaim, avant d’être transformée après la guerre en auberge, gérée par l’ONG Arcenciel.
Il y a deux ans, Yolla Noujaim décide de la rénover et d’en faire sa “maison du bonheur”, comme elle l’appelle. Avec son mari, elle investit 500 000 dollars pour aménager 23 chambres doubles, dont six situées dans une annexe, alimentées par l’énergie solaire et imprégnées chacune d’une ambiance différente.
Il faut compter entre 80 et 100 dollars la nuit pour une chambre double et environ 15 dollars pour un lit dans l’un des deux dortoirs mis à disposition des randonneurs. « Quand les visiteurs montent jusqu’à Maasser el-Chouf, ils ne veulent pas se cantonner à la piscine. Nous leur proposons de nombreuses activités en lien avec la nature », explique Yolla Noujaim. Grâce à des accords conclus avec la réserve du Chouf, al-Fundok propose du vélo, des randonnées, des visites et des déjeuners dans les villages de la région, mais aussi des cours de yoga, de danse, de broderie ou de cuisine.
Al-Fundok abrite également le restaurant Em Boutros, dont la carte change toutes les semaines. Au menu : des produits frais achetés au village accompagnés de légumes et d’herbes du jardin. « Les repas sont préparés par des femmes du village, précise Yolla Noujaim. Certains de leurs plats sont en voie de disparition, presque introuvables ailleurs », ajoute-t-elle.